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Immigration en Europe : Le temps des nouveaux murs

Publié le mercredi 9 juillet 2008 à 11h05min

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A la supplication "Ouvrez les frontières ! Laissez-nous passer !" de l’artiste-musicien ivoirien Tiken Jah Fakoly, l’Europe a plutôt donné un tour de vis supplémentaire aux portes de ses frontières. C’est ce que l’on retient de la rencontre, à Cannes en France, des ministres de l’Intérieur et de la Justice des pays membres de l’Union européenne, qui a accouché d’un projet de pacte européen pour l’immigration et l’asile.

L’immigration choisie chère à Nicolas Sarkozy et à son ministre de l’Immigration, de l’intégration et de l’identité nationale, Brice Hortefeux, a traversé les frontières de la France. Elle a contaminé l’Europe, quand on sait que ses opposants la considèrent comme un véritable cancer. Certes, le pacte concocté n’est qu’un projet, mais on imagine mal les chefs d’Etat le rejeter lorsqu’il leur sera soumis en octobre, comme promis. Le président français, Nicolas Sarkozy, ne manquera pas de convaincre ses homologues, comme l’a fait son ministre de l’Immigration.

Les candidats à l’immigration clandestine doivent dès à présent se le tenir pour dit : ils ne sont pas les bienvenus en Europe ; ce continent se donne la latitude d’accepter qui il veut sur son sol suivant un contingentement. Comme en France, ceux qui ne seront pas dans la légalité seront férocement traqués partout dans l’espace communautaire. Aussi les clandestins longue durée n’auront-ils plus la chance d’être régularisés massivement, comme n’ont pas hésité à le faire des pays comme l’Espagne ou l’Italie.

Pour stopper donc la horde de désespérés venus généralement du Sud pour prendre d’assaut ses frontières, l’Europe n’a donc pas trouvé mieux que d’ériger un mur. Il n’y a pas d’autre image pour caractériser le pacte concocté sur la croisette. On croyait le temps des murs révolu, mais c’est sans compter avec la volonté farouche de l’Europe de se préserver, de se prémunir contre la "menace" de l’immigration clandestine. Le danger a changé de nature. Dans le temps, plus précisément à l’époque de la guerre froide entre les blocs de l’Ouest et de l’Est, c’est l’idéologie qui pouvait conduire à l’érection d’un mur. L’illustration parfaite en a été le mur de Berlin, qualifié de mur de la honte. Mais après que ce mur a été démantelé, d’autres, faits de béton et de barbelés, ont surgi ailleurs. Cette fois, pour des raisons essentiellement sécuritaires. C’est le cas du mur construit par Israël au niveau de la bande de Gaza pour se protéger des attaques des mouvements de libéralisation palestiniens. C’est le cas aussi du mur construit par les Etats-Unis le long de la frontière avec le Mexique pour lutter contre, là également, l’immigration clandestine. Mais pour lutter contre ce phénomène des temps nouveaux, est-ce vraiment la solution ?

Le temps des nouveaux murs, disons-le, est un anachronisme à l’ère de la mondialisation. On ne peut pas parler de village planétaire quand, dans le même temps, des barrières sont érigées, même sous forme de législations contraignantes. A moins que la mondialisation, la globalisation dont on parle tant, ne profite seulement qu’aux autres ; et que, finalement, la liberté de mouvement se fasse beaucoup plus dans un sens unique, c’est-à-dire du Nord vers le Sud.

Les conditions d’entrée dans les pays riches devenant de plus en plus difficiles, les Africains devraient travailler à se passer de l’Occident. Il devraient cesser de prendre l’Occident pour un eldorado.

Quant aux dirigeants africains, ils sont fortement interpellés. C’est à eux de développer des initiatives afin de faire de leurs pays respectifs des endroits où il fait bon vivre. Qu’irait-on chercher en Occident quand toutes les conditions sont réunies, chez soi, pour vivre suffisamment à l’aise ?

Assurément, les dirigeants du continent devraient être plus regardants sur leur gouvernance politique et économique, et s’atteler à une meilleure répartition des richesses nationales.

La jeunesse devra être particulièrement soutenue à travers des projets qui lui enlèveraient toute envie de tenter l’aventure.

Pourquoi ne pas, dans ce cas, mettre l’accent sur l’agriculture qui, quoi que l’on dise, nourrit bel et bien son homme ? Du même coup, on pourrait mettre fin à la dépendance de l’Afrique sur le plan alimentaire.

L’Afrique regarde les Européens se "bunkériser" et ses enfants, ses bras valides, mourir sur les océans sans réagir. Ses dirigeants attendent que l’Occident aide leurs pays à retenir les candidats à l’immigration sur place. On le voit avec le projet français de co-développement mené dans des pays à fort potentiel d’immigration, comme le Mali et le Sénégal. Reste que, même là, beaucoup d’Africains en sont toujours à se poser de sérieuses questions sur l’avenir, et particulièrement la jeunesse du continent.

"Le Pays"

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