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Candidature de DSK au FMI : Un socialiste au cœur de l’ultralibéralisme

Publié le jeudi 12 juillet 2007 à 07h40min

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Dominique Strauss-Kahn

Le Fonds monétaire international est une institution qui, pour bien des Africains, n’évoque que des douleurs. Avec ses programmes économiques draconiens qui ont amené nos Etats à adopter des restrictions diverses, le FMI n’a pas toujours bénéficié d’une bonne image dans l’opinion africaine.

Une relation rendue encore plus brouillée par l’action des altermondialistes pour qui ce Fonds, autre mamelle des institutions de Bretton Woods avec la Banque mondiale, est l’incarnation du mal. C’est à la tête de ce symbole du néolibéralisme que veut se mettre un socialiste français, Dominique Strauss-Kahn.

A priori, il y n’y a aucun mal à ce qu’un cadre compétent, indépendamment de ses convictions politiques, aspire à diriger une institution aussi prestigieuse que le FMI. Tout pays, en principe, a une politique de placement de ses cadres aux hautes fonctions internationales parce que cela participe aussi de son rayonnement diplomatique. Nicolas Sarkozy, le président français, l’a si bien compris qu’il n’a pas hésité à soutenir la candidature d’un socialiste dont il croit qu’il a le meilleur profil. La gauche, cette fois-ci, gênée aux entournures, a simplement pris acte du lobbying actif de Sarkozy qui a permis au candidat français de passer l’étape du consensus européen.

Sans doute pour éviter de reconnaître le mérite de Sarkozy, rivalité politique oblige, ils se sont lancés dans une sorte de minimisation de l’engagement présidentiel, au risque d’offrir l’image de trouble-fêtes. Doit-on mettre les débauchages de personnalités de gauche pour le gouvernement Fillon sur la même balance que le soutien apporté à Strauss-Kahn ? Ce serait faire preuve de malhonnêteté politique car la bonne foi peut aussi sous-tendre certains gestes posés par les dirigeants. Aussi carnassier politique soit-il, il doit tout de même pouvoir faire la part des choses entre les intérêts de son parti et ceux de la nation.

En tous les cas, jusque-là, il a posé des actes dont la portée dépasse largement les frontières étriquées des partis, pour s’inscrire en président de tous les Français. Peut-être que la suite démentira cette perception, mais en attendant, le PS devrait accorder le bénéfice du doute à Sarkozy. Du reste, le PS pourrait devenir ridicule en pinaillant sur le cas Strauss-Kahn, alors que l’Europe tout entière a mis de côté ses différences pour faire un choix clair. Ce qui, soit dit en passant, est une preuve de grandeur d’esprit, quand on voit comment les Africains s’étripent en pareilles circonstances.

En revanche, le PS a plus intérêt à surveiller le baromètre de sa propre popularité, si son poulain venait à être retenu comme DG du FMI. Le parti de François Hollande peut être une des victimes collatérales d’un échec de Strauss-Kahn. Pour le PS surtout, dont la vocation est de s’opposer aux mesures ultralibérales qui mettent à mal les droits sociaux des travailleurs, le nouveau DG ne doit pas décevoir.

Les pays pauvres, les partis de gauche et les altermondialistes l’attendent au tournant, pour voir s’il saura concilier ses convictions socialistes avec les lois de la finance internationale. Si tel n’était pas le cas, il va sans dire que le PS, son parti d’origine, pourrait en faire les frais. Déjà, certains milieux de gauche considèrent DSK comme le "berger devenu loup". Voici comment, une fonction internationale peut avoir une influence sur la vie politique intérieure en France.

En plus d’honorer sa famille politique et la France considérée sous Chirac comme l’alliée des pays pauvres, DSK est sans doute redevable à son continent, l’Europe, qui lui a apporté un soutien unanime. Quel type d’ascenseur doit-il renvoyer à ces pays après un tel plébiscite ? Malgré les textes, il ya sans doute un avantage particulier à être à la tête du FMI. Sinon, on ne comprendrait pas que l’Europe et les Etats-Unis s’entendent pour avoir la haute main sur le FMI et la Banque mondiale.

De toute façon, le nouveau patron du FMI, qui qu’il soit, doit travailler à redorer l’image de la "boîte" qui ne fait plus seulement face à la fronde des syndicats et des mouvements altermondialistes, mais aussi à celle de certains Etats membres. La grogne des grands pays émergents qui commencent à se poser des questions sur le fonctionnement du Fonds peut être contagieuse et toucher les pays pauvres d’Afrique. Ces derniers ont jusque-là avalé les remèdes des institutions financières internationales sans broncher.

Mais jusqu’à quand, alors que le développement se fait attendre et que les aspirations des populations à un mieux-être se font pressantes ? Avec cette pression des peuples, les membres les plus pauvres du FMI pourraient eux aussi devenir plus entreprenants et demander des réformes qui leur soient avantageuses. L’affaire Paul Wolfowitz avait déjà entraîné des fissures dans la suffisance dont faisait montre la Banque mondiale. Le FMI et son prochain DG n’ont donc qu’à bien se tenir.

Le Pays

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