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Eductour d’Air Sénégal : Virée touristique au pas de charge

Publié le vendredi 9 novembre 2007 à 14h25min

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Lac Rose, Ile de Gorée, Saint-Louis. Un séjour au Sénégal nous a permis de visiter ces villes et villages touristiques connus à travers le monde et qui attirent des milliers de visiteurs. C’était du 13 au 16 octobre 2007 à la faveur d’un programme Eductour d’Air Sénégal international.

Samedi 13 octobre 2007. Alors que je m’apprêtais à aller en ville pour effectuer des courses dans l’après-midi, je reçois un coup de fil d’un confrère et aîné, Philippe Tougouma, des Editions Sidwaya m’invitant à partir à l’aéroport international de Ouagadougou où je devrais prendre un vol pour Dakar sur invitation d’Air-Sénégal dans le cadre d’un voyage dénommé Eductour organisé par cette compagnie.

Quelques heures avant, nous avions pris la décision de ne pas faire le déplacement de la capitale sénégalaise par solidarité avec les autres confrères de la presse qui voulaient, eux aussi, décliner l’offre parce qu’ils ne maîtrisaient pas tous les contours du voyage.

J’ai donc dû faire rapidement mes bagages pour être à l’aéroport à 17h 30, heure de la convocation pour l’enregistrement. Les formalités sont vite remplies et me voici à 20h dans le boeing 737 d’Air-Sénégal International (ASI) pour 45 mn d’attente avant le décollage.

Je suis assis entre deux jeunes filles. J’ai l’impression que je connais celle de ma gauche. Courageusement, je brise le silence avec elle.

Je ne m’étais pas trompé. Mieux, c’était ma voisine de quartier. Les deux heures de vol ne seront donc pas ennuyants car j’avais à mes côtés une connaissance avec qui échanger. Pour entrer en communication avec ma voisine de droite, je lui demande l’heure qu’il faisait quand bien même le boeing est muni de petits écrans au-dessus de chaque siège qui donnent l’heure, la température extérieure, la distance restante à parcourir, etc.

Après l’escale de Bamako, mes paupières commençaient à être lourdes. J’avais sommeil surtout que la veille, c’était la fête de Ramadan et je suis rentré chez moi pratiquement au petit matin alors que j’avais un reportage à 9 heures dans un village non loin de Ouagadougou.

J’avais beau résisté, je finis par tomber dans les bras de Morphée. Je me suis réveillé à 23 h 25 lorsqu’une voix féminine semblable à celle d’un rossignol annonça aux passagers de rejoindre leur place et d’attacher leur ceinture de sécurité. Au même moment, les hôtesses commençaient à distribuer des fiches pour les formalités policières de l’aéroport Léopold Sédar Senghor.

Dakar, une ville en chantier

Voici Dakar. C’était la première fois pour moi d’atterrir dans la capitale sénégalaise. A bord d’un minibus, les invités d’ASI que nous sommes, sont convoyés à l’hôtel "La Teranga", situé dans le quartier administratif Grand Plateau.

Le premier constat que je fais, c’est que de nombreuses artères de la ville ne sont pas éclairées. Curieux, je cherche à comprendre. Matar Diop, le responsable aux Relations publiques et à la communication d’Air-Sénégal m’explique que la situation est due aux travaux des préparatifs de la conférence islamique que Dakar abritera en mars 2008.

Je suis logé au 5e étage a côté des autres confrères que sont Aïssata Bangré de Sidwaya et Kerson de la Télévision SMTV. De ma fenêtre, j’essaye de voir à quoi peut ressembler le centre-ville de la capitale sénégalaise. Je ne verrai pas grand-chose. Il faisait tard et un silence enveloppait la nuit.

Le lendemain dimanche 14 octobre, après un petit déjeuner copieux au restaurant de l’hôtel, c’est le départ pour une virée touristique. Notre car, comme il est d’usage dans ce type de véhicules, est équipé d’un microphone. Matar Diop s’en saisit pour distribuer la parole afin que chacun se présente avant d’expliquer l’objet du voyage que sa compagnie a organisé à l’intention de responsables d’agences de voyage et de journalistes. Je l’écoutais parler mais mon attention était plutôt captivée par la ville avec ses immeubles, ses échangeurs et ses chantiers que l’on voit pratiquement à chaque kilomètre.

J’ai néanmoins un pincement au cœur en constatant les saletés qui inondent une si belle cité. J’ai pensé à ces centaines d’étudiants formés dans la gestion des déchets à l’université de Ouagadougou et qui peuvent apporter leur expertise au maire de Dakar pour rendre sa ville plus propre.

Mais encore faut-il savoir si le problème de l’insalubrité de la capitale sénégalaise est situé à ce niveau.

Nous voici au village du Lac Rose situé à 30 km au Nord-Est de Dakar. Le lac Retba, plus connu sous le nom de Lac Rose doit sa rénommée à sa teinte qui vire du rose au mauve en fonction de l’intensité des rayons solaires au contact de micro-organismes qui s’y trouvent. Il est également connu pour le rallye Paris-Dakar dont il constitue l’ultime étape.

Nous avons emprunté le trajet de cette fin d’étape du rallye Paris-Dakar en embarquant dans deux véhicules Land Rover, aux cadres rouillés et aux couleurs jaunes délavées mais dont le moteur est d’une solidité remarquable et conduits par deux chauffeurs rodés. Une route de dunes de sables avec des collines à gravir.

C’est parti pour une épreuve de nerf et de vertige. Il fallait bien s’accrocher aux barres de fer des véhicules pour ne pas être projetés au dehors. C’était une partie de plaisir pour nous les hommes quand bien même il y avait la peur au ventre par moment. Les femmes poussaient des cris et fort intérieurement certaines priaient le ciel pour que ce calvaire prenne fin rapidement. Il y a eu plus de peur que de mal.

C’était de toute façon, un passage obligé pour atteindre la mer de ce côté où l’on rencontre de nombreux touristes dont certains sont juchés sur les motos Quad loués à 30 000 FCFA au campement pour une balade à travers les dunes de sable. Le Lac Rose, ce n’est pas seulement ce côté touristique qui fait sa renommée.

C’est aussi l’intense activité d’extraction du sel. Jour et nuit, des hommes, enfoncés jusqu’à la taille, arrachent les croûtes de sel déposés sur le fond et remplissent des pirogues que les femmes portent à la berge. Le sel y est d’ailleurs amoncelé formant de petits monticules blancs comme des montagnes enneigées. Près de 600 personnes vivent de cette activité qui se mène de façon artisanale.

Ile de Gorée, triste souvenir de l’esclavage

L’île de Gorée fut notre prochaine destination. On y accède à bord d’un petit bateau baptisé "Beer" (nom de l’île en wolof), qui transporte 350 passagers. L’aller-retour coûte 2500 FCFA. Chaque 30 minutes il y a un départ et ce, jusqu’à 22 heures, ce qui constitue une manne financière vu le nombre de visiteurs journaliers.

Dès notre arrivée, nous sommes reçus par Pierre Senghor, connu sous le nom de Napo, un géant monsieur taillé comme un meuble sévère, au crâne rasé, qui présente l’allure d’un basketteur. Plus tard, nous apprendrons que sa fille Jeanne joue dans l’équipe nationale de basket du Sénégal. "C’est elle, nous confie-t-il, pas peu fier, qui portait le dossard 14 lors de la récente CAN de basket remportée par le Mali face au Sénégal".

Napo est notre guide du jour. Il connaît l’histoire de l’Ile par cœur, une triste histoire marquée par la traite négrière.

En l’absence du conservateur en chef de la Maison des esclaves, c’est son adjoint Alioune Kabo qui nous fera visiter les minuscules salles où étaient parqués des êtres humains comme du bétail dans l’attente d’être exportés à des milliers de kilomètres dans des bateaux à voile vers l’Amérique. L’île de Gorée, île martyre, est l’une des pages les plus douloureuses de l’histoire de l’esclavage en Afrique.

Le Pape Jean-Paul II a même, de cette île en février 1992, demandé pardon à l’Afrique au nom des Nations chrétiennes pour les traitements inhumains et dégradants subis par les Noirs. C’est dire...

Le patrimoine architectural de Gorée inscrit depuis 1975 sur l’inventaire des monuments historiques, fait partie du patrimoine mondial de l’UNESCO. Cette île a également abrité une célèbre école, celle de l’Afrique occidentale française (AOF) connue sous le nom de William-Ponty et qui a formé des cadres africains dont plusieurs ont contribué à la décolonisation de l’Afrique subsaharienne. Pour toutes ces raisons, Gorée mérite une attention particulière.

Mais, j’ai eu l’impression lors de mon bref passage, que cette ville touristique n’est pas bien entretenue. De nombreux bâtiments historiques sont en état de ruines.

Les "vieux pères" et les fées de la nuit

De retour à l’hôtel aux environs de 22h, j’étais exténué. Je me prélasse sur mon lit pour dormir. Soudain, mon téléphone de chambre résonne. Au bout de la ligne, mon confrère Kerson de SMTV. Il me demande de l’accompagner rendre visite à un de ses amis ivoiriens, journaliste dans une radio FM qui serait située non loin de notre hôtel. Un jeune sénégalais du nom de Camara auprès duquel nous voulions nous informer nous propose ses services.

La station radio était effectivement à côté mais le pote de Kerson n’était pas là. "Il est d’antenne très tôt le matin" nous indique le vigile qui refuse de donner son numéro de portable. Nous n’insistons pas. Camara propose encore de nous amener promener dans le quartier.

La proposition est alléchante surtout que notre programme de séjour ne prévoyait pas une découverte même de N’Dakarou. Notre promenade nous conduit jusqu’à la Médina, l’un des quartiers populaires et populeux de la cité. Mais il se faisait tard et il ne fallait pas prendre le risque de suivre un inconnu jusqu’à une certaine heure quand bien même il donnait l’apparence d’un homme disponible et serviable. Sait-on jamais ?...

Camara nous suggère de faire un tour à Africa Star une boîte de nuit pour découvrir l’ambiance de Dakar avant de rentrer nous coucher.

A l’entrée du Night club, deux jeunes baraqués, de véritables armoires à glace, postés à la porte nous fixent du regard puis nous cèdent le passage. A l’intérieur, la musique joue à fond la caisse. Des jeunes filles habillées sexy se trémoussent sur la piste en remuant vigoureusement les fesses et les reins, attirant les regards concupiscents de "vieux pères" tapis dans l’obscurité.

Mon portable sonne. Malgré le brouhaha, je décroche. C’était un ami de Bobo-Dioulasso qui n’avait pas de mes nouvelles depuis des jours. Je lui explique en dioula que je suis dans la capitale sénégalaise. N’ayant pas assez d’unité pour supporter le coût du roaming, je promets de le rappeler. Juste à côté, une gonzesse qui m’écoutait s’approche avec sa camarade et me parle en dioula.

Elle serait Malienne, vit à Dakar depuis des années et fait dans la prostitution. Sans détours, les chasseuses de mâles en rut nous proposent (à Kerson et à moi) "leurs services" à 20 000 FCFA, le loyer mensuel d’un fonctionnaire burkinabè moyen. "Désolé, ça ne nous intéresse pas".

Les fées de la nuit restent quelques instants sans mot dire, puis nous quittent pour d’autres hommes qui venaient d’arriver. Du retour à l’hôtel, malgré la fatigue, je ne trouvais pas le sommeil. A défaut, je me plonge dans la lecture des journaux sénégalais.

L’actualité y était marquée par trois faits majeurs : la célébration en rangs dispersés de la fête du ramadan, (mais ça, ce n’est pas nouveau) l’arrestation d’un journaliste pour offense au chef de l’Etat Abdoulaye Wade et la succession de ce dernier à la tête de l’Etat.

Chacun veut voir la lune de sa maison

Au pays de la Teranga, l’Aïd-El-Fitr appelée "Korité" (en wolof) est célébré dans l’incertitude et la division. Cette situation est imputable aux chefs religieux qui cherchent chacun à défendre sa confrérie, chacun prétendant être plus proche d’Allah que l’autre.

"Nous convergeons tous vers Dieu et son prophète Mohammad. Mais malheureusement, dans notre pays, nous croyons plus aux marabouts, à nos confréries qu’à Dieu" écrit L’Obs., un quotidien dakarois.

Le quotidien l’As pour sa part souligne que le Sénégal est un pays entièrement à part dans le monde musulman. "Deux, voire trois korités est un fait banal sous nos cieux... On se réfère volontiers à la météo pour rompre le jeûne mais, pour ce qui est de l’apparition de la lune, chacun veut la voir de son village, mieux de sa maison ou de celle de son marabout. Et pourtant que d’érudits au Sénégal ! Et cela dans toutes les confréries et associations islamiques. Le consensus n’est-il pas possible entre hommes de science ? D’autant que la seule boussole, c’est le Coran...".

Non seulement les grands imams célèbrent Ramadan selon le jour qui semble leur convenir mais également, ils affichent ouvertement dans leur sermon, le jour de l’Aïd-El-Fitr, leur appartenance politique. C’est le cas de l’imam Tamsir Ndiour de la Grande mosquée de Thiès qui a tressé des lauriers au maire de la ville Idrissa Seck et décoché des flèches contre le président "Abdoulaye Wade qui est un homme d’intérêt". Et d’ajouter que "l’alternance a fait la promotion des anti-valeurs".

Nous ne sommes plus dans une mosquée mais dans la permanence d’un parti politique. Pendant que celui-ci fait les éloges d’Idrissa Seck et tire à boulets rouges sur le président de la République, un autre imam, Pape Souleye Kane de la grande mosquée de Kaolack, lui, fait le contraire : il s’attaque à l’ancien Premier ministre et martèle que si Idi a volé des milliards, il doit les rembourser.

Ainsi, va le Sénégal avec ses nombreux marabouts dont les avis sont souvent recueillis pour former le gouvernement ou nommer un directeur général. Je ne surprends à penser que, insidieusement, ces célébrations en rangs dispersés sont en train d’arriver à peu feutrés chez nous sans qu’on n’y prenne garde.

Pour avoir titré "Les escapades nocturnes du président de la République", Moussa Guèye, le directeur de publication du journal "L’Exclusif" a été inculpé et placé sous mandat de dépôt pour "offense au chef de l’Etat, diffusion de fausses nouvelles, actes et manœuvres de nature à compromettre la sécurité publique, ou à occasionner des troubles publics graves, à enfreindre les lois du pays, à jeter le discrédit sur les institutions". Tout ça pour lui seul !

Les médias dans leur majorité et les organisations de défense des droits de l’Homme et de la liberté de presse se sont mobilisées pour exiger sa libération. Pour eux, ce n’est pas une première car Abdoulaye Wade, depuis son arrivée au pouvoir, n’a cessé de jeter en prison les journalistes en utilisant l’article 80 du Code pénal qui porte sur l’offense au chef de l’Etat, une loi fourre-tout qu’on peut utiliser à souhait pour bâillonner la presse et qui existe pratiquement dans toutes nos démocraties africaines.

Le fils va-t-il succéder à son père ?

Abdoulaye Wade prépare-t-il son fils Karim pour lui succéder à la tête de l’Etat sénégalais ? Le débat fait rage dans la rue comme dans les médias, dans les chaumières comme dans les maquis qui ont pignon sur rue sur l’avenue Ponty ou ailleurs.

Le fait d’avoir placé Karim Wade à la tête de l’Agence nationale pour l’organisation de la conférence islamique (ANOCI) est interprété par certains comme une façon pour le président Wade de lui permettre de nouer des relations très étroites avec les monarchies du Golfe qui pourraient lui être d’un grand soutien le moment venu. Il semble d’ailleurs que les journaux arabes désignent Karim par le titre de "Prince héritier".

Le quotidien l’As rapporte ainsi à sa Une du mardi 16 octobre 2007 que l’Emir du Qatar est prêt à soutenir le fils pour la succession du père. A Me Abdoulaye Wade, il aurait dit ceci : "Ce serait une décision très sage ! Fais-moi signe, je donnerai ma contribution".

Mais le Sénégal, ce n’est pas une monarchie. Même si Macky Sall, l’ancien premier ministre et actuel président de l’Assemblée nationale, connaît, depuis quelques semaines, une certaine disgrâce pour avoir voulu entendre Karim dans le cadre de sa gestion de l’ANOCI. "Touche pas à mon fils !" semble dire le célèbre chauve dakarois.

L’actualité au Sénégal est chargée. La lecture des journaux est passionnante. Mais il me faut forcer le sommeil car, tôt le matin, je serai en route pour Saint-Louis situé à plus de 260 km de Dakar.

J’ai entendu parler de cette ville qui a vu naître Abdoulaye Wade en mai 1926, qui a formé de grands cadres sénégalais dans un lycée prestigieux. Première ville fondée par les Européens en Afrique de l’Ouest, Saint-Louis devint la capitale de la colonie française et de l’Afrique occidentale française (AOF) jusqu’en 1902 puis capitale du Sénégal et de la Mauritanie et resta un comptoir de commerce français important jusqu’en 1957.

Elle est classée au repertoire du patrimoine mondial de l’UNESCO depuis l’an 2000. La pêche est la principale activité des populations de cette ville. En plus de la mer, il y a le Fleuve Sénégal si fait qu’une bonne partie de cette cité est entourée par l’eau. Les pirogues de pêche se comptent par centaines et déversent à tout moment du poisson frais qui est chargé régulièrement dans des camions.

Notre passage était bref. Nous avons traversé le célèbre pont Faidherbe pour aller faire un tour au quartier des pêcheurs avant de rejoindre la mer. Puis, retour à Dakar. Nous n’aurons donc pas le temps de visiter les zones touristiques telles que le parc d’oiseaux du Djoudj, la réserve d’animaux de Gueumbeul ou le désert de Loumpoul.

Le lendemain, dans l’après-midi, c’était le retour à Ouagadougou pour reprendre le train-train quotidien après un voyage au pas de course fort enrichissant. C’est bien connu, les voyages, ça forme la jeunesse...

Adama Ouédraogo

Damiss

L’Observateur

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