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Ingrid Betancourt, infirmières bulgares : Sarkozy, libérateur en chef

Publié le vendredi 4 juillet 2008 à 11h46min

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Bernard Kouchner et Ingrid Betancourt

Quel heureux dénouement d’une tragédie franco-colombienne qui dure depuis 2002 ! C’est au cours de cette année, précisément le 23 février, qu’Ingrid Betancourt et sa directrice de campagne à la présidentielle de Colombie ont été enlevées par les Forces armées révolutionnaires colombiennes (FARC), un groupe de rebelles d’inspiration marxiste-léniniste, composé d’une dizaine de milliers de membres, les kidnappings constituant, pour les FARC, un moyen de pression pour obtenir la libération de guérilleros enfermés dans les geôles de l’Etat colombien.

Avant-hier mercredi, avec un scénario qui n’a rien à envier à ceux des écrivains d’Hollywood, les forces armées colombiennes ont pu délivrer cette otage des griffes de ces affreux guérilleros.

Ça nous change beaucoup de ce scénario-catastrophe digne d’un film de série B, que nous avait concocté en 2003 Dominique de Villepin, alors ministre des Affaires étrangères, pour l’exfiltration par voie aérienne de la célèbre prisonnière.

L’avion militaire chargé de le faire a été repéré par les autorités brésiliennes. Quatre jours plus tard, il a redécollé sans même un seul cheveu d’Ingrid à bord et, après avoir froissé les autorités du pays de Pélé, envers lesquelles de Villepin a dû présenter des excuses. L’opération aurait été dirigée directement par le chef de la diplomatie en lien avec l’Elysée. La version française du fameux raid israélien a donc lamentablement échoué.

Quant à cette opération colombienne, force est de constater qu’elle a été rondement menée au grand bonheur de l’ex-captive, qu’on prenait pour morte ou à l’article de la mort. Son mari ne l’a pas trouvée si abîmée que cela : Juan Carlos Lecompte a déclaré qu’elle est « parfaite et lucide », « elle est simplement un peu maigre » tout en reconnaissant avoir été surpris de son bon état de santé apparent.

Pour cette action, digne du Mossad, il a été question d’infiltration d’un agent de renseignement au sein de la direction de la guérilla. Ensuite, ce militaire est parvenu à rassembler les 15 otages, détenus jusque-là séparément en quatre groupes. Réunis, ils ont alors été récupérés par un hélicoptère de l’armée colombienne. L’appareil était peint en blanc, et les membres de l’équipage étaient déguisés en guérilleros afin de faire croire qu’il s’agissait d’un simple transfert de prisonniers.

Mais, en attendant que l’affaire livre tous ses secrets, il y en a qui jubilent très fort en France. A commencer par le chef de l’Etat et les sarkolâtres de tous bords, qui jurent, la main sur le cœur, que leur président est forcément pour quelque chose dans la libération de la célèbre otage. Il serait, selon eux, le coproducteur de cette œuvre.

Certes, les commanditaires de l’opération ne sont pas non plus modestes. Le président colombien, Alvaro Uribe, l’a qualifiée d’opération « qui s’est déroulée à la lumière du Saint-Esprit et a été placée sous la protection de notre seigneur et de la Vierge, c’est une opération d’intelligence comparable aux plus grandes épopées de l’histoire de l’humanité ».

Mais il faut reconnaître que les Français aussi en font trop. Les Etats-Unis, dont des ressortissants ont, du même coup, été libérés, n’ont pas fait un aussi grand boucan sur le rôle qu’ils ont joué dans cette libération.

Ce n’était pas le cas de l’Hexagone, qui, comme d’habitude, a fait un bruyant cocorico, comme si l’affaire avait été goupillée depuis l’Elysée. Pourtant, ceux qui ont organisé l’enlèvement assurent que l’opération est à 100% colombienne.

Rama Yade, qui n’a certainement pas écouté la cassette où ils en parlent, a insisté hier jeudi sur le rôle joué par Nicholas Sarkozy dans la libération d’Ingrid. Et avant le retour de l’ex-otage en France, le président français a vite fait de lui envoyer son médecin personnel, qui va commencer à l’ausculter dès la Colombie.

C’est vrai que le président colombien lui a tiré les marrons du feu, mais pourquoi tient-il coûte que coûte à récolter ce qu’il n’a pas semé ? On ne le sait trop. Cela, d’autant plus que Paris s’est maintes fois prononcée contre toute solution autre que la négociation.

En attendant, cet internaute français ne semble pas croire à une quelconque intervention de son pays dans cette opération, puisqu’il ironise ainsi : « Ouf ! C’est fini et c’est tant mieux pour elle. Heureusement que Sarko n’a pas envoyé les paras de Carcassonne » !

Para ou pas, rien ni personne ne pourront empêcher Sarko de revendiquer sa part de paternité de cette victoire politico-militaro-diplomatique. Il ne lui reste maintenant qu’à trouver les assassins du Juge Borel à Djibouti et de notre confrère Guy André Kieffer en Côte d’Ivoire et , pourquoi pas, dénouer l’inextricable écheveau franco-marocain Ben Bark, et le locataire de l’Elysée endossera définitivement cette tunique de Zorro de la République, qu’il arbore fièrement depuis son accession à la présidence.

Issa K. Barry

L’Observateur

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