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Alphabétisation au Burkina : S’adapter aux enjeux de la mondialisation

Publié le vendredi 21 septembre 2007 à 08h01min

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L’alphabétisation est le premier défi que doivent relever les pays africains sur la route de leur développement. La récente conférence tenue sur le thème de l’alphabétisation à Bamako sous l’égide de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science, la culture et la communication (UNESCO) démontre, si besoin est, l’importance du défi.

Sur le plan national, le Burkina vient de lancer une campagne nationale d’alphabétisation. Va-t-on assister à une répétition de l’opération "Alpha commando" du nom de celle qui avait été entreprise par simple volontarisme du temps de la Révolution ? La campagne d’alphabétisation qui vient d’être inaugurée à grand renfort de publicité doit, cette fois-ci, aller jusqu’au bout. Sous n’importe quel prétexte, il ne faut pas s’arrêter en chemin. Comme on le voit, aujourd’hui les opérations "Bantaaré" ne rappellent plus rien dans l’esprit des personnes qui les ont suivies.

La campagne d’information/communication qui a été lancée par les plus hautes autorités du Burkina Faso va mobiliser de très nombreux partenaires au développement. Le secteur privé, les associations de la société civile, tout le monde est concerné par la présente campagne qui ne doit pas se révéler être un feu de paille. C’est une oeuvre de longue haleine que vient d’initier le Burkina Faso, oeuvre qui doit être menée jusqu’à son terme. La preuve de la nécessité d’intensifier les apprentissages est donnée par l’engouement des populations sur la revue de presse de Sid-naaba sur la radio Savane FM tous les matins. Si la femme ou l’homme qui a son récepteur collé à l’oreille avait la possibilité de lire les informations sur un support dans sa langue maternelle, ce serait un grand bond pour lui, un plus pour son auto- promotion. L’engouement des populations pour cette tranche des émissions de Savane FM montre que leur quête d’alphabétisation est grande.

D’où la nécessité - c’est du reste une simple logique - de faire de nos langues nationales la pierre angulaire de l’alphabétisation. Nos langues nationales doivent constituer les leviers de notre développement car dans l’histoire de l’humanité, aucun peuple ne s’est véritablement épanoui avec la langue d’un autre. Alors, pourquoi ce qui n’a jamais été faisable ailleurs le serait chez nous en Afrique, parce que nous sommes pauvres et parce que nous avons été depuis plus d’un siècle dépossédés de nos langues qui ont été vouées aux gémonies, et de nos cultures qui étaient simplement classées au rang de pratiques barbares et sataniques.

Pour faire des langues nationales les outils de sa réhabilitation culturelle et de sa promotion économique. L’Afrique doit se décomplexer vis-à-vis de la langue française. Des langues africaines sont parlées et comprises des rives de l’Atlantique à celles de l’Océan Indien. Pendant la période pré-coloniale, quelle langue pensez-vous qu’utilisaient les négociants des savanes quand ils se rendaient à Taoudéni ou à Tombouctou, à la recherche du sel ? Dans quelle langue communiquaient-ils avec les populations de la forêt quand ils descendaient profondément dans les pays du Golfe de Guinée à la recherche de la cola ? Des langues comme le Haoussa et le Fulfuldé sont bien parlées par les peuples du Sahel, de la forêt jusqu’aux confins du désert.

Mais revenons à l’alphabétisation au Burkina qui est un impératif pour ce pays pris dans la tourmente de la mondialisation. Une relance de l’alphabétisation à l’échelle nationale, venant après la décision de rendre obligatoire l’enseignement pour tout jeune Burkinabè âgé de 5 à 16 ans, venant après la décision de distribuer gratuitement les livres et les matériels scolaires aux élèves des classes de sixième, participe de la volonté de l’État de combattre l’ignorance. En quoi les nouvelles technologies de l’information et de la communication peuvent-elles être utiles au Burkina dans sa croisade contre l’analphabétisme ? Aujourd’hui, dans les campagnes les plus reculées du Burkina, dans les hameaux de culture les plus isolés, sur le berger qui parcourt la brousse derrière son troupeau, on trouve un portable.

Il revient aux techniciens de créer des logiciels qui prennent en comptent les besoins de tous ces utilisateurs dont la grande majorité n’a pas mis les pieds dans une classe une seule matinée. Sans le savoir et sans le vouloir, la Loterie nationale burkinabè (LONAB) a contraint des milliers d’hommes et de femmes de ce pays à s’auto-alphabétiser pour déchiffrer les programmes du PMU. Et ils se trouvent être les plus performants aujourd’hui en matière de courses de chevaux !

Mais qui a intérêt à ce que la présente campagne atteigne pleinement ses objectifs ? Il n’est pas faux de dire que les partis politiques - pas tous heureusement- profitent de l’ignorance de leurs militants. Dans les provinces et dans les départements, des roitelets tirent leur puissance de l’ignorance ambiante des populations. Ce sont les ennemis d’une alphabétisation réussie. Mais le plus grand ennemi de la nouvelle campagne d’alphabétisation, c’est le manque de moyens pour conduire l’opération sur tout le territoire national jusqu’au bout.

Et là, ce n’est pas gagné d’avance, la majeure partie de nos projets et programmes étant bâtis en comptant sur l’aide de nos partenaires au développement. Il y a cette vérité qui veut que le partenaire ne finance que ce qu’il veut financer, c’est-à-dire ce qui va lui profiter, à lui et à son pays. Sinon le matériel didactique existe, les ressources humaines qui peuvent permettre au Burkina de réussir une politique nationale d’alphabétisation existent aussi.

Le Fou

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