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Bavure policière à banfora : Les ayants droit réclament 20 millions

Publié le mercredi 26 mai 2004 à 07h28min

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Le policier responsable de la mort d’un mécanicien, Koné
Mamadou, au Commissariat central de police de Banfora en
1999, a comparu devant le tribunal de Banfora le 18 mai dernier.
Les ayants-droit de la victime réclament au titre des dommages
et intérêts 20 millions de francs CFA.

A la barre ce 18 mai 2004, aux côtés du prévenu, Dabila
Ouattara, (assistant de police), Me Yamba Karambiri. La partie
civile, un frère, une soeur et la femme de la victime, n’était pas
assistée d’un conseil, faute de moyens, dit-elle.

Le prévenu n’a
pas nié les faits à lui reprochés. Dans la nuit du 12 au 13 août
1999, déclare-t-il, après une patrouille face à l’insécurité qui
régnait dans la ville, il est rentré chez lui à 1h 30 mn du matin.
Muni d’une torche et de son arme, il allait aux toilettes quand il
aperçut un individu qui rodait devant son portail. Sa curiosité
l’amena finalement à maîtriser "l’inconnu". Ce dernier n’avait
aucune arme en sa possession.

Le policier poursuivit en disant
que les réponses aux questions qu’il lui avait posées, lui ont fait
croire qu’il pouvait s’agir d’un trafiquant d’engins. La mobylette
d’un témoin a permis de conduire l’inconnu au commissariat
central de police. Au poste de police, il trouva deux éléments de
garde. Et la fouille de l’inconnu leur permit de découvrir deux
cartes d’identité en sa possession ainsi qu’une somme de 129
560 F CFA. Koné Mamadou déclarera que la seconde
appartenait à sa femme. Il fut décidé de le mettre en
garde-à-vue.

C’est au moment où l’un des policiers tentait
d’ouvrir la porte de la cellule, que Koné Mamadou, poursuit le
prévenu, aurait bousculé le policier qui devait l’enfermer pour
tenter de s’évader. C’est en ce moment-là qu’intervint l’assistant
Ouattara qui dans sa tentative de le maîtriser, fit entendre une
détonation. Koné réussit tout de même à franchir le seuil de la
cellule avant de s’écrouler juste à la sortie du commissariat,
atteint d’une balle qui lui a transpercé la poitrine aux environs de
2h 30 mn.

"Le coup m’a surpris"

Sur cette tragique mort, l’assistant se justifie : "Le coup qui est
parti m’a surpris. Je me suis interposé ; il s’est saisi de ma
main ; je ne savais même pas que j’avais l’arme en main. Le
contact a été violent". A la question du substitut du procureur qui
cherchait à savoir s’il connaissait le défunt, il dira que c’est bien
après qu’il s’est rendu compte qu’il le connaissait. Ils habitaient
tous le secteur n°3.

A la question de savoir s’il a le droit de faire
usage d’arme à feu en cas d’évasion, l’assistant répondra par la
négative avant de préciser que "nous tentons par tous les
moyens, sans usage d’arme".
Après le drame, c’est la police qui a fait le constat et les
magistrats ont voulu savoir si celle-ci était habilitée à le faire ?
C’est là qu’intervint le chef de la police judiciaire d’alors,
Salvador Nébié, qui dira qu’on peut "le faire en attendant".

Sur
une autre question de l’avocat du prévenu, l’officier Nébié dira
que l’arme du crime était légalement détenu par le prévenu qui
reste un élément "consciencieux" et "toujours disponible". Les
deux agents de garde appelés à la barre ne contredisent pas
les faits mais précisent que "tout le monde était étonné
d’entendre le coup de feu". Les policiers ont par ailleurs reconnu
que malgré l’agitation de Koné, ils n’ont pas pris la précaution
de le menotter en pareille situation ; toute chose qui pouvait
éviter ce drame.

Malheureusement, le pire s’est produit suivi de
la mise à sac du commissariat et de la cité policière.
Dans son réquisitoire, le substitut du procureur, Arnaud
Ouédraogo, a parlé d’"affaire particulière" en ce sens qu’il y a là,
non seulement un policier mis en cause, mais aussi le
problème des libertés individuelles. Sur les dégâts après le
drame, le substitut a été formel en disant qu’un Etat
responsable ne peut pas laisser la sécurité à la rue. Aussi, a-t-il
ajouté, les citoyens doivent avoir foi en la loi dans la résolution
des problèmes.

Estimant que le policier qui a donné la mort a
voulu faire son travail, il précisera que ce dernier n’a pas fait de
sommation avant de tirer. De ce fait, il y a un délit d’imprudence,
de négligence, car le prévenu aurait dû se désarmer une fois au
commissariat.

Arnaud Ouédraogo a trouvé l’homicide
involontaire fondé, et a demandé au tribunal de le reconnaître
coupable avec des circonstances atténuantes. Il a requis une
peine assortie de sursis et une amende de 250 000 F CFA.
De son côté, l’avocat du prévenu qui évoque l’article 70 du code
pénal estime qu’il n’y a ni crime ni délit du fait que son client a
agi sous le couvert de l’Etat. Pour lui, le juge d’instruction devait
déclarer un non-lieu. Et il se demande même si le défunt n’avait
pas lui même appuyé sur la détente. Il a demandé de relaxer
purement et simplement son client et a par ailleurs estimé la
réclamation de la partie civile exagérée.

Selon Me Karambiri, la
réclamation devrait même se pourvoir autrement, du fait que son
client a agi sous le couvert de l’autorité de l’Etat.
Notons qu’à ce procès, le témoin qui a prêté la moto était
absent. Aussi, peu de questions furent posées à la partie civile.
A peine lui a-t-on demandé les liens qui existaient entre elle et le
défunt et le montant du dédommagement attendu. Et l’auditoire
n’a pas pu savoir par exemple la personnalité du défunt comme
ce fut le cas pour le prévenu. Le verdict est pévu pour le 22 juin
2004.

Par Luc OUATTARA

Le Pays

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