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A l’école du PNUD : Un canard boiteux

Publié le lundi 24 décembre 2007 à 08h43min

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Avant de léguer son fauteuil premier ministériel à Tertius Zongo, Paramanga Ernest Yonli n’avait cessé de clamer devant l’auguste Assemblée nationale que le "Pays des hommes intègres" avançait, avançait.

Si elle a pu réjouir une majorité des élus surfant sur le site du Large rassemblement pour un développement solidaire et du Progrès continu pour une société d’espérance de Blaise Compaoré, cette vérité bien burkinabè vient une fois encore d’être mise en doute par le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) à travers son Rapport mondial 2007 du développement humain durable (DHD). Le Burkina Faso y est, en effet, classé 176e/177, le seul pays qu’il a pu devancer n’étant que la convalescente Sierra Leone.

Evidemment, cette sentence ne pouvait que déclencher un séisme dans les environs immédiats du palais de Kossyam, si ce n’est à l’intérieur, mais les faits semblent têtus. Que nous reproche donc le PNUD ? Pour le Programme onusien, l’évolution de l’indice du développement humain (IDH) est postive au Burkina Faso, et son rang pas du tout enviable s’explique par le faible niveau initial de son développement humain ; essentiellement en ce qui concerne la composante "éducation" (scolarisation-alphabétisation).

Car, si des progrès importants ont pu être réalisés dans la scolarisation primaire (hausse d’environ 20 points de pourcentage en dix ans), dans le secondaire, par contre, le niveau de scolarisation reste encore faible (environ 15,6% en 2005) et n’augmente significativement que depuis quelques années (année académique 2003/2004).

Beaucoup d’efforts doivent donc être faits concomitamment avec la poursuite de l’amélioration de la collecte de l’information statistique nationale par les agences internationales ; l’amélioration de la comparabilité des données à travers des programmes d’harmonisation méthodologique au niveau régional. Si le Rapport mondial sur l’indice du développement humain a valeur pédagogique, l’élève burkinabè semble en contester la pertinence.

Son gouvernement, par la voix du ministre Jean-Baptiste Marie Pascal Compaoré de l’Economie et des Finances, a, en effet, pris acte de son classement mais a :
estimé que l’Indice du développement humain devrait être complété par des indices intermédiaires permettant de mieux rendre compte de la chaîne de causalité allant des moyens mis en œuvre aux résultats intermédiaires, puis aux résultats finaux, et enfin à l’impact ;
constaté que dans la définition actuelle de l’indice du développement humain, la composante revenu ne repose que sur le Produit intérieur brut (PIB) moyen par tête et ne tient pas compte de l’inégalité de sa répartition ;
estime que la composante "capital humain de l’IDH pourrait être redéfinie pour être mise en cohérence avec les objectifs du millénaire pour le développement (OMD) ; retenir le taux d’alphabétisation des 15-24 ans plutôt que le taux d’alphabétisation des plus de 15 ans ; se limiter à la composante "éducation primaire" plutôt qu’au taux combiné primaire, secondaire et supérieur.

C’est de bonne guerre, mais, si l’on part du principe que c’est le même mode de calcul et de définition qui s’applique aux autres pays, il n’y a pas lieu de se lamenter, le Burkina Faso ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Les lambris dorés du palais de Kossyam ne devraient pas cacher la misère congénitale des trames d’accueil, qui ont tout avec elles, sauf l’essentiel.

Certes, la batterie de mesures thérapeutiques, telles le renforcement de la collaboration avec les agences spécialisées du système des Nations unies et le PNUD au niveau local ; la réalisation d’une enquête spéciale sur l’alphabétisation pour mieux en évaluer le taux ; le lancement d’une étude sur la pertinence de l’IDH ; la mise en place d’une équipe nationale sous la conduite de l’Institut national de la statistique et de la démographie (INSD) pour la coordination du processus de collecte, de traitement et de transmission de l’information aux Institutions internationales ; cette batterie de mesures thérapeutiques, disions-nous, peuvent donner à espérer, mais tant que nous nous refuserons à ouvrir les yeux, nous ne pourrons éviter la descente du Burkina dans les profondeurs du classement du développement humain.

C’est gravé dans le marbre, le bien-être des humains ne se résume pas à l’économie et aux revenus. La notion de développement humain, depuis la déclaration universelle des droits de l’homme, s’appuie sur la sécurité sociale ; le droit au travail ; le droit au repos ; le droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille (alimentation, habillement, logement, soins médicaux) ; le droit à l’éducation et à celui de prendre part, librement, à la vie culturelle. Voyez-vous, bonnes gens, ce n’est que cela qu’on demande à nos gouvernants, plutôt que la promotion du développement solitaire, le reflet sempiternel des cités de Ouaga 2000 ou de Somgandé, et nous en oublions.

Que c’est bien beau de murmurer au fond de la classe pour justifier sa présence à l’école, mais assimiler les leçons élémentaires pour survivre le serait davantage. Après avoir fait nos preuves dans la sous-région et sur la scène internationale, ayons les pieds sur terre.

L’Observateur Paalga

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