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Ordre national des Experts comptables agréés : Quatre membres radiés, le président explique...

Publié le jeudi 17 juin 2004 à 06h25min

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Le 06 avril 2004, le Conseil de l’Ordre national des experts comptables et comptables agréés (ONECCA) procédait à la radiation de quatre (4) de ses membres. Son président, M. Siaka Traoré donne des précisions sur cette exclusion. Il présente également son organisation professionnelle et porte un jugement sur l’exercice de la profession comptable au Burkina Faso et ses enjeux dans l’économie.

Sidwaya (S.) : Pourquoi avoir créé un Ordre national des experts comptables et comptables agréés (ONECCA) dans un contexte de mondialisation où tout se libéralise ?

Siaka Traoré, président de l’Ordre national des experts comptables et comptables agréés (S. T.) : En vue de mieux lutter contre la fraude dans le cadre du "Plan national de lutte contre la fraude", la Direction générale des Impôts (DGI) a initié dès 1990 des études et des actions pour la création d’un Ordre national des experts comptables et comptables agréés (ONECCA). Elle entendait par là, assurer la transparence dans la gestion des entreprises. Cette nécessité trouve son fondement dans le rôle si prépondérant que les acteurs de la comptabilité joue dans l’établissement des bilans des entreprises.

La création de l’ONECCA s’inscrit dans les dispositions de la loi n° 22/96/ADP du 13 juillet 1996 portant création d’un ordre des experts comptables et comptables agréés. Elle règlemente la profession comptable au Burkina Faso, à travers un décret d’application n° 96/94/PRES du 13 décembre 1996. Les instances de l’ordre sont l’Assemblée générale (AG) et le Conseil qui est composé de dix membres (5 experts comptables et 5 comptables agréés). Le Commissaire du gouvernement représente le ministre des Finances et du Budget, aux réunions de l’Ordre.

Le Conseil de l’ordre travaille en trois commissions : commission déontologie et diligence, commission tableau et commission discipline dont les membres sont élus en AG. Ces commissions créées par l’Ordre s’occupent de questions spécifiques. La commission "tableau" est chargée de proposer au Conseil des inscriptions de candidats à l’Ordre. Elle parvient à une conclusion suite à une demande d’adhésion qu’elle transmet au Conseil. Cette instance réexamine le dossier et émet son avis qui peut-être favorable ou défavorable à l’admission du candidat dans l’ordre.

Car l’article 21 du décret stipule que "le Conseil doit s’assurer non seulement que "le postulant remplit toutes les dispositions légales mais encore que sa situation ne fait pas obstacle au plein et libre exercice de la profession, et s’il présente par sa moralité et son honorabilité, toutes les garanties suffisantes pour la dignité de l’Ordre". Donc l’appréciation de l’adhésion d’un candidat est l’objet de plusieurs facteurs qui font que la commission "tableau" et le Conseil n’ont pas toujours le même avis sur le postulant.

Pour la deuxième commission, "diligence et déontologie", elle instruit les différends professionnels entre les membres de l’ordre eux-mêmes ou entre membre de l’ordre et un tiers. Lorsque le président est saisi pour un problème d’indiscipline ou pour un différend entre deux membres, le président peut demander l’avis de la commission "diligence et déontologie" avant que le Conseil ne prenne une décision. C’est une importante commission car c’est elle qui est chargée d’écrire les normes et de fixer les pratiques comptables. Car, il y a un code de devoir professionnel que tous les membres de l’Ordre doivent respecter. Quant à la dernière commission "discipline", elle se penche sur les dossiers jugés complexes par la deuxième commission. Elle se réunit sous forme de cour interne avec les parties concernées pour trancher.

L’ONECCA compte aujourd’hui 52 membres dont 34 experts comptables et 18 comptables agréés. Les experts comptables exercent une mission plus large et plus complète. Ils font des missions d’expertise comptable pure : réviser, analyser, centraliser, établir les bilans, etc. Ils sont également habilités à mener des missions légales ou contractuelles d’audit. Les comptables agréés ne sont autorisés qu’à exercer des missions comptables et non celles d’audit. En dehors de cette différence liée à l’exercice de la profession, se pose aussi la question des diplômes. Les experts comptables disposent d’un dîplome plein d’expertise comptable et d’audit. Les comptables agréés, eux, justifient d’un DUT en comptabilité et d’une expérience professionnelle. La loi a établi les conditions de leur admission dans l’Ordre.

S. : L’ONECCA existe depuis 1996. A quoi consiste alors le projet de loi portant création d’un ordre des experts comptables et comptables agréés que votre ministère de tutelle s’apprête à soumettre au Conseil des ministres ?

S. T. : Le nouveau projet de loi fait suite à l’adoption par l’Union économique et monétaire Ouest africaine (UEMOA) de la directive portant création d’un ordre d’experts comptables et comptables agréés dans tous les Etats membres.

L’Union nous engage à relire nos textes et les rendre conformes aux dispositions communautaires. Et c’est ce que nous avons fait à travers ce nouveau projet de loi qui sera bientôt soumis au Conseil des ministres. Nous avons également profité pour corriger les insuffisances et les incohérences apparues dans l’application de la loi de 1996. En outre, la loi sur la profession des commissaires au compte n’était plus d’actualité au vu des nouvelles dispositions de l’OHADA.

Trois points essentiellement n’étaient pas conformes avec la directive de l’UEMOA. Premièrement, il y a la question de la nationalité. La directive stipule que tout individu membre d’un Etat de l’Union qui justifie des conditions requises peut être inscrit sur le tableau de l’ONECCA. Ensuite, l’obligation de la formation continue n’était pas contenue dans nos anciens textes. Le troisième aspect concerne les conditions de participations dans les sociétés d’expertise comptable et d’audit.

Le capital de ces sociétés est détenu par des personnes physiques et morales. La loi stipulait que le capital doit provenir à la majorité simple des professionnels de la comptabilité. Or, la directive de l’UEMOA précise que ce sont les 3/4 du capital qui doivent être fournis par les professionnels. Voici les changements majeurs intervenus dans la relecture des textes.

S. : Les experts comptables et comptables agréés burkinabè ont-ils les compétences requises pour exercer selon les règles de l’UEMOA et l’OHADA, et accompagner efficacement les entreprises nationales dans ce contexte de libéralisation où les gros contrats se lient ?

S. T. : L’inscription au tableau de l’Ordre se fait sur la base d’une présomption de compétence. Toute personne inscrite en tant qu’expert comptable, au regard de ses qualifications est présumée capable d’assumer toutes les tâches dévolues à la profession. Les professionnels experts comptables ne sont pas détachés des réalités de l’économie mondiale. C’est pourquoi des séminaires, des formations continues et des séances de mise à niveau sont organisés à leur intention. Cela est aussi valable pour les autres corps de métiers car nous sommes dans un monde en pleine mutation.

Bien que les réalités économiques diffèrent d’un pays à un autre, professionnellement, un expert comptable ou comptable agréé burkinabè n’est pas moins compétent que son confrère ivoirien, guinéen ou français. Il y en a parmi nous qui ont des contrats en Côte d’Ivoire, en France, au Mali. Ils les exécutent efficacement tant sur le plan professionnel que déontologique. Les professionnels burkinabè de la comptabilité n’ont aucun complexe à se faire dans l’accomplissement de leurs tâches.

S. : Le conseil de l’ONECCA a procédé le 6 avril 2004 à la radiation de quatre de ses membres. Quels sont les motifs de cette radiation et le sort réservés aux concernés ?

S.T. : Toute profession réglementée donne certes des droits à ceux qui l’exerce mais les astreint aussi à des contraintes. Je ne peux pas vous donner les raisons de l’exclusion des quatre (4) membres de l’ONECCA prononcée le 6 avril 2004. La loi nous interdit de rendre publics les motifs d’une telle décision. Lorsque l’on y parvient, les textes stipulent qu’il faut la publier uniquement dans les journaux avec les termes de la loi qui punissent la pratique illégale de la profession.

Toutefois, il est notifié aux intéressés les raisons de leur radiation. Seuls, eux, peuvent en parler dans la presse. D’une façon générale, il y a plusieurs causes liées à l’exclusion d’un membre de l’ordre. Les radiations sont prévues par l’article 36 du décret d’application de la loi et les autres textes régissant la profession comptable. "Sont radiés de l’ordre, les membres ayant fait l’objet d’une condamnation pour infraction, pour atteinte aux bonnes mœurs, ou qui ne se sont pas acquittés de leurs cotisations deux années successives, etc’’.

Je ne dis pas que ceux qui ont été radiés sont coupables de ces manquements. Je ne fais qu’énumérer les motifs qui peuvent conduire à une telle décision, selon les textes. Tout adhérent à un ordre professionnel doit s’acquitter des contraintes et des obligations prescrites par notre code de devoir professionnel. La radiation des quatre (4) membres fait suite à une longue procédure. Parmi eux, il y a une société. Elle ne peut plus exercer en tant que personne morale. Mais les experts comptables et comptables agréés qui la composent ne sont pas concernés par cette décision de radiation.

Le conseil de l’Ordre n’a fait qu’appliquer la loi et les textes régissant la profession comptable. D’ailleurs, cette décision est très douloureuse pour nous. Car l’Ordre n’a pas assez de membres. Nous ne sommes que 52. Si nous sommes obligés d’exclure certains, ce n’est pas de gaieté de cœur. La loi est dure mais c’est la loi. Les décisions du conseil de l’Ordre sont irrévocables. Ceux qui ont été radiés ne peuvent plus jamais exercer les fonctions d’experts comptables et de comptables agréés ni au Burkina, ni ailleurs en Afrique ou en Europe car les tableaux de l’Ordre de tous les pays sont rendus publics chaque année.

S’ils s’obstinent, ils tombent sous le coup de la pratique illégale de la profession. Et là, la loi est plus que claire. Maintenant, si les personnes concernées estiment qu’elles ont été brimées dans leur bon droit, elles sont libres de saisir les juridictions. D’autres responsables de l’Ordre auraient pris à leur endroit la même décision que la nôtre.

Il fallait appliquer la loi et elle a été dite avec toute la rigueur et les conséquences que cela pouvait créer. Cette décision interpelle tous les membres de l’Ordre à respecter de leurs engagements et à observer des comportements honorables.

S. : Dans votre message de vœux de nouvel an, vous avez fustigé les membres de l’Ordre qui s’adonnent à la publicité personnelle et promis d’y mettre fin. Qu’en est-il exactement ?

S.T. : Lors de la présentation de vœux, j’ai tout simple dit que l’Ordre souffre de la publicité faite par certains de ses membres. Or, les textes réglementant la profession comptable interdisent toute forme de publicité personnelle des membres. Je n’ai fait qu’interpeller les uns et les autres à observer une plus grande prudence et une vigilance vis-à-vis de la loi. Certains confrères font de la publicité seulement par ignorance parce qu’ils ne lisent pas assez les textes.

J’ai alors proposé qu’on puisse discuter de la question dans un cadre convivial. Chacun sera situé sur cet aspect de la profession et prendra ainsi ses responsabilités. Tout le problème réside dans les termes "publicité personnelle’’. Elle dépend donc de l’interprétation que l’on peut en faire. Voilà pourquoi, j’ai parlé dans mon message de "publicité personnelle, tapageuse et outrancière’’.

J’ai par la même occasion engagé le conseil de l’Ordre à organiser des séances de formation à cet effet pour que les membres de l’ONECCA ne tombent pas dans la tentation de la publicité. Les publications courantes qui font ressortir les adresses des cabinets de comptabilité et d’audit ne sont pas de la publicité. Il faut s’accorder sur le contenu et la compréhension exacte que l’on peut faire de "publicité personnelle tapageuse et outrancière’’. Tous les membres seront informés et ne pourront plus se dérober de cette contrainte. Celui qui enfreint aux recommandations sera désormais sanctionné.

Une profession comme la nôtre se fonde sur une production intellectuelle de qualité. Raison pour laquelle le législateur a expressément interdit la pratique publicitaire dans ce secteur d’activités. La vraie publicité de son entreprise réside dans la capacité à mieux faire son travail. Ce sont les compétences et l’efficacité dont l’on fait preuve dans le traitement des dossiers qui font marcher une entreprise. Dire que l’on est ceci ou cela, c’est inciter les usagers à consommer un produit dont on est pas si sûr de la qualité. Et nous travaillerons, en toute confraternité et en toute convivialité, à aplanir les divergences de vue sur cette question.

S. Quel message lancez-vous aux usagers des cabinets comptables et à vos confrères pour que l’exercice de la profession comptable soit plus transparent et efficace au Burkina Faso ?

S.T. : Pour rendre transparente et efficace la profession comptable au Burkina Faso, il faut renforcer les activités de formation continue. Car, si les prestations des professionnels de la comptabilité ne sont pas de bonne qualité, c’est toute l’économie nationale qui est menacée. Et le conseil de l’Ordre doit faire en sorte que les membres soient en permanence au diapason des réalités de l’économie internationale, son évolution dans le contexte de la mondialisation et les mutations comptables.

Ainsi, la formation tient une grande place dans notre programme. Bientôt, une formation "sur la micro-finance et ses attentes en matière d’audit’’ sera organisée à Tenkodogo. D’autres séances tel "le commissariat au compte et l’OHADA’’ sont également au menu. Ces formations participent de notre souci d’avoir des professionnels compétents. Pour avoir un véritable travail de qualité, il faut une adhésion totale de tous les membres de l’ONECCA. Que toutes les actions entreprises par l’Ordre reçoivent une participation unanime de tous. Une structure de "contrôle de la qualité’’ sera mise en place pour apprécier le travail et renforcer les rendements.

Il est suicidaire pour une entreprise de se référer à un professionnel de la comptabilité non inscrit sur le tableau de l’Ordre. Les usagers des cabinets comptables doivent savoir que la comptabilité de leur entreprise est capitale pour sa survie. Par conséquent, ils ne doivent pas la confier à n’importe qui. L’établissement des bilans comptables est fondamental aussi bien pour l’entreprise que pour l’économie du pays. Qu’ils se réfèrent aux professionnels compétents pour leurs travaux comptables. La liste des experts comptables et comptables agréés inscrits au tableau de l’Ordre est actualisée chaque année et disponible à son siège. Elle peut être consultée à tout moment et être mise à la disposition de celui qui le désire. Il est préférable pour les usagers de s’y référer avant de confier leurs travaux comptables à un cabinet. Demander les services de quelqu’un qui n’est pas en règle, c’est encourir des peines très graves car l’usager devient un complice.

Interview réalisée par Rabankhi Abou Bâkr ZIDA
et Jolivet Emmanüs Sidibé PAG BELEGUEM

Les quatre radiations prononcées

Les personnes physiques et morales radiées du tableau de l’Ordre national des experts comptables et des comptables agréés du Burkina Faso (ONECCA)-BF) pour compter du 5 avril 2004 conformément à l’article 18 du code des devoirs professionnels, suite à la décision du conseil national sont les suivantes :

1. Coulibaly Walomia Augustin, précédemment inscrit au tableau de l’Ordre à la section 1 : "Expert comptable indépendant’’.

2. Salembéré Lamoussa, précédemment inscrit à la section 4 du tableau de l’Ordre : "Comptable agréé indépendant’’.

3. Traoré Luc Joseph, précédemment inscrit à la section 4 du tableau de l’Ordre "Comptable agréé indépendant’’.

4. La Société d’expertise financière, comptable et de développement (SEFICODEV-Sarl), précédemment inscrite à la section 3 du tableau de l’ordre "Société d’expertise comptable’’.

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 10 octobre 2015 à 15:16, par joseph nicolas madimba tshiebwa En réponse à : Ordre national des Experts comptables agréés : Quatre membres radiés, le président explique...

    monsieur le président,
    je fais les études de maîtrise en comptabilité, gestion et audit ohada à l’institut supérieur de commerce de Kinshasa. voudriez-vous me transmettre les textes règlementaires et juridiques de l’ordre des experts comptables du Burkina Faso pour me permettre de faire un travail de recherche par rapport à celui de notre pays, la RDC.
    ce dont, je vous remercie d’avance

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