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Mariage homosexuel en France : Une leçon de démocratie et de tolérance

Publié le jeudi 10 juin 2004 à 07h55min

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Contre vents et marées, le maire de Beigle, l’écologiste Noël
Mammère a officié le premier mariage homosexuel en France le
5 juin 2004. Devant Dieu et devant les hommes, deux hommes
se sont unis pour le meilleur et pour le pire selon la formule
consacrée du mariage. Si ce couple hors du commun a scellé
son union, la France, leur pays, est divisée entre ceux qui
condamnent ce genre de mariage et ceux qui l’approuvent.

Au-delà de ce débat dans lequel nous n’allons pas entrer, il faut
relever le contexte dans lequel il a lieu. Que ce soit avant,
pendant ou après le mariage, il n’a été noté aucune opposition
par la violence. Les protestataires font savoir simplement leur
désapprobation sans aller jusqu’à poser des actes pouvant
entraver la célébration du mariage ou s’en prendre ouvertement
aux protagonistes c’est-à-dire l’ancien journaliste devenu maire
et les deux tourtereaux. Les autorités françaises, notamment le
ministre de l’Intérieur, Dominique De Villepin, ont aussi adopté
la même attitude.

Pourtant, fort de son pouvoir, de son autorité,
ce dernier pouvait bel et bien interdire la célébration du mariage.
Il pouvait tout simplement faire investir la mairie par des agents
des forces de l’ordre et empêcher quiconque d’y accéder. Mais, il
ne l’a pas fait, préférant plutôt recourir à la justice pour, d’une
part révoquer de ses fonctions le maire "rebelle", de surcroît son
subordonné, et d’autre part annuler le mariage qui fait tant jaser.

Tout ce remue-ménage est l’expression, la preuve de la vitalité
de la démocratie dans ce pays. Les débats faisant évoluer les
mentalités, la société, il faut bien les susciter. C’est sans doute
ce qu’a voulu faire Noël Mammère qui se défend de vouloir aller
volontairement à l’encontre des valeurs sociales mais plutôt
d’aller dans le sens du Pacte civil et social (PACS). Cette loi de
l’ère Jospin, l’on se rappelle, a reconnu un certain nombre de
droits aux homosexuels.

Sans avoir officiellement légalisé le
mariage des homosexuels comme par exemple les Pays-Bas,
la France, avec cette loi, ne l’a pas non plus expressément
interdit. Et comme ce qui n’est pas interdit est autorisé, il y en a
qui ont donc franchi sans scrupule le pas.

Pour se prévaloir de ce principe de droit, il faut avant tout
connaître ses... droits. C’est de l’injure que de soutenir le
contraire à l’endroit des citoyens d’un pays comme la France, la
patrie des droits de l’Homme et l’exemple de démocratie
achevée. Ce qui s’est passé avec le récent mariage homosexuel
est une leçon de tolérance. Ceci a été démontré avec l’expulsion
de l’imam de Vénicieux.

Aucune manifestation d’opposition ou
d’exigence de retour du religieux n’a été constatée. C’est la
justice qui a fini par annuler l’ordre d’expulsion. La célébration,
malgré tout, du mariage est aussi une leçon de démocratie et
d’acceptation des différences d’opinions avec les débats en
toute sérénité. Aurait-on assisté à pareille situation sous les
tropiques par exemple ? Sans doute pas. L’intolérance,
l’intégrisme religieux auraient pris le dessus sur toute
considération démocratique. Les tourtereaux, le maire et ceux
qui soutiennent une telle union seraient mis dans le même sac.

Ils auraient été l’objet de toutes sortes de propos et d’actes aux
antipodes de leur dignité, de la liberté d’expression et d’opinion.
Imagine-t-on un seul instant ce mariage au Nigeria ? Au pays
d’Obasanjo où les pires exactions sont commises pour des faits
moins graves ?

On est mémoratif des violences qui ont entraîné
le transfert de l’élection miss monde. Dans ce pays, comme
dans d’autres sur le continent africain, les autorités politiques
auraient tout fait pour que ce genre de mariage ne soit pas
célébré. Le ministère de tutelle aurait commencé par mettre la
pression sur le subordonné "indiscipliné", le vouer aux
gémonies au besoin. Certains religieux n’auraient pas manqué
d’entrer dans la danse et user de toutes sortes d’intimidations
contre l’officier de l’Etat civil et même contre le couple.

Si malgré
tout, le maire passait outre, il se heurterait à un dispositif
d’agents des forces de l’ordre qui lui empêcherait d’accéder à
son lieu de service pour la cérémonie. En somme, ce serait un
règlement de compte dans lequel les principes démocratiques,
de liberté pourtant reconnus par les lois fondamentales,
seraient royalement ignorés. Pourtant, ce sont ces genres
d’occasion qui permettent d’affirmer son attachement à la
démocratie, qui nourrit et fait vivre ce système politique qui,
malheureusement, se résume sous les tropiques à
l’organisation d’élections. La démocratie va bien au-delà.

Mais
les citoyens comprennent-ils cela ? Espérons que cette leçon
de tolérance et de démocratie venue de France servira à
quelque chose.

Le Pays

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