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Ecocitoyenneté au Burkina Faso : Des foulées et des coups de pédales des ministres pour réduire le CO2

Publié le vendredi 4 juillet 2008 à 13h14min

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Le 3 juillet 2008 a été déclaré, Journée sans émission de carbone (JSCE) au Burkina Faso. Pour marquer leur engagement à réduire l’émission des gaz carboniques (CO2), des membres du gouvernement se sont rendus au conseil des ministres tenu à Koulouba, ce jour-là qui à pied, qui a vélo ou en convoyage... Le président du Faso, Blaise Compaoré, himself, a été au rendez-vous à pied.

Des membres du gouvernement Zongo sur leurs vélos neufs ou à pied dans les rues de Ouagadougou se rendant au conseil des ministres. Ce n’est pas une fiction, mais une réalité vivante. En tous les cas, les hommes des médias mobilisés depuis 7 heures du matin ont été témoins du dénouement de ce spectacle au palais de Koulouba à Ouagadougou, ce 3 juillet 2008. Est-ce la "vie chère" qui fait qu’il y a pénurie de carburant ou s’agit-il d’une mesure "révolutionnaire ?" Rien de tout cela. C’est plutôt une volonté commune du gouvernement burkinabè de répondre au mot d’ordre du ministre de l’Environnement et du Cadre de vie (MECV), Salifou Sawadogo, appelant à réduire l’émission du gaz carbonique (CO2).

En effet, le 3 juillet 2008 a été déclaré Journée sans émission de carbone (JSEC) par le MECV au Burkina Faso. Le bal des arrivées à ce conseil des ministres "atypique" a été ouvert par le ministre des Enseignements, secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique, Joseph Paré. Accueilli à pied devant la porte d’entrée dans la cour du palais de Koulouba, M. Paré, sueur au front, a dit : "C’est une journée où on demande à chacun de faire un effort particulier pour sauvegarder notre environnement. Voilà pourquoi, de façon symbolique, chaque membre du gouvernement a essayé d’apporter sa modeste contribution...". Et un journaliste de lancer : "Ce n’est apparemment pas facile, M. le ministre" "Il fait un peu chaud, mais ça fait du bien...", a répondu le ministre Paré.

Juste après le ministre des Enseignements secondaire, supérieur et de la Recherche scientifique, ce fut la grande mobilisation et les hommes des médias de courir dans tous les sens. Pendant que les ministres de la Défense Yéro Boly, des Postes, Joachim Tankoano et des Infrastructures, Hyppolite Lingani sont apparus d’un côté à pied, les ministres Soungalo Ouattara, Ousséni Tamboura et Vincent Dabilgou, eux, pédalaient tranquillement, côté à côte comme des lycéens en direction du palais de Koulouba. Tous avaient en tête de contribuer à la sensibilisation à la prise de conscience des problèmes environnementaux. "L’émission de CO2 crée des problèmes de santé et il est tout à fait normal que nous puissions donner l’exemple", a souligné le ministre Lingani.

"Fatigant, mais on tient là !"

Le ministre délégué chargé de la Coopération régionale, Minata Samaté a été la seule femme à venir à ce conseil des ministres à pied. Le ministre de la Promotion des droits humains, Salamata Sawadogo, elle s’est rendue au conseil en compagnie du ministre de la Justice, Djakalia Koté dans le même véhicule. Histoire de réduire l’émission des CO2 à leur façon. Les ministres des Sports, Jean Pierre Palm, du Commerce, Mamadou Sanou et des Mines, Kader Cissé, ont aussi choisi ce même moyen, le "convoyage". Et ce fut l’arrivée du ministre Salifou Sawadogo, initiateur de la journée. Encore installé sur son vélo, il a laissé entendre : "C’est fatiguant, mais on tient là ! Je suis à vélo parce que c’est une journée écocitoyenneté. Les gaz à effet de serre sont à l’origine des changements et des variations climatiques dans le monde. Les effets induits sont le réchauffement de la terre, la sécheresse, les inondations. Par cet acte, nous avons voulu marquer notre appui au thème de la Journée mondiale de l’environnement".

Juste derrière M. Sawadogo, le ministre de la Communication, Filippe Savadogo effectue son arrivée à vélo. "Le vélo est le moyen de locomotion le plus simple et le plus sain. Je faisais le tour du Burkina à ma manière à vélo, donc j’aime le vélo car ça fait partie de mes loisirs, comme le cinéma". Devrait-on s’attendre à ce que Filippe Savadogo prenne part au prochain Tour du Faso ? "Oui, mais derrière une mobylette", a-t-il plaisanté. Le Premier ministre, Tertius Zongo, lui, est arrivé dans son véhicule suivi de sa garde rapprochée. "Je ne suis pas à pied parce que je marche plus tôt que ça. J’ai marché tôt le matin, le soir je vais encore marcher. Je souhaite que ce ne soit pas le seul jour, que les Burkinabè fassent recours aux pieds de temps en temps", a indiqué M. Zongo.

Le ministre des Affaires étrangères, Djibrill Bassolé, quant à lui, a semblé être surpris par la mesure. M. le ministre, on s’attendait à vous voir à vélo. "A vélo ! Pourquoi à vélo ? Je ne savais pas, mais sinon j’aurais marché car ça pollue beaucoup moins", a-t-il dit. A propos de sa nomination au Darfour, M. Bassolé a confié que sa nouvelle fonction est incompatible avec celle de ministre des Affaires étrangères. Et que dans les jours à venir, les dispositions seront prises dans le sens de son départ. Et le ministre de l’Economie et des Finances d’arriver à son tour, à pied. Il a trouvé l’initiative géniale : "Cela peut aider à conserver beaucoup d’argent à l’Etat. Moins de pétrole, moins de fumée.

C’est tellement bien, mais il ne faut pas que ce soit trop long quand même", soutient-il. La particularité, c’est que les membres du gouvernement venus à vélo étaient tous dotés de bicyclette toute neuve du même modèle. Après l’arrivée des membres du gouvernement et du Premier ministre, les hommes des médias ont fait le pied de grue pour voir comment le président du Faso allait se rendre à ce conseil des ministres. Nous apprendrons plus tard que le président du Faso, Blaise Compaoré himself, a donné l’exemple en cette journée de lutte contre la pollution en venant à pied au conseil des ministres. Comme quoi, le mot d’ordre a été bien suivi par les membres du gouvernement.

Ali TRAORE
traore_ali2005@yahoo.fr


"Une mise en scène" qui vaut la peine

Des ministres à pied ou à vélo se rendant à un conseil des ministres au Burbina Faso ! Des concitoyens secoueront certainement la tête en les voyant passer parce que cela ressemble à "un divertissement du peuple". D’aucuns qualifieront ce geste de théâtral, de mise en "scène obcène". Ils ont peut-être raison.
Car en ces périodes de vie chère, les uns et les autres sont sur les nerfs et ne sont pas disposés aux plaisanteries. Certains ont même été contraint d’abandonner leur moto ou leur véhicule, non pas pour lutter contre l’émission de CO2, mais pour survivre.

Mais, cela ne doit pas amener à voir d’un mauvais oeil cette innovation du gouvernement. Un acte symbolique. Un ministre que rien n’oblige, qui marche dans la rue ou qui pédale comme tout citoyen pour contribuer à sauver l’environnement, cela est à encourager sous les tropiques. Il est vrai que le gouvernement ne résoudra pas le problème de la pollution, mais le geste est très symbolique. Il appelle tout citoyen, quel que soit son statut, à apporter sa contribution à la lutte. Après tout, ce n’est ni un Premier ministre, ni un ministre de l’Environnement qui payera en cas d’inondations et autres effets pervers des gaz à effet de serre. C’est toute la planète qui est menacée et personne ne devrait attendre que ce soit son voisin qui agisse pour le sauver. Bien sûr que le gouvernement devra encore s’engager plus.

Mettre l’accent sur la sensibilisation car, on a eu l’impression que le message de cette journée sans émission de carbone n’est pas passée chez les Ouagalais. Ils ont continué à circuler tranquillement. Vous tendez le micro à quelqu’un et il vous dit qu’il n’est pas au courant. Y aurait-il de la mauvaise volonté quelque part ? Après tout, un accent devrait être mis sur le transport en commun. Nombre de personnes semblent être disposées à en faire usage. Pourvu que cela soit bien organisé ! Au-delà de tout, si l’initiative du gouvernement peut être qualifiée de mise en scène, on pourrait dire qu’il s’agit d’une mise en scène qui vaut la peine d’être renforcée et encouragée.

Ali TRAORE


Des Ouagalais apprécient

Des ministres burkinabè à pied ou à vélo pour réduire l’émission de CO2. Des Ouagalais pensent que cela est à saluer, mais ils attendent de voir des actions plus concrètes. Ils l’expriment à travers ce micro-trottoir.

Benjamin Ouédraogo, comptable : "L’initiative du gouvernement est bonne, mais je me demande si au Burkina Faso, cette histoire d’émission de CO2 est une préoccupation. Nous n’avons pas assez d’usines polluantes, même si c’est polluant, ça pollue plus le sous-sol que l’atmosphère. Comme c’est une journée mondiale, c’est bien de participer, mais pour nous Burkinabè, on ne peut pas marcher ! Je ne peux pas quitter Dassasgho pour aller à Pissy à pied.

Même ceux qui roulent à vélo ont des problèmes. Si tout le monde doit circuler à vélo, ce n’est pas possible. Nos routes ne sont pas adaptées, rien n’est fait pour que nous puissions circuler à vélo. Et puis, il y a le climat qui s’en mêle. Trouvons autre chose, par exemple, le transport en commun. Mais pas le vélo (rire). Je pense que les membres du gouvernement chercheraient autre chose à faire que de nous divertir en allant au conseil des ministres à vélo".

Vincent Bambara, professeur de lycée : "L’initiative du gouvernement est une bonne chose parce qu’à Ouagadougou, il y a tellement de mobylettes qu’il faut amener les gens à changer leurs habitudes. Moi, j’ai une moto, mais il y a des moments où j’ai peur de circuler. D’abord, il y a l’insécurité et ensuite, les mobylettes dégagent beaucoup de CO2. Le paradoxe, c’est qu’on voit tous les jours à la télévision, des publicités de mobylettes.Tout est mobylette. Je ne vois pas comment réduire l’émission du CO2 dans cette situation. J’ai l’habitude de prendre le bus. Quand j’ai une destination précise, j’abandonne ma moto et j’emprunte le bus. Apparemment, je vois que le message n’est pas passé. Les gens continuent de circuler comme si de rien n’était. Peut-être qu’il faudra les sensibiliser encore plus. Le problème, c’est que si quelqu’un dépose sa moto, comment peut-il se débrouiller ? Il faut mettre l’accent sur le transport en commun. Je viens de rater le bus et je suis obligé d’attendre au moins une heure. Vous voyez, il y a tout ça..."

Roger Zoungrana, petit commerçant : "L’action des ministres pour réduire l’émission des gaz carboniques est à saluer. Cela donne l’exemple aux autres citoyens de faire un geste dans le sens de la protection de l’environnement. Souvent, je vois à la télévision ou dans les journaux, imprimés, que dans les pays développés, les ministres marchent sans problème. Je crois donc que c’est une bonne chose. Aujourd’hui, je suis venu au travail à moto, comme d’habitude, mais un jour, je vais essayer de venir à pied ou à vélo pour lutter contre la pollution. Le problème, c’est que les moyens de transport en commun ne sont pas développés. Il y a par exemple, des rues où les bus ne passent pas. Si c’était le cas, beaucoup de personnes pourraient utiliser le transport en commun".

Madeleine Song-Naba, agent du Trésor : "L’acte du gouvernement est le bienvenu. La pollution est une maladie pour l’environnement et pour les hommes. Si tout le monde comprenait, ce serait bien. Je suis venue avec mon véhicule au service comme d’habitude, parce que j’ai beaucoup de courses. Il y a déjà le bus pour le transport en commun, cela est à saluer. Je vois aussi des produits qu’on vend et dont on dit que ça vient des Etats-Unis d’Amérique. Non seulement, il semble que ça diminue la consommation des carburants, ça maintient le moteur et ça lutte contre la pollution. Il faut donc prospecter de ce côté".

Propos recueillis par Ali TRAORE

Sidwaya

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