LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Côte d’Ivoire : La France marque son retour

Publié le mardi 17 juin 2008 à 10h45min

PARTAGER :                          

"Une page est tournée dans les relations entre la Côte d’Ivoire et la France". Foi du ministre français des Affaires étrangères, Bernard Koutchner, qui vient d’achever une visite de deux jours sur les bords de la lagune Ebrié. L’heure est à présent au réchauffement des relations entre les deux pays, qui s’étaient littéralement dégradées avec la crise ivoirienne.

A ce propos d’ailleurs, le président ivoirien ne s’était pas embarrassé de langage diplomatique pour dire qu’il dort mieux depuis que Chirac n’est plus à l’Elysée. Si, entre Paris et Abidjan, on se remet à se faire les mamours, c’est qu’il y a bien une leçon à tirer de cette nouvelle phase : il faut se garder d’intervenir entre les deux conjoints français et ivoirien.

Malgré des scènes de ménage occasionnelles sur fond d’invectives, de douleurs, d’humiliations et de ressentiments de part et d’autre, ils sont si liés par le mariage d’intérêt que les projets de divorce ne vont jamais bien loin. Même s’il est vrai que la réconciliation entre les deux époux a été favorisée par l’arrivée d’une nouvelle équipe à l’Elysée qui s’emploie à réparer les "torts" causés par l’ancien locataire de l’Elysée.

Reste à savoir qui a fait le premier pas pour négocier la réconciliation. "Une fois la date des élections [présidentielles] fixée et donc connue de tous", il était de bon ton que Bernard Koutchner allât à Abidjan pour un réchauffement effectif des relations. Un bel argument s’il en est, pour aller vers la Côte d’Ivoire, et espérer, dans le même temps, son pardon. Et pour en rajouter à l’argument, Paris affirme que Laurent Gbagbo a promis de "faire tout ce qui lui est humainement possible pour que la date du 30 novembre soit tenue". La France, pour sa part, a été tellement frappée par le cours heureux des événements qu’elle est disposée à accompagner la Côte d’Ivoire dans la préparation du scrutin de novembre prochain. Elle devrait apporter sa contribution à hauteur de 2 millions d’euros.

Reste que si la bonne "atmosphère politique" qui prévaut actuellement à Abidjan, pour reprendre les termes du french doctor, se raffermissait, la Côte d’Ivoire n’en serait pas la seule bénéficiaire. On sait combien la France et ses citoyens comptent d’intérêts multiformes dans ce pays qui demeure dans la sous-région ouest-africaine, l’Eldorado des milieux d’affaires français.

A la faveur des tristes événements de novembre 2004, les opérateurs économiques français avaient dû regagner, la mort dans l’âme, leur pays d’origine. Puis, une fois que les choses semblaient revenues à la normale, ils se sont empressés de retourner dans leur "seconde patrie", toute chose qui n’est pas sans renseigner sur les nombreux intérêts qu’ils tenaient à sauvegarder en Côte d’Ivoire.

Et que dire de ces Français qui, malgré tous les risques, avaient tenu à ne pas rentrer pour des raisons autres que celles affectives qu’ils nourrissaient à l’égard de ce pays ? Après donc les opérateurs économiques français, c’est au tour des politiques de l’Hexagone de montrer combien la branche des relations entre la Côte d’Ivoire et la France peut se tordre sans jamais se casser. Quoi de plus normal en cela quand la France tient à marquer son territoire suite à l’intrusion de concurrents sérieux dans son pré carré. Si la Côte d’Ivoire demeure, comme le remarque Bernard Koutcher, un pays potentiellement riche de ses "énergies et de ses citoyens", la France peut-elle longtemps laisser s’échapper sa "poule aux oeufs d’or" ?

A présent que les deux partenaires pour la vie, sont revenus à de meilleurs sentiments, quid de l’affaire Guy André Kieffer et de bien d’autres dossiers qui fâchent ? Le chef de la diplomatie française a été, en tout cas, clair à ce propos. Certes, cette disparition fait beaucoup de peine à la France qui continuera à s’y intéresser et qui, d’ailleurs, n’entend rien oublier du passé. Mais la recherche de la vérité ne saurait altérer le vif réchauffement entre la France et la Côte d’voire. Pas besoin d’un dessin pour comprendre que les intérêts de la France passent avant tout.

Dans le bras de fer qui l’a opposé à la France, Laurent Gbagbo en sort finalement gagnant. Non seulement la France marque son retour en Côte d’Ivoire, mais aussi Gbagbo est toujours au pouvoir et les élections se présentent pour lui, sous de bons auspices avec la quasi-assurance que les Forces impartiales (ONUCI et Forces Licornes) seront là pour sécuriser le scrutin présidentiel. Bien plus, Gbagbo se sera présenté aux yeux de son peuple en héros national, en montrant à la face de la France une intransigeance politique lucide, en se présentant sous les traits d’un président qui ne se laisse pas conter.

Au total, Laurent Gbagbo peut savourer sa victoire, tout en se réjouissant du retour de l’Hexagone dans son pays, sur fond de changement de ton favorable à la préservation des intérêts mutuellement avantageux entre Paris et Abidjan..

"Le Pays"

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique