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Filière karité : Burkinabè et Indiens à couteaux tirés

Publié le jeudi 6 septembre 2007 à 07h06min

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Le samedi 25 août 2007, la Chambre de commerce de Bobo a abrité une grande rencontre sur la filière karité qui connaît depuis un certain temps un regain d’activité. Au cours de cette rencontre, les acteurs de la filière ne se sont pas faits de cadeau ; les uns accusent les autres d’être mal organisés sur le terrain.

Pour parer au plus pressé, les acteurs présents à la Chambre de commerce, ont décidé de la création de 13 maisons du karité à travers les 13 provinces impliquées dans la filière. La première maison du karité est prévue pour octobre prochain à Bobo-Dioulasso. Cela permettra de mettre fin à l’inorganisation reconnue par l’ensemble des acteurs.

Cette rencontre a regroupé plusieurs grands noms de la filière karité. Seuls les Indiens qui sont pourtant partie prenante dans la filière n’étaient pas de la partie. Dans les coulisses de cette rencontre, ceux-ci ont été largement critiqués. Les nationaux les accusent de pratiquer une concurrence déloyale pour contrôler toute la filière à leur seul profit. A la limite, c’est le monopole de la filière qu’ils lorgnent.

L’amande de karité du Burkina est présentement bien classée sur le marché des matières premières agricoles à cause de sa qualité. Mais la pratique des Indiens risque de remettre tout cela en cause.
A leur arrivée, les Indiens passaient par des nationaux pour se ravitailler. Maintenant, ils ne respectent plus la chaîne de la filière qui consiste à faire gagner tout le monde, du paysan au champ jusqu’aux bailleurs européens qui les transforment.

Les Indiens se rendent désormais eux-mêmes au bord des champs. Ils ont payé des mobylettes pour des jeunes du village afin de stocker le maximum d’amandes pour eux. Ils sont prêts à payer très cher même s’ils vont perdre cette année. Leur but est de contrôler le marché des amandes de karité au détriment des nationaux. L’idée de mettre en place des maisons du karité apparaît comme une riposte mais elle a ses limites. Depuis l’époque de la Caisse de péréquation qui délivrait un agrément aux acteurs des produits du cru, le secteur connaît actuellement un désordre total.

Les traités de l’UEMOA qui prônent une intégration et une liberté d’entreprise des acteurs peuvent freiner un peu les ardeurs des maisons de karité. Les Indiens sont toujours libres de fonctionner à leur guise. Que faut-il faire alors ?

Cette interrogation a fait le tour de la plupart des grins de Bobo où les acteurs de la filière ne manquent pas. Pour les uns, les Indiens sont dans leur droit. Ils sont originaires d’un pays qui s’affiche comme émergent dans le monde.
Tous les moyens sont bons pour arriver à ses fins en affaire.

L’Inde est un grand pays qui possède même l’arme nucléaire. Mais la pauvreté frappe une grande partie de sa population. Depuis un certain temps, on rencontre les Indiens dans le circuit des produits du cru au Burkina. Au départ, ils travaillaient en bonne intelligence avec les nationaux. Les affaires marchaient pour tout le monde. Surtout avec ce qu’on a appelé ici le printemps de l’acajou.

Les partenaires européens notamment les Hollandais et les Danois ont beaucoup investi pour ce produit qui a fait naître beaucoup d’espoir en milieu rural. L’acajou était présenté comme le cacao du Burkina. Mais contre toute attente, les Indiens ont décidé de s’accaparer seule la filière. Ils ont fait grimper les prix chez les paysans. Dans leur lancée concurrentielle, ils ne triaient plus. La qualité n’était pas leur problème. Ils voulaient stocker le maximum pour étouffer les autres et rester seuls à bord. C’est dans ces conditions que la filière de l’acajou a fini par plonger dans l’impasse. Plus personne ne s’intéresse à l’acajou du Burkina qu’on taxe de mauvaise qualité.

Les nationaux accusent les Indiens d’avoir « gâter » le marché de l’acajou.

Il y a plusieurs acteurs de la filière qui disent détenir des milliers de tonnes d’acajou depuis l’an passé. Il n’y a pas le moindre preneur. Pourtant l’acajou est beaucoup demandé sur le marché international.
Par la faute de la pagaille commerciale des Indiens, les partenaires européens ne font plus confiance à l’acajou, ces Indiens sont maintenant tournés vers le karité.
Les nationaux ne veulent pas les laisser faire même si les textes pour les combattre n’existent pas clairement. La libre concurrence, c’est vrai, mais il faut qu’elle respecte au moins le marché. Il faut que les Indiens se conforment aux règlements en vigueur.

L’idée de création des maisons du karité ne doit pas concerner seulement les nationaux. Il faut tenter d’impliquer les Indiens et leurs grands moyens dans l’organisation de la filière.

Face à ce sujet délicat, la plupart des membres du grin de Bobo sont restés prudents. Ils n’ont pas voulu débattre d’un problème dont ils ne maîtrisent pas tous les contours.
Mais certains ont été formels ; les Indiens sont des cafouilleurs. Dans certains pays, il paraît qu’ils ont carrément été chassés. Mais au Burkina, le pays des Hommes intègres, l’étranger est un véritable roi.

Au grin, les gens ont trouvé que lorsqu’un Burkinabè a des problèmes avec un étranger, ce dernier est toujours bien protégé. Ce n’est pas comme dans certains pays où l’étranger a systématiquement tort. Cela ne doit pas amener certains étrangers à exagérer. Burkinabè et Indiens doivent s’unir pour préserver les différentes filières des produits du cru.

L’Opinion

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