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Issaka Kargougou, directeur général de la Maison de l’entreprise : "Le Burkina Faso progresse en toute objectivité dans les affaires"

Publié le vendredi 23 novembre 2007 à 10h08min

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Issaka Kargougou

La Maison de l’entreprise au Burkina Faso (MEBF) organise du 20 au 24 novembre 2007 à Ouagadougou, les deuxièmes Journées de l’entreprenariat burkinabè (JEB) sous le thème : "l’entreprise, un élément du patrimoine commun à préserver". Son directeur général, Issaka Kargougou, apprécie ici, le paysage des affaires burkinabè.

Animé de la ferme conviction que "le Burkina Faso progresse en toute objectivité dans les affaires", il plaide pour un appui conséquent de l’Etat au secteur privé, le renforcement des structures d’accompagnement à la création d’entreprises et la culture d’un civisme fiscal. Il dresse également le bilan de cinq années d’existence (2002-2007) de la Maison de l’entreprise du Burkina Faso.

Sidwaya (S.) : Qu’est-ce qui moyive l’organisation des Journées de l’entreprenariat burkinabè (JEB).

été alloué par les Linstitutions de financement, les banques et établissements financiers aux projets présentés.e deuxième motif de satisfaction déroule du fait que tous les participants ont insisté sur la reconduction de l’activité cette année et son institutionnalisation. L’organisation de la deuxième édition témoigne de l’intérêt que les institutions d’appui, les partenaires techniques et financiers ainsi que le secteur privé accordent à la promotiion de l’entreprenariat.
Les JEB contribuent à la promotion de l’esprit d’entreprise. Il faut accompagner l’option politique du gouvernement qui veut faire du secteur privé le moteur de la croissance économique. Faire connaître les efforts du secteur privé en matière de création de richesses, les actions et les mesures proposées par l’Etat au secteur privé pour faciliter la création d’entreprises. C’est aussi l’occasion de fêter l’importance du secteur privé dans la vie économique nationale.

S. : Que sous-entend le thème de ces deuxièmes JEB ?

I.K. : Le thème de cette deuxième édition "l’entreprise, un élément du patrimoine commun à préserver", est une interpellation de la conscience collective nationale. L’entreprise constitue un bien commun, un patrimoine que tout le monde doit regarder d’un bon œil. L’entreprise ne doit pas être perçue comme une affaire privée dans la mesure où elle génère des emplois et des richesses. C’est donc un bien qu’il faut défendre au même titre que le patrimoine culturel. Nous voulons changer le regard de l’opinion publique sur l’entrepreneur et l’entreprise. Il faut donc une synergie d’actions et des encouragements à créer plus d’emplois et plus de richesses. C’est le lieu aussi de susciter et d’encourager ceux qui pensent être entrepreneurs. Pour les activités de ces JEB, il y a une série d’ateliers et de conférences. Un de ces ateliers, par exemple, porte sur le cadre logique d’un projet bancable pour permettre aux porteurs de discuter avec les banques, de connaître leurs conditions et de savoir le cadre de discussion avec un partenaire financier.

D’autres rencontres sur l’AGOA et les Accords de partenariat économique (APE) permettront au secteur privé de mieux se préparer à affronter ce challenge nouveau auquel les hommes d’affaires et l’économie burkinabè en général doivent faire face. Une rencontre aura lieu sur la bonne gouvernance dans les associations professionnelles du secteur privé. Beaucoup d’associations voient le jour, mais dans la pratique, elles sont confrontés à des difficultés de fonctionnement. Bien qu’il y ait au moins 120 associations membres à la Maison de l’entreprise. Au-delà des conférences et ateliers, une grande activité concerne la bourse de projet. Elle consiste à réunir sur un même espace, les porteurs de projets, les promoteurs d’entreprise, les hommes d’affaires et les institutions financières et d’appui technique pour discuter et envisager l’avenir ensemble.

La dernière activité concerne la nuit du mérite ou d’excellence. Elle salue le mérite du secteur privé innovant, entreprenant et dynamique. Des prix sont décernés aux promoteurs et opérateurs ayant excellé dans un secteur économique donné. Il y a le prix du meilleur exportateur, du meilleur chargeur, du meilleur consultant, du meilleur entrepreneur en bâtiment avec l’Agence Faso Bara et bien d’autres récompenses. Ce sont des prixsymboliques pour saluer l’effort de productivité, de créativité et d’innovation des acteurs du secteur privé national.

S. : Dans quel secteur l’entreprenariat burkinabè exelle-t-elle ?

I.K. : Le secteur privé évolue au rythme de l’activité économique. Des progrès existent dans la création d’entreprises. Ici, le Centre de formalité des entreprises (CEFORE) permet de voir le nombre des entreprises qui se créent. Il y a une réelle progression de 5 à 10% par rapport à l’année dernière.
Les efforts se concentrent sur le secteur du commerce où on dénombre près de 52% de créations de nouvelles entreprises. Le deuxième secteur en essor est celui des services qui connaît 20 à 30% des entreprises nouvelles. Cela répond à la structuration de toute économie. Le secteur de l’industrie occupe une proportion de 10 à 15%. Il est suivi de l’artisanat.

S. : Les entrepreneurs burkinabè ont-ils aujourd’hui les moyens de répondre aux exigences actuels du commerce international ?

I.K. : Le secteur privé a conscience du changement de l’environnement des affaires. L’heure n’est plus aux mesures de protection en faveur de l’industrie nationale comme "Consommons burkinabè". Cette nécessité doit être intégrée dans les paramètres de décision et dans les stratégies des entreprises.

S. : Quels sont les obstacles qui subsistent à la création des entreprises qui freinent le "grand" bond du Burkina Faso au classement "Doing business" ?

I.K. : Le Burkina Faso progresse en toute objectivité dans les affaires. Les conditions de création des entreprises sont améliorées en termes de délais (7 jours en moyenne) avec des coûts raisonnables (entre 45 000 et 60 000 F), une offre structurée des services accompagnant le créateur d’entreprise : un séminaire de formation gratuit sur le management de la nouvelle entreprise avec l’appui des experts comptables, des experts en fiscalité, etc., a été initié au profit des promoteurs. Les contraintes sont cependant assez nombreuses. La principale demeure l’accès aux sources de financements. Environ 78% des opérateurs économiques citent l’accès aux financements comme une contrainte majeure.

Les contraintes sont cependant assez nombreuses. La principale demeure l’accès aux sources de financements.
Environ 78% des opérateurs économiques citent l’accès aux financements comme une contrainte majeure. Le Premier ministre vient d’annoncer de nouvelles mesures pour la réduction de la pression fiscale. L’enclavement du pays engendre également des coûts de transport qui se répercutent négativement sur le prix de revient de la marchandise aux consommateurs. Tous ces facteurs représentent des contraintes à la création des entreprises.

S. : Concernant les facilités fiscales, la moralité des créateurs d’entreprises est souvent remise en cause. Des promoteurs bénéficient de cinq années sabbatiques à l’ouverture de leur entreprise et à l’échéance de la date, ils ferment boutique pour échapper à l’impôt en allant ouvrir d’autres entreprises. N’est-ce pas un jeu du chat et de la souris qui porte préjudice aux entrepreneurs sincères ?

I.K. : Bien que cette remarque soit pertinente, il faut trouver les moyens d’encourager l’émergence d’entreprises responsables et citoyennes contribuant à l’effort commun de création de richesses et du bien-être collectif. La MEBF œuvre dans ce sens. Tout est une question d’éducation. L’éthique dans les affaires repose sur des valeurs morales. Le socle de cette morale puise entre autres son essence dans l’éducation de base, la foi religieuse ou pas, la volonté de reconnaître des vertus cardinales comme l’honnêteté, la volonté d’exercer dans la transparence ou non.
Si l’Etat consent des efforts pour favoriser la création d’entreprises, il appartient au secteur de jouer son rôle en faisant preuve de civisme fiscal, en mobilisant des ressources pour le développement économique. C’est cela aussi la contrepartie.

S. : Les activités de sensibilisation, de promotion et d’information sur l’emploi et l’entreprenariat ne sont-elles pas dispersées au Burkina Faso ?

I.K. : Bien au contraire, toutes les initiatives en cours sont à saluer. Un travail de fond doit être accompli pour soutenir la croissance et le développement des affaires au Burkina Faso. Il serait souhaitable que pour chaque secteur d’activités, il y ait des actions vigoureuses de promotion des initiatives privées. Les moyens sont certes limités. Mais il faut encourager à tout prix tous les acteurs qui s’attellent à l’éclosion d’un secteur privé plus dynamique dans notre pays.

S. : Qu’est-ce qui explique la prédominance du secteur informel, au Burkina Faso, malgré les facilités pour favoriser les entreprises formelles ?

I.K. : Dans la plupart des pays du monde, il y a le marché noir. Un secteur informel existe même dans les pays développés. L’instinct de survie amène à exercer une petite activité. Les acteurs évoluant dans le secteur informel vont rester dans cette dynamique s’ils n’ont aucun encadrement. Ces opérateurs connaissent aussi les textes et refusent de se conformer à la réglemention. Des actions sont entreprises pour changer les mentalités de sorte à ce que chaque acteur du secteur privé connaisse ses droits et ses obligations en matière de contribution à l’effort collectif de développement économique.

S. : En tant que premier responsable d’une structure qui fédère les actions de plusieurs entreprises, quels conseils donneriez-vous à ceux qui veulent se jeter dans l’entreprenariat ?

I.K. : La première suggestion est de croire d’abord à son projet. Personne d’autre ne viendra donner toute sa force et sa conviction à un entrepreneur, si lui-même ne croit pas à son initiative. Lorsqu’on entreprend, il faut mettre à l’idée que l’on emprunte un parcours du combattant, une course de fond. Donc, il faut être armer de patience, avoir une détermination à soulever des montages. Sans ces volontés, c’est le risque de se décourager et de vite abandonner. La seconde suggestion est une question de méthodologie. On n’est pas entrepreneur par hasard. On ne devient pas non plus entrepreneur sans être préparé. Voilà pourquoi des institutions sont créées pour appuyer ceux qui embrassent à la vie d’entrepreneur. Les tissus opérateurs ont également besoin d’accompagnement pour avancer dans les projets. La volonté personnelle et le recours des institutions d’accompagnement s’avèrent donc nécessaires.

S. : Avez-vous l’occasion de rencontrer "ces gros bonnets" qui font fi de vos mécanismes actuels et qui malgré tout, proprent ?

I.K. : Il est raisonnable de s’appesantir sur le parcours de cette catégorie des opérateurs qu’on dit à tort réfractaires aux méthodes modernes. Une discussion avec eux, aide à percevoir leurs débuts comme tout le monde : les bouchers, les vendeurs de légumes ou de cartes téléphoniques. Cela est édifiant. Certains ont commencé par vendre des tiges de mil et aujourd’hui, ils sont devenus des milliardaires. Cette race d’opérateurs a cru en sa capacité de transformer, de prospecter et de prospérer. Il faut d’abord considérer et leur reconnaître ce talent. Il y a un élément de distinction entre les hommes. Des prédispositions diffèrent des individus dans la conduite de toute activité. Il y en a qui ont le contact facile. Même s’ils sont a priori analphabètes, ils ont le flair de pouvoir surmonter n’importe quelle situation et faire des affaires. L’autre élément de distinction réside dans le critère de gestion. Ceux qui entreprennent à travers un effort progressif pensent qu’il faut que le coût de gestion s’adapte à l’entreprise et non l’inverse. Ainsi un vendeur de friperie ne va pas louer un local qu’il va payer cher, commander un service traiteur à midi ou faire la sieste. C’est cette réalité qui guide les opérateurs a priori analphabètes. Par contre, les intellectuels estiment qu’il faut un schéma moderne de gestion comme un système de comptabilité.

S. : La Maison de l’entreprises a-t-elle atteint ses objectifs en cinq ans d’exercice (2002-2007) ? A-t-elle accompli ses missions ?

I.K. : Le bilan de la Maison de l’entreprise a été dressé à la dernière assemblée générale. Il est positif. Dans la mesure où le secteur privé reconnaît que la Maison de l’entreprise a apporté une touche particulière à l’amélioration du climat des affaires. En cinq ans, elle a mobilisé cinq milliards de FCFA pour financer des projets et soutenir la formation des agents du secteur privé. La Maison de l’entreprise a contribué à la création de Centre de formalité des entreprises (CEFORE) qui facilite la création des affaires. Il fallait un mois pour créer une entreprise en parcourant bien sûr, plusieurs administrations. Aujourd’hui, le créateur d’entreprise a un seul interlocuteur, un seul délai, un seul formulaire et des coûts encore réduits. Le gouvernement qui a contribué fortement à la création de la Maison de l’entreprise apprécie la valeur de son existence et de son apport au développement du secteur privé. Les partenaires au développement, pourvoyeurs des fonds de soutien apprécient également positivement l’apport de la Maison de l’entreprise. Mais cette note de satisfaction n’est pas un aboutissement. Car on ne peut jamais affirmer avoir atteint le développement du secteur privé. De nouvelles entreprises qui se créent et ont besoin d’accompagnement.

S. : Quelles sont vos perspectives ?

I.K. : Nous travaillons à la consolidation des acquis, à renforcer le porte-feuille d’action, décentraliser les activités pour asseoir une maison sereine, qui délivre toujours des services à forte valeur ajoutée. C’est le défi que la Maison de l’entreprise s’est donné de relever. Un nouveau plan stratégique définissant la nouvelle configuration de la Maison de l’entreprise du Burkina Faso va être proposé l’année prochaine à nos instances dans l’objectif de toujours servir le secteur privé burkinabè.

Interview réalisée par Jolivet Emmaüs jolivet_et@yahoo.fr
S. Nadoun COULIBALY

Sidwaya

Issaka Kargougou (I.K.) : Ce coup d’essai a été un coup de maître. Dans la mesure où les projets présentés à la Bourse ont été agréés. Environ un milliard FCFA de crédit a

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