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Conakry : Les contrastes africains en grandeur nature

Publié le vendredi 15 février 2008 à 09h45min

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Un séjour à Conakry en Guinée, du 05 au 08 février 2008, nous a permis de découvrir plusieurs facettes du pays de Sékou Touré, ce célèbre homme d’Etat qui a osé dire "non" à la France.

Dimanche 3 février 2008, 13 heures, direction aéroport international de Ouagadougou. Le cœur n’était pas à l’ouvrage.
Nous n’étions pas sûr de pouvoir effectuer le voyage à Conakry. Une grève déclenchée la veille (le samedi 2 février) par les travailleurs de Air Burkina avait cloué les avions au sol.

Au bout du fil, une voix pas très convaincante nous avait dit de "passer voir" si la compagnie allait reprendre normalement ses activités le 3 février. Ainsi, "nous partions pour voir", sans trop de conviction.
Pour éviter le sort de ces pèlerins obligés de camper à l’aéroport pour ne pas retourner chez eux, nous n’avons pas fait du tapage, autour de notre voyage. Finalement le vol aura lieu. A 17 h 50, atterrissage à l’aéroport Léopold Sedar Senghor à Dakar. Aux environs de 20h 30, nous voilà à l’aéroport de Conakry. Le commandant de bord annonce une température extérieure de 33 degrés.

Conakry, ville morte

Après les formalités de police à l’aéroport, nous voilà traînant notre valise vers le car. Premier contact avec Conakry. Dans le parking de l’aéroport, s’échappaient des véhicules dont la plupart avait les portières ouvertes, des commentaires sur le match Côte d’Ivoire/Guinée qui se jouait au même moment au Ghana à la faveur de la CAN 2008. Le visage quelque peu défait des supporters guinéens indiquait que leur équipe était en difficulté. Nous aurons la confirmation dans le car qui nous conduisait à l’hôtel : RFI annonçait un but à zéro pour les Eléphants de Côte d’Ivoire. Puis un 2e but signé Didier Drogba.
Trois à zéro au moment où nous arrivions à l’hôtel (Novatel). Le Silly national de Guinée prenait de l’eau de toutes parts.
Devant notre poste téléviseur dans notre chambre d’hôtel, nous verrons les deux derniers buts de la Côte d’Ivoire.

Cinq buts pour la Côte d’Ivoire. L’éléphant ivoirien a pris le dessus sur l’éléphant guinéen. "Il y a éléphant dans éléphant" soutiendra un confrère ivoirien. Les centaines de supporters massés devant les postes de télé, tout au long de la route qui menait à l’hôtel devaient se sentir mal. Mais enfin ! C’est cela la compétition. Le lendemain, nous découvrirons une ville parée aux couleurs nationales, CAN oblige : des drapeaux géants à certains endroits de la ville et devant les édifices publics, de petits drapeaux sur les véhicules. Pour l’occasion, un monument représentant un gros éléphant, balle au pied, a été construit en plein Conakry en l’honneur du Silly national. Même le monument représentant Samory Touré a été revêtu des couleurs guinéennes.
La lourde chute du Silly national est venue interrompre brutalement le plaisir des Guinéens. Fini le rêve. Un réveil douloureux. Place à la dure réalité quotidienne.

L’eau, une denrée rare

Qualifié de "château d’eau" de l’Afrique de l’Ouest, Conakry la capitale de la Guinée n’a pas suffisamment d’eau pour ses populations. Une fois la nuit tombée, des enfants et des femmes envahissent certains quartiers résidentiels ou les bâtiments publics, des bidons jaunes en main en quête du précieux liquide. Et quand on trouve l’eau, c’est l’électricité qui fait défaut. Les coupures intempestives de courant y sont légion. Il est donc mieux de s’assurer que tel hôtel dispose d’un groupe électrogène avant d’y prendre une chambre. Le manque d’électricité expliquerait-il le fait que les feux tricolores ne marchent pas ? Est-ce pour cela que certainse rues du centre ville sont plongées dans le noir une fois la nuit tombée ?

Toujours est-il que Conakry, la journée, comme la plupart des capitales africaines est une ville à deux vitesses. Les gratte-ciel côtoient les bidonvilles. L’insalubrité très poussée de certains endroits et les odeurs pestilentielles qui se dégagent des caniveaux contrastent avec la propreté de certains lieux. Bravo à la police guinéenne qui abat quotidiennement de gros efforts pour réglementer la circulation ! En cinq jours passés à Conakry, nous n’avons pas vu un seul accident de la circulation. Beaucoup de rues sont à sens unique. Cela permet aux fous du volant de pouvoir s’exprimer librement sans accrocs.

Un autre fait marquant est la richesse et la diversité du parc automobile guinéen. Les 4x4 rutilantes (Armada, Hummer, Patrol, Bmw...) circulent dans les mêmes rues que d’autres véhicules (à majorité des taxis), bons pour la casse. Si vous ne voulez pas être coincé dans un taxi, (les taxis prennent deux personnes à l’avant en plus du chauffeur et 5 personnes à l’arrière), dites que c’est pour un "déplacement". Le taximan ne pendra personne d’autre en plus de vous. Mais, il vous faut pour cela sortir les "feuilles". Les feuilles, ce n’est pas ce qui manque en Guinée.

Dans chaque coin de rue, des individus avec de gros sacs en bandoulière font du change. Le marché noir ! 5 000 F CFA vous donne droit à 47 000 F guinéens dans le marché noir. (Le taux fluctue selon les jours). Mais, vous ne pouvez pas vous payer grand-chose avec autant d’argent. L’inflation y est très forte. Cinq millions de francs guinéens pour un téléphone portable ! En Guinée, on parle de millions avec beaucoup d’aisance. Ce n’est pas comme dans la zone CFA où n’est pas millionnaire qui le veut. Les billets de banque sont très souvent froissés, sales. On n’y prend pas grand soin. A Conakry où le litre d’essence coûte 5 400 F guinéens, les stations-services Total sont légion. Ce constat nous a inspiré la réflexion suivante : une pénurie de carburant chez Total ne peut qu’avoir de lourdes répercussions : toute la ville sera paralysée.

Pas comme à Ouagadougou

S’il y a une chose qui ne coûte pas cher à Conakry, c’est bien les communications téléphoniques quand ça marche. Areeba, Intercel, Sotelgui sont des opérateurs de téléphonie mobile qui se disputent le marché. Une carte de 10 000 F guinéens (environ 1000 F CFA) vous permet de communiquer pendant plus de 5 minutes avec l’extérieur. Quand il s’agit des appels locaux, les coûts sont encore plus réduits. Le SMS envoyé à l’étranger coûte 500 F guinéens soit 50 F CFA contre 100 F guinéens (environ 10 F CFA) pour le SMS local. Cela donne une idée du bénéfice que les opérateurs de téléphonie mobile engrangent au détriment du consommateur burkinabè…

Le voyage à Conakry a été un véritable parcours du combattant. Arrivé à Dakar à bord d’un avion de Air Burkina, le trajet Dakar-Conakry devait se faire à bord d’un avion de la compagnie Air Sénégal. Nous n’avons pas pu retirer les billets d’avion d’Air Sénégal à leur agence de Ouagadougou après nous y être rendus à deux reprises.
Une bonne dame dans cette agence nous a signifié qu’elle ne pouvait pas nous remettre les billets malgré le fait que les transactions apparaissaient clairement sur l’écran de son ordinateur. Pourquoi ? On ne le saura jamais.

Des explications trop techniques ne nous ont pas permis de comprendre quelque chose. A l’aéroport Léopold Sédar Senghor, après les formalités de police, nous nous sommes rendu dans une agence de Air Sénégal pour y retirer nos billets d’avion. Cela s’est passé le plus naturellement possible si bien que nous nous posons toujours des questions sur le fait que nous n’avons pas eu les billets à l’agence de Ouagadougou. Il fallait faire vite car l’enregistrement pour Conakry a commencé avant même que nous n’arrivions à Dakar. On courait donc le risque de rater l’avion. Nous n’osons pas imaginer les conséquences d’un tel cas de figure étant donné que nous n’avions pas les poches pleines !
Fort heureusement, tout s’est bien passé.

Il y a eu plus de peur que de mal. Sauf que le Sahélien que nous sommes n’a pas pu voir se concrétiser son rêve de faire un tour à la plage. A Conakry, les cailloux remplacent le sable au bord de la mer. Aussi, ces endroits ne sont pas entretenus. Du coup, cela vous enlève l’envie d’y mettre les pieds.

Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA
rabankhi@yahoo.fr

Sidwaya

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