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Cinéma et audiovisuel : L’espace UEMOA s’organise

Publié le mardi 15 juin 2004 à 10h09min

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Les ministres de la Culture et de la Communication, les directeurs du cinéma et des télévisions des huit pays de l’Union Economique et Monétaire Ouest - Africaine (UEMOA) se sont retrouvés du 1er au 5 juin dernier à Bamako pour examiner et adopter un programme d’actions communes dans les domaines de la production, de la circulation et de la conservation des images.

A cette rencontre de Bamako, le Burkina Faso était représenté par le ministre de l’Information Joseph Kahoun, le représentant du ministre de la Culture, Paul Zoumbara, le directeur général de radiotélévision, Marcel Toé et le directeur de la cinématographie nationale, Ismaël Ouédraogo.

Avec leurs pairs des sept autres pays de l’Union, ils ont apporté leur éclairage au projet de programme d’actions communes élaboré par les experts afin de sortir l’espace UEMOA de la crise profonde de l’image dans laquelle il est plongé.

Quatre actions prioritaires et une batterie de mesures d’accompagnement ont été définies. L’objectif général vise à doter l’union de moyens endogènes assurant une production pérenne, dynamiser la circulation des images au sein des pays de l’Union, pourvoir à leur conservation durable et jeter les bases d’une formation professionnelle efficiente dans les domaines du cinéma et de l’audiovisuel.

Organiser la filière

Pour ce faire, il a été convenu d’harmoniser les législations nationales par l’établissement des principes directeurs d’un cadre règlementaire communautaire. Ces règles communes devront connaître une application réelle pour garantir les droits des auteurs et des producteurs. Il est plus que temps d’assainir les domaines du cinéma et de l’audiovisuel, mettre fin à l’anarchie qui en font quasiment des secteurs informels et réellement dans celui de la vidéo aux mains de flubistiers de l’image et où n’importe aventurier s’érige en réalisateur.

Mécanismes de financement

Les productions de la sous-région dépendent pour leur financement à plus de 90% des subventions extérieures. Tout en renforçant de manière cohérente et coordonnée les partenariats internationaux, le programme a prévu la mise en place de mécanismes financiers destinés à soutenir la création, la diffusion et la circulation des images.

Cette action sera soutenue par la création d’un fonds de développement de l’image et celle d’un fonds de garantie pour faciliter l’accès au crédit bancaire des entreprises de l’image. La modernisation des régies publicitaires des télévisions nationales publiques et la généralisation de la redevance télévisuelle à tous les Etats pourront leur permettre d’affermir leurs bases structurelles et financières.

Lever la pression fiscale

Le développement des secteurs de l’image est fortement handicapé par la pression fiscale exercée par des démembrements de l’Etat sur certaines activités de la filière.

Le programme appelle à des allègements fiscaux et douaniers par des mesures favorables au développement du marché. Ce marché est bien modeste avec un chiffre d’affaires direct estimé à 50 milliards de F CFA en 1993. La France seule en 1995 a réalisé une recette globale de 4,5 milliards de F.F. pour 129,7 millions d’entrées en salles ! Dans nos pays sont taxés au prix fort les matériels de production et de diffusion professionnels (cameras, pellicules, cassettes, appareils de projection, accessoires divers et même les affiches de films). Les exploitants de salles de cinéma doivent également faire face à une assiette fiscale à la limite du supportable.

La formation et la révolution numérique

La mise en œuvre de ce beau programme n’est possible qu’à travers l’action de compétences humaines en phase avec les progrès extrêmement rapides qu’impriment les nouvelles technologies, qui révolutionnent radicalement tous les secteurs, en particulier ceux du cinéma et de l’audiovisuel.

Aussi le programme d’actions communes a-t-il fait une place de choix à la formation. Il y a une réelle urgence d’établir un calendrier prévisionnel de son exécution. Dans le domaine de la formation il avait été créé en 1975 à Ouagadougou sous l’égide de l’UNESCO, l’Institut Africain d’Education Cinématographique (INAFEC). Cet institut sous-régional à défaut de la contribution des Etats qui ont souscrit à sa création a dû fermer ses portes en 1987. Le Burkina Faso conscient d’assurer la relève des professionnels a mis en place depuis avril 2000 un programme de relance de la formation aux métiers de l’image et du son devant déboucher sur la création d’un Institut Régional de l’Image et du Son (IRIS).

Les Etats africains en général et plus spécialement ceux de l’espace UEMOA doivent prendre conscience du caractère incontournable et vital de la formation et armer leur jeunesse du savoir - faire indispensable à la pérennisation de nos images.

L’outil numérique au plan de la création, de la production, de la diffusion et de la conservation des images offre de nouvelles chances à l’Afrique d’exister dans les domaines du cinéma et de l’audiovisuel. La numérisation de l’ensemble de la filière image dit le programme d’actions communes est un processus irréversible.

Préserver la mémoire et l’harmonie des peuples

Les Etats ont également été interpellés quant à leur désengagement excessif des secteurs de l’image provoquant la crise dramatique de l’image que vit l’Afrique.

Dépendant des financements extérieurs, les productions se raréfient, les salles de cinéma ferment, sont transformées en magasins de stockage ou en temples ; les vidéo-clubs poussent comme des champignons dans l’illégalité la plus totale, piratent les œuvres et dépravent la jeunesse par les films X et de séries B diffusés à longueur de journée, enfin les satellites déversent leurs produits dans les foyers. Un bien triste tableau qu’il faut repeindre.

L’importance stratégique du programme adopté est évidente face au déferlement des images venues d’ailleurs qui submergent les 75 millions d’habitants de cette zone. L’outil numérique au plan de la création, de la production, de la diffusion.

Aucun des grands pays de cinéma ne s’est jamais retiré entièrement des secteurs du cinéma et l’audiovisuel car le film est une arme culturelle, idéologique et économique.

Le programme d’actions communes a souligné l’importance de la préservation de la mémoire filmique de l’histoire sociale, politique et culturelle des Etats.

Les professionnels sont invités à fédérer leurs organisations et entreprises en vue d’une convergence des initiatives nationales en faveur de l’image.

Au-delà des aspects culturels, financiers et économiques, les travaux de Bamako revêtent une dimension sociale et politique.

Le programme, en effet, met l’accent sur le rôle d’intégrateur des télévisions publiques nationales. Par l’intensification d’échanges d’images d’actualité et de programmes, elles peuvent grandement œuvrer à une meilleure connaissance réciproque et d’acceptation mutuelle entre les populations des pays de l’UEMOA.

Emmanuel SAMA
Direction de la cinématographie nationale

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