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Maghreb : La "filière" afghane

Publié le vendredi 14 septembre 2007 à 08h22min

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La résurgence du terrorisme en Algérie et plus généralement au Maghreb arabe, traduit la volonté du réseau Al-Qaïda de "traquer" les "infidèles" occidentaux partout où ils se trouvent. Aussi, dans le cas de l’Algérie, c’est la conséquence d’une démocratisation ratée dont les "germes" se trouvent dans les législatives tronquées de 1990.

L’Algérie a basculé dans la violence au lendemain des élections législatives de 1990, lorsqu’estimant que sa victoire lui avait été volée, le Front islamique du salut (FIS) ordonna à ses "brigades" de commencer le "djihad" (la guerre sainte) contre un régime "impopulaire" et "impie".

On est mémoratif que dans l’Algérie d’alors, les crises de régimes (assassinat de Mohammed Boudiaf, démission de Liamine Zeroual, crise de succession au sein du FLN) avaient fini d’affaiblir l’appareil d’Etat qui ne tenait plus que grâce à la poigne de fer du haut Etat-major militaire avec le général Lamari (récemment décédé) à la baguette. Les militaires, il faut en convenir, avaient sapé les acquis d’une indépendance glorieuse, acquise de haute lutte sous la conduite du Front de libération nationale (FLN).

Très tôt (1965) en effet, l’aile militaire du parti s’emparera du pouvoir d’Etat par le biais du colonel Houari Boumédienne. Sous sa poigne de fer, l’Algérie basculera dans une oligarchie politico-militaire où la crème de l’appareil d’Etat "captait" les revenus de la manne pétrolière et gazière. A côté, le petit peuple se paupérisait et était contraint à l’immigration, principalement vers la France. Un terreau fertile pour les islamistes qui y recruteront leurs premières phalanges.

L’affaiblissement du régime susmentionné, conjugué à la "connexion" des islamises avec certains officiers supérieurs donnera de plus en plus de poids au FIS qui deviendra la principale force politique algérienne au détour des années 90. C’est quasiment à bon droit donc qu’il déclenchera le djihad avec l’expertise des "Afghans", entendez les Algériens qui avaient combattu les troupes soviétiques, en Afghanistan, au nom du panarabisme. Le temps faisant son œuvre, et avec l’aide des alliées occidentaux, le pouvoir algérien surmontera cette crise, le pays payant tout de même un lourd tribut à la guerre civile.

Pour autant, le feu couvait sous la braise si tant est que le FIS entendait prendre toute sa part dans la gestion du pouvoir d’Etat. Aussi, la nouvelle donne proche et moyen orientale (guerre israélo-palestinienne, déstabilisation de l’Irak et de l’Afghanistan) et surtout la volonté de l’Oncle Sam de traquer le terrorisme "partout où il se trouve", transformeront l’Algérie en un nouveau champ de bataille.

En effet, dans cette croisade, l’Amérique prend progressivement pied dans le désert algério-malien. Oussama Ben Laden qui, de son côté, a déclaré une guerre sans merci aux "infidèles" ne pouvait rester inactif face à cette nouvelle donne. On comprend pourquoi le champ de prédilection du Groupe Salafiste pour la prédication et le combat (GSPS) d’Abdoul Rezzak dit le "para" était ledit désert. Contrer l’ennemi partout où il est, la bonne vieille méthode de lutte, de toutes les guérillas du monde se vérifiait ici aussi.

La gangrène a pris

Vu ainsi, on comprend pourquoi cette résurgence du terrorisme touche progressivement la Tunisie et le Maroc. Djerbah en Tunisie, Marrakech au Maroc ont été le théâtre d’attentats sanglants, tous revendiqués par des groupes se réclamant d’Al Qaïda. Il faut dire que l’un comme l’autre des deux pays sont des alliés inconditionnels de l’Oncle Sam au Maghreb. Malgré son "monolithisme" politique, la Tunisie ne fait l’objet d’aucune remontrance de la part de ses alliés occidentaux. Zine El Abidine Ben Ali, a réussi à réduire ses islamistes à la portion congrue, ce qui lui vaut les lauriers et les subsides de l’Oncle Sam. A côté au Maroc, la situation est à l’avenant, le défunt roi Hassan II ayant "déblayé" le terrain, avec l’aide de son ministre de l’Intérieur de l’époque, Driss Basri.

Son fils, Mohammed VI, quoique plus libéral que son père et beaucoup plus enclin au "bouillonnement" politique, n’en franchit pas pour autant la barrière menant à une démocratie véritable. Cet étouffement des libertés publiques et politiques favorise, on l’a dit, les "irrédentismes" nationaux et provoque l’ire d’Al Quaïda. Laquelle frappe quand ça fait le plus mal (en période estivale généralement) par le biais de ses "Afghans".

Le mal qui ronge la région n’est pas près de guérir si tant est qu’il prend sa source dans un conflit en voie d’enlisement, celui israélo-palestinien. En pleine crise morale et politique, l’Etat hébreu doit d’abord résoudre ses propres contradictions avant d’envisager une solution négociée pour sortir de ce conflit. Une occurrence lointaine, si tant est que les positions sont tellement tranchées (les orthodoxes ne veulent entendre parler d’une quelconque cession de Jérusalem-Est) que l’on se perd sur la porte de sortie à cette crise.

Ben Laden ayant juré qu’il continuera sa lutte "tant que Jérusalem ne sera pas libérée", le Maghreb est appelé à être secoué par des attentats sporadiques. Il faut craindre pour les Etats au sud du Sahara, région où l’Amérique veut installer des bases pour mieux surveiller les terroristes. Mali, Burkina Faso, Niger ne sont pas à l’abri, malgré leur syncrétisme religieux, avec ces groupuscules islamiques qui fleurissent çà et là et "l’équation" touarègue qui se repose avec acuité. Somme toute, on assiste aux effets dévastateurs d’une mondialisation débridée, inique et cynique qui n’a pour seule "boussole" que le profit.

Et comme l’a indiqué Blaise Compaoré en mai 2004 à Lyon, cette globalisation "libérale, financière et marchande" n’est pas "bonne" et c’est d’elle que découlent "les événements tragiques du 11 septembre 2001, l’évolution dramatique du conflit israélo-palestinien, la crise irakienne". A méditer.

Boubacar SY (magnansy@yahoo.fr)

Sidwaya

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