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L’OCADES s’arme contre l’insécurité alimentaire

Publié le mercredi 18 juin 2008 à 11h09min

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La réalisation de la sécurité alimentaire constitue une préoccupation majeure pour l’Eglise Famille du Burkina et surtout pour une structure de pastorale sociale comme l’OCADES. A cet effet, elle a organisé, le 12 juin 2008, un atelier de restitution de deux études sur les mécanismes endogènes de sécurité alimentaire, à savoir la Banque de céréales et le système d’alerte précoce.

Au Burkina Faso, la campagne agricole 2007-2008 a été des plus capricieuses. La sécheresse a succédé aux pluies diluviennes avec la même furie destructrice. Des champs ont été dévastés, des troupeaux emportés avec de surcroît un déficit céréalier déclaré dans quinze provinces : Gourma, Zoundwéogo, Boulkiemdé, Ganzourgou, Zondoma, Koulpélogo, Sanmatenga, Bazèga, Kompienga, Boulgou, Bam, Kourittenga, Komandjari, Nahouri et Kadiogo. Ce phénomène récurrent constitue une réelle menace pour la sécurité alimentaire. Une sécurité alimentaire vue par les économistes comme l’accès à tout moment pour chaque individu à une nourriture quantitativement et qualitativement suffisante pour mener une vie saine et active.

Le droit des peuples à se nourrir, c’est l’affirmation qu’un peuple défini à différents niveaux, d’une communauté locale à un ensemble régional de pays, a le droit imprescriptible de choisir ses modèles d’alimentation. Cette sécurité est évaluée en fonction de la situation nutritionnelle, de la disponibilité alimentaire ainsi que de la stabilité de l’offre alimentaire et l’accessibilité alimentaire dans le pays. Mais au Burkina Faso, l’insécurité alimentaire, frappe une grande partie de la population si fait que près de 41% de la population vie en dessous du seuil de pauvreté. Pour faire face à cette situation, l’Etat s’est doté d’un certain nombre d’instruments dont les banques de céréales et le système d’Alerte Précoce.

L’Etat ne pouvant tout faire, l’OCADES s’est également intéressé à ce type de mécanismes endogènes de sécurité alimentaire. Les deux études restituées ont été commanditées par le Groupe de Travail Caritas Internationalis pour le Sahel (GTCIS). Benoît Ouédraogo est le consultant principal de l’équipe qui a mené les investigations sur les banques de céréales. L’étude reste à parachever. Michel Zerbo, lui a axé sa réflexion sur le Système d’Alerte Précoce (SAP). A l’ouverture des travaux, le Secrétaire Exécutif National de l’OCADES, l’Abbé Isidore Ouédraogo a insisté sur toute l’importance que ces instruments revêtaient pour un pays comme le Burkina Faso qui plus est, dans un contexte de vie chère. Il a dans le même temps fait mention de la vision de l’OCADES qui est d’œuvrer à l’avènement d’un monde juste et solidaire.
Sur 2000 banques de céréales, 1200 ne fonctionnent pas !

De la présentation de M. Benoît Ouédraogo, on retient que les banques de céréales sont des réserves organisées et gérées par des associations ou collectivités locales. Leur fonctionnement repose sur un principe : achat de céréales au moment de la récolte (quand le prix est le plus faible), stockage puis revente aux familles à prix social pendant la "période de soudure" des produits stockés. La "période de soudure" précède la période des récoltes. Pendant cette période, la rareté de l’offre favorise la spéculation et ne permet plus l’accès aux produits de première nécessité, la survie alimentaire devient alors aléatoire.

La durée de cette période de soudure est variable selon les lieux et les conditions climatiques et notamment la qualité de la saison des pluies précédente. Au Burkina Faso, la période de soudure va généralement de juillet à septembre. Le consultant évalue le nombre de banques de céréales au Burkina, à 2000. Mais il précise que seuls 800 sont réellement fonctionnelles. Les banques de céréales remplissent une fonction économique, une fonction sociale et une fonction de promotion car elles permettent d’améliorer l’économie de la localité où elles sont implantées. Mais M. Benoît Ouédraogo constate que ces trois fonctions ne sont pas effectives du fait de l’option économique libérale. Conséquences, ces banques sont dépourvues de fonds de roulements, de comité de gestion ou même totalement fermées. Parmi les instruments de l’Eglise, il y a non seulement les banques de céréales mais aussi les stocks de sécurité alimentaire et les stocks d’aide humanitaire. Leur implantation géographique permet un ravitaillement de plusieurs paroisses. Une autre particularité réside dans l’existence des excédents céréaliers et l’assistance technique de Catholique Relief Service (CRS). Mais ces instruments rencontrent également des difficultés de fonctionnement liées à la faiblesse des moyens financiers et au manque d’un encadrement spécialisé. C’est pour cette raison que le consultant préconise des formations en entretien de stock et des voyages d’études pour s’inspirer des expériences réussies ailleurs.

Un SAP à perfectionner

Le 2è consultant Michel Zerbo constate que la qualité de la réponse aux crises alimentaires est fortement liée aux mécanismes de collecte et de traitement d’informations sur la situation. D’où la nécessité de disposer d’un système d’Alerte Précoce. Le SAP peut être envisagé comme « un système diagnostic multifonction d’information, de suivi et d’outil d’aide à la décision pour des mesures nécessaires concernant les problèmes de déficits et excédents de production et la famine ». Cette caractérisation de l’alerte précoce dans le contexte de la sécurité alimentaire renvoie entre autres à la prévision des risques de sécheresse, d’invasion acridienne et d’inondation, à la prévision des facteurs conjoncturels susceptibles d’influencer l’accessibilité alimentaire… L’OCADES est intervenue dans plusieurs situations de crise. Mais l’efficacité de ses interventions peut être renforcée par la mise en œuvre d’un Système d’Alerte Précoce. Selon Michel Zerbo, le système actuellement en vigueur est caractérisé par une absence de cadre réglementaire, des informations non référencées, un bénévolat trop contraignant et une multiplicité des centres de décision. Le consultant estime qu’il serait alors souhaitable de spécifier clairement l’organe ou les organes de décision dont le rôle consisterait à déclarer le sinistre et à instruire les programmes d’urgence avant que les organes d’exécution ne se mettent en activité. Les participants sont venus des différents démembrements de l’OCADES. L’objectif était d’aboutir à une implication dans la réflexion. On a effectivement assisté à de véritables débats nourris au cours de la restitution des études.

L’OCADES au côté des plus faibles

En 2007 déjà, l’OCADES organisait une rencontre sur le SAP, toujours sous la houlette du GTCIS. Les orientations de cette rencontre lui ont permis de répondre aux difficultés engendrées par la campagne agricole 2007-2008 de trois manières : La première réponse du réseau OCADES a été l’assistance aux personnes victimes à travers les communautés de bases, les paroisses et les diocèses. Les victimes des inondations ont été assistées en vivres et matériel de couchage à Bobo, Banfora, Manga et Kaya. Les sans abris ont été accueillies dans les écoles et même des chapelles de villages. Le secrétariat national a appuyé financièrement selon ses moyens les diocèses de Bobo et de Manga avec une somme de 500 000F CFA. Il a aussi organisé la collecte et le traitement des informations afin de mieux affiner la stratégie d’intervention.

La deuxième réponse a été organisée avec CRS/Burkina parce que CRS Burkina et OCADES travaillent ensemble en consortium pour le secours d’urgence. La somme de 22 220 713 F CFA a servi à aider les victimes des diocèses de Manga, Bobo et Banfora. L’USAID a participé à cette action à travers une enveloppe de 50 000 Dollars US (23 647 500F CFA). Le consortium a expérimenté une méthode dite « foire » qui a permis aux bénéficiaires de choisir eux-mêmes ce dont ils avaient besoin sur la place du marché du village. Les matériaux de constructions (ciment, tôles ondulées, portes, fenêtres…) et les vivres ont été les plus prisés.

Les femmes chefs de ménages bénéficiaires ont souvent opté pour les ustensiles de cuisine, le matériel de couchage et de ménage. Cette méthode a permis d’enrichir les commerçants du village afin de créer par là des richesses dans les villages affectés. La troisième réponse a été menée avec la Coopération Canadienne qui a mit à la somme de 38 670 600 francs CFA disposition de l’OCADES pour un appui des populations en kits alimentaires et scolaires sur le volet secours d’urgence pendant un mois (novembre) ; en kits médicaux, en formations et équipement dans le domaine du maraîchage et de la confection des fosses fumières dans le volet réhabilitation pendant trois mois. Cette opération a concerné uniquement les victimes du diocèse de Ouahigouya (paroisse de Titao). En décidant de se doter d’instruments plus performants, l’OCADES veut renforcer son efficacité pour des actions concrètes et planifiées au service des populations vulnérables.

Arsène Flavien Bationo (bationoflavien@yahoo.fr)
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