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Premier satellite africain : Le ciel va-t-il unir l’Afrique ?

Publié le mercredi 26 décembre 2007 à 07h26min

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Jusque-là difficile à se réaliser sur terre, l’intégration en Afrique sera-t-elle effective dans le ciel ? En tout cas, le continent vient de s’ouvrir les routes spatiales de l’espérance avec le lancement du premier satellite privé de télécommunications dédié à l’Afrique, RASCOM-QAF1. Ce satellite serait la résultante d’un désir ardent et d’une volonté commune des Etats africains, réunis autour de l’organisation RASCOM-QAF1, d’unir leurs efforts et de coopérer en vue de mettre en place une structure panafricaine de télécommunications par satellite pour l’Afrique.

Pour une fois, on peut donc affirmer que les Africains sont parvenus, jusqu’à présent en tout cas, à s’entendre sur un projet fédérateur d’une aussi grande importance. Important parce que ce projet, qui a mis quatorze bonnes années à « fermenter », devrait produire, en Afrique, une révolution de taille dans le domaine de la communication. En clair, RASCOM-QAF1 devrait fournir des services de télécommunications aux opérateurs de télécoms, mais également aux fournisseurs d’accès Internet et aux opérateurs détenant des licences VSAT.

Les quarante-cinq pays africains associés seront, en principe, reliés entre eux et au reste du monde grâce à ce satellite, que ce soit dans le domaine de la télévision, du téléphone ou de l’Internet. En attendant de voir les choses se concrétiser en termes de retombées bénéfiques pour les fils du continent, il faut déjà se féliciter que le projet ait abouti. La détermination des pays concernés à rompre les chaînes de la dépendance occidentale dans le domaine de la haute technologie, doit aussi être saluée à juste titre. Reste à savoir si, au cours de son évolution, le bébé RASCOM-QAF1 bénéficiera, de la part de son entourage, de toute l’attention nécessaire à son épanouissement. Il y a de quoi être sceptique dans la mesure où les Africains se plaisent souvent dans des conservatismes de mauvais aloi.

S’enfermant dans des habitudes de consommation de produits de marques étrangères, ils ont très souvent manifesté peu d’intérêt, voire de la méfiance, pour les produits portant le label africain. Quand bien même le satellite panafricain et privé a été fabriqué en France, le fait de passer entre les mains des Africains peut, déjà, être source de dénigrement et de dépréciation de l’engin céleste financé, pour une grande partie, par la Libye. Ayant le plus craché au bassinet, la Libye sera-t-elle tentée d’exploiter cette position à des fins politiques et hégémoniques ? Ce n’est pas une probabilité à écarter, quand on connaît la personnalité du Guide libyen qui s’est bien souvent fait passer pour le nombril du monde, ou du moins de l’Afrique, depuis qu’il s’est trouvé des vocations panafricanistes et s’est refait une virginité sur le plan international. Une chose est fortement souhaitée : tout devrait être mis en oeuvre pour éviter au satellite panafricain de connaître le même sort que bien des initiatives sur le continent, symboles de coopération et d’intégration africaines, mais qui ont fini par disparaître.

Avec RASCOM-QAF1, l’Afrique vient de manifester son intention de ne pas rester en marge de la haute technologie. Seulement, aura-t-elle toujours les moyens de ses ambitions ? Sa volonté d’aller de l’avant ne risque-t-elle pas de se heurter à des intentions exogènes plus ou moins inavouées de torpiller cette initiative africaine ? Rien n’est à exclure dans la mesure où la venue de ce bébé, dans ce milieu de la haute sphère technologique, ne plaira pas à tout le monde. Cela nécessitera, à coup sûr, une réadaptation, un réajustement stratégique de la part de grandes compagnies étrangères qui, jusque-là, en situation de monopole, amassaient de l’argent.

Bref, il n’est pas exclu que toutes revoient à la baisse leurs parts de marché annuels, à l’idée que le climat concurrentiel sera, a priori, plus rude. Mais il ne le sera effectivement que si et seulement si Rascom ne baisse jamais la garde en termes de savoir-faire, de compétitivité, d’innovation, d’imagination et de constante adaptation. En tout cas, elle doit se donner une obligation de réussite si elle ne veut pas se voir aussitôt écraser par des concurrents aussi expérimentés que redoutables, qui ne lui feront certainement pas de cadeau.

Cela n’est plus un secret : qui contrôle l’information détient le pouvoir. L’Afrique n’a pas la prétention de régenter le monde, à l’image des gendarmes du monde qui entendent dicter la marche à suivre à la terre entière. Mais avec le satellite panafricain, l’Afrique peut espérer dormir sur sa propre natte plutôt que d’avoir toujours recours à celle des Occidentaux.

Sur un continent où l’on n’a pas toujours le choix de ses priorités, celles-ci étant généralement dictées de l’extérieur, sur un continent où les souverainetés sont fictives, cet ambitieux projet qui vient de produire ses premiers résultats sera sans doute l’otage de pressions diverses de la part de l’Occident et – cela n’est pas exclu- par Africains interposés.

L’un des plus grands mérites du président ivoirien Laurent Gbagbo, c’est justement d’avoir, jusqu’au bout, résisté aux pressions internationales. En refusant de céder aux injonctions de la communauté internationale, en allant même jusqu’à la défier, Laurent Gbagbo a voulu se tracer une voie, même si, à l’époque, on avait trouvé à redire sur sa conception de la résolution de la crise. Laurent Gbagbo a ouvert la voie. Aux Africains d’en faire un chemin d’or quand la situation l’impose.

"Le Pays"

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