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Musique, jeunesse et emploi : Le show-biz, une industrie comme les autres

Publié le lundi 27 août 2007 à 08h00min

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La musique peut-elle constituer un projet pour les jeunes notamment burkinabè dont l’une des préoccupations majeures reste l’insertion dans la vie active ? C’est l’une des questions, sujet à débat dans la presse depuis quelques semaines suite à la série de concerts organisés par le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi à l’occasion de la Journée internationale de la Jeunesse.

A ce propos on est frappé par la dureté des critiques qui, somme toute, est un indicateur du fait que la démocratie burkinabè ne cultive pas l’unanimité. Tant mieux pour la liberté d’expression même si sur le sujet musique, jeunesse et emploi, l’argumentaire des contempteurs des spectacles musicaux pour célébrer la fête de la jeunesse, ne vole pas haut.

On peut tout reprocher au Burkinabè, surtout sa trop grande modestie, mais on ne lui reprochera pas d’avoir sa langue dans sa poche. Pour s’en convaincre, il suffit de lire les journaux. La liberté d’expression des Burkinabè est totale. A preuve, les nombreux écrits, lettres ouvertes, points de vue et autres déclarations dont abusent certains pour interpeller nos gouvernants.
Ces dernières semaines, c’est le croustillant rapport de la Cour des comptes rendu public début juillet et la série des concerts des vedettes de la musique organisés par le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi à l’occasion de la célébration de la Journée internationale de la Jeunesse qui sont les sujets favoris qui reviennent le plus dans le courrier des « lecteurs ou citoyens indignés ».

Beaucoup de bruits pour rien

A ce propos, c’est avec grande surprise que l’on lit le semblant de tollé qu’aurait suscité les 13 concerts organisés sur l’initiative du ministère de la Jeunesse et de l’Emploi. « Semblant de tollé » parce qu’il y a comme une campagne médiatique ciblée contre le premier responsable de ce département très sensible.
En vérité, on ne voit rien d’aussi choquant dans la démarche des autorités du ministère de la Jeunesse d’offrir des spectacles de distraction et de réjouissance aux jeunes burkinabè.

Les objectifs de ces évènements musicaux, éduquer dans la distraction saine sur les problèmes des infections sexuellement transmissibles dont le VIH/Sida, offrir des exemples de réussite sociale à travers des vedettes de la chanson moderne africaine aux jeunes burkinabè qui rêvent d’embrasser la carrière d’artistes, célébrer la jeunesse africaine à travers des rythmes et des sonorités du continent n’est pas un crime. Cela peut constituer, au contraire de certains à priori, un volet important de projets et programmes d’insertion des jeunes. De toute manière, les jeunes mélomanes burkinabè n’ont pas eu besoin des concerts de leur ministère de tutelle pour s’identifier depuis toujours à certaines stars de la musique d’ici et d’ailleurs qui sont pour eux, de véritables idoles.

Il est vrai que toutes les stars de la musique ne sont pas des modèles sociaux. On en connaît qui sont alcooliques, toxicomanes, accros de la drogue et mènent une vie si dissolue qu’ils donnent à douter de la noblesse du métier d’artiste. Mais ces dérives, contre-modèles pour une jeunesse responsable et engagée dans le combat pour un leadership personnel et pour le développement, le progrès de la société à laquelle elle appartient ne sont pas un monopôle de la profession d’artistes musiciens. Dans d’autres corps de métiers, médecins, avocats, journalistes, enseignants, etc., il y a aussi des brebis galeuses qu’on n’ose pas proposer comme exemple à suivre aux jeunes burkinabè.

Oui, la musique peut constituer un projet d’insertion des jeunes dans la vie active

Néanmoins, tous les artistes musiciens ne sont pas des pestiférés. Ni la danse, une distraction malsaine pour jeunesse désoeuvrée et marginale. Réduire la musique et la danse à leur côté pervers, c’est ignorer beaucoup de la culture africaine. Nous n’irons pas jusqu’à avaliser la philosophie senghorienne qui soutient que « la raison est hellène comme l’émotion est nègre » mais tout dans les sociétés traditionnelles africaines respire la musique. Du berceau à la tombe on est constamment accompagné par la musique. Dès lors, elle n’adoucit pas seulement les moeurs, elle est une partie de l’âme de l’Africain authentique. C’est ainsi que depuis la nuit des temps, être musicien dans beaucoup de sociétés africaines, c’est embrasser une profession de prestige qui vous introduit dans tous les milieux, de la cour des rois aux foyers les plus modestes.

De nos jours le show-biz est une industrie à part entière qui emploie et nourrit des millions de personnes à travers le monde. Des jeunes et des moins jeunes. C’est pourquoi les plus hautes autorités à travers le ministère de la Culture se sont engagées depuis au moins une décennie à soutenir la musique moderne burkinabè. Un orchestre national a été créé, des fonds ont été injectés dans l’enregistrement d’œuvres musicales, la réalisation de clips vidéo avec l’espoir de voir de jeunes talents émerger pour vivre et faire vivre par leur art.

Le gouvernement n’a pas tort de mener une telle politique. Il est même souhaitable que passés ces concerts ponctuels, le ministère de la Jeunesse et de l’Emploi entre en contact si ce n’est déjà fait avec celui de la Culture et celui chargé des Loisirs pour des projets encore plus audacieux, plus harmonisés et plus structurels pour que la promotion de la musique rime avec promotion de la culture, de l’auto-emploi, de la saine distraction, de la cœxistence pacifique des peuples. L’UNESCO et le PNUD ont si bien compris que les stars de la musique pouvaient être de bons exemples pour les jeunes avec des messages d’éducation, porteurs, qu’ils ont nommés et nommeront des ambassadeurs de bonne volonté et de la bonne cause parmi les artistes musiciens de renom.

La musique, un moyen de lutte pour les libertés, l’indépendance et le développement du continent africain

Si l’on nous pose la question de savoir si la musique peut constituer un projet d’insertion des jeunes au Burkina Faso, nous répondrions oui avec quelques réserves de principe. Car comme on dit en toute chose il y a des exceptions et les exceptions confirment la règle générale.

Dans le domaine du show-biz et de la musique africaine en particulier, on compte heureusement par légion les bons exemples qui convainquent que le secteur peut susciter des projets porteurs pour l’épanouissement des jeunes. Dites-nous, vous les contempteurs des concerts de musique pour célébrer la fête de la jeunesse, en quoi par exemple, la Côte d’Ivoire devrait rougir d’une Aïcha Koné, d’un Alpha Blondy, d’un Meiway, etc. ? En quoi le Sénégal devrait avoir honte d’un Youssou N’Ddour, d’un Ismaël Lo ou Coumba Gawlo, etc. ? On ne remontera pas jusqu’à Myriam Makeba, Sony Okoussou, Luke Dube, Franco et autres Rochereau pour rappeler la place de choix que la musique peut occuper et a occupée dans la lutte contre la colonisation, l’apartheid et pour les libertés, l’indépendance et le développement du continent africain.

Au Burkina nous n’avons pas non plus à « rougir » d’un Georges Ouédraogo, d’un Abdoulaye Cissé, d’un Bil Aka kora, d’un groupe Yeelen, etc. Au contraire, il faut déplorer le fait que leur immense talent n’ait pas été récompensé jusqu’à présent à leur juste hauteur. Justement peut-être parce que l’industrie des Arts et du Spectacle n’est pas encore bien développée au Burkina Faso. Et ce ne sont pas les critiques aussi acerbes à la limite de la malveillance contre les initiatives comme celle du ministère de la Jeunesse et de l’Emploi qui la feront décoller.

Alors de grâce, arrêtons de diaboliser la musique et les jeunes mélomanes. Il faut au contraire saisir et encourager toutes les opportunités qui valorisent l’art de la musique et du spectacle comme sujet et objet de culture, de communication, de saines distractions et d’émulation de talents promotionnels pour les jeunes d’ici et d’ailleurs.

Djibril TOURE

L’Hebdo

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Vos commentaires

  • Le 27 août 2007 à 09:30, par sawa En réponse à : > Musique, jeunesse et emploi : Le show-biz, une industrie comme les autres

    Lorsqu’on parle de culture, de musique, de danse, de spectacles, on s’adresse au ministre de la culture.
    Si comme le dit notre super journaliste "Musique, jeunesse et emploi : Le show-biz, une industrie comme les autres", moi je me demande donc pourquoi le ministre du travail ne s’occupe pas aussi :
    - Du sport qui est un vecteur d’emploi pour les jeunes
    - de la fonction public (premier employer des jeunes)
    - de L’industrie et du commerce
    - de l’habitat et de l’Aménagement du territoire
    - de l’agriculture
    - etc etc.

    Tous ces domaines d’activité sont de grands vecteurs d’emploi pour les jeune (plus en tout cas que la musique) !

    Il ne faut pas tout melanger : La musique et le "show-biz" ne reprente qu’un tres tres faible débouché pour le jeunes qui vont emprunter ce chemin. Leur donner l’illusion qu’ils vont gagner des millions en se tournant vers la musique est irresponsable !Combien connaissez de chanteur Burkinabé connu en Occident et qui gagnent des million ? magic system est le premier et seul groupe "africain" popularisé en France. ! Le Youssou N’Dour, Rokia Traore, Farka Touré, Oumou Sangaré et autres faroteurs sont uniquement connu par la dispora et les connaisseurs.

    Penser ou baser le developpement de notre pays sur le "show-biz et la musique" ... Je ne sait pas quoi dire !! C’est une Aberraton !

    Le ministre du travail devrait plus (je pense) expliquer aux jeunes que la vie est difficile, que le pays est pauvre, et que justement, ils devraient arreter de faire le show, et se concentrer sur les etudes et le travail !

    Maintenant, si des jounaliste arrivent a justifier un ministre du travail qui organise pour les jeunes de "show", demain, tous les ministeres n’ont qu’a organiser des "show". Je suis certain que s’est de cette façon là qu’on donnera un avenir aux jeunes que le pays sortira de la pauvreté !

    • Le 28 août 2007 à 00:56 En réponse à : > Musique, jeunesse et emploi : Le show-biz, une industrie comme les autres

      Je crois que notre cher journaliste aurait du s ’engager dans ce show-biz comme il le dit. Certainement qu’il aurait ete mieux la bas que dans le journalisme. Il aurait gagne des millions comme les chanteurs burkinabe qu’il cite et vivrait a l’abris du besoin comme eux.

      En plus de cela ces jeunes n’etaient pas presents au concert pour le cas qui nous concerne en tant que Chanteurs mais en tant que spectateurs et danseurs. Les chanteurs c’etaient les autres. Vous savez, aide les ministeres et les differentes autorites a nous aider. En tant que journaliste cela passe par les bonnes critiques. Celles constructives. Dire la verite a une autorite n’est pas etre contre elle. C’est l’aider a aider le peuple.

      Je vous demande donc en tant que journaliste, qui avez certainement un parent diplome ou non au chomage a analyser autrement cette activite organisee par ce ministere au profit des chomeurs. Elle est mal venue. Ce n’est pas le moment. La priorite est ailleurs. Comment le ministere peut-il organiser des djandjobas dans les 13 provinces et dire dans le meme temps qu’il n’a pas assez de ressources pour soutenir les projets des jeunes ?

      Je n’ai rien contre la personne du ministre. Je ne suis d’aucun bord politique. Je suis tout simplement une citoyenne de ce pays qui est triste de la situation de nos jeunes. Alors ensemble, aidons le ministere par des critiques constructives a aider nos enfants. Nous devons eviter de jouer au jeux que vous etes entrain de jouer. C’est triste venant d’un journaliste. Vraiment triste. Peut-etre aussi que je suis naive et que je vous place la ou vous n’etes pas en realite.

      • Le 28 août 2007 à 20:08, par Lewis En réponse à : > Musique, jeunesse et emploi : Le show-biz, une industrie comme les autres

        La citoyenne a tout dit. Je crois que ce n’est pas du journalisme que l’auteur de cet article fait, mais de la communication pour un ministre. Sinon les Burkinabé dans leur ensemble, r’econnaîtront le caractère inopportun de ces concerts pour une jeunesse en proie au chômage. parce qu’ il faut avoir bien mangé pour penser au show.

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