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Gouvernement fédéral africain : Accra n’a pas réalisé le rêve

Publié le mardi 3 juillet 2007 à 08h08min

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Le IXe Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement, du 1er au 3 juillet 2007 dans la capitale ghanéenne, Accra, s’est tenu autour d’un seul et grand débat : la formation d’un gouvernement fédéral africain, en vue de la création des Etats-Unis d’Afrique.

Ce projet et vœux panafricanistes du Guide libyen Mouammar Kadhafi a buté sur la recommandation à la prudence et à une intégration progressive, axée sur la consolidation des ensembles régionaux préconisée par de nombreux chefs d’Etat dont le président du Faso, Blaise Compaoré.

Accra, capitale du Ghana, terre natale du panafricaniste convaincu et un des pères fondateurs de l’Organisation de l’Unité africaine (OUA) Kwamé N’krumah, n’a pas vu se réaliser le rêve continental : former un gouvernement fédéral africain, en vue de la création des Etats-Unis d’Afrique.

Et pourtant, c’était prévu à l’ordre du jour du IXe Sommet de l’Union africaine (UA) qui a enregistré du 1er au 3 juillet 2007 la participation d’une quarantaine de chefs de d’Etat et de gouvernement. Ce vœu si cher au leader Mouammar Kadhafi, qui en a fait son rêve, n’a pas entièrement convaincu ses pairs qui, tout en reconnaissant la nécessité d’une telle ambition pour le continent noir, n’ont pas manqué de relever son caractère précipité dans le contexte politico-économique actuel. "Un seul gouvernement, une seule armée pour défendre l’Afrique avec un effectif de deux millions de soldats, une seule monnaie, un seul passeport africain". Voilà ce que voulait le Guide libyen pour l’Afrique.

Convaincu du bien fondé de son initiative pour un avenir radieux de l’Afrique, Kadhafi à mené sur la route du Ghana des opérations de charme et d’influence au Sénégal, au Mali, en Guinée Conakry, en Sierra Leone, au Liberia, en Côte d’Ivoire. "Au Sommet de l’Union africaine d’Accra, c’est la voix des masses africaines, la jeunesse et la femme africaine qui portera et qui déciderait de l’avenir du continent", a t-il expliqué aux communautés et aux chefs d’Etat des pays visités.

"La bataille pour les Etats-Unis d’Afrique est la seule qui vaille pour notre génération, la seule capable d’apporter des réponses aux milles problèmes des populations africaines", a ajouté le président de la Commission de l’Union africaine, Alpha Oumar Konaré jeudi 28 juin lors de la XIe session du conseil exécutif qui a rassemblé les 53 ministres des Affaires étrangères des Etats membres de l’Organisation.

Face à cette vision "d’ici et maintenant" du Guide libyen que beaucoup d’observateurs perçoivent comme un "acte trop précipité", l’Afrique australe, menée par le Sud-africain Thabo M’Béki préconise une union progressive fondée sur la consolidation des acquis et le renforcement des structures d’intégration des ensembles régionaux sur le continent : Union Maghreb arabe (UMA), Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO), Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale (CEMAC), Communauté économique de l’Afrique australe (SADEC)...

Les pays partageant cette même idée estiment que l’Afrique ne peut pas se doter d’un gouvernement fédéral fiable, au moment même où les institutions de l’Union africaine connaissent des difficultés structurelles et le continent en proie à des crises et conflits (Somalie, Darfour).

L’option de la progressivité dans la mise en place d’un exécutif panafricain d’intégration est d’ailleurs celle du Burkina Faso et de nombreux autres pays qui recommandent la prudence pour ne pas prendre des décisions difficilement applicables sur le terrain. "Le débat sur la formation d’un gouvernement pour l’Afrique ne date pas d’aujourd’hui (...). Ce débat a suffisamment prouvé que l’Afrique doit s’unir ou périr. Il nous faut donc réfléchir à la juste voie à emprunter.

L’effectivité et la réussite du processus devant conduire à cette unité impliquent nécessairement la mise en place d’un cadre politique bien articulé, assurant la cohérence et la convergence des objectifs de l’intégration de notre continent", a conseillé le président du Faso, Blaise Compaoré. Néanmoins, le pays des hommes intègres souscrit à l’idée que les Etats africains peuvent, dans un premier temps, fédérer leurs énergies et parler d’une seule voix dans certains domaines tels que l’environnement, le commerce, la santé, les affaires étrangères...

Les dessous d’une réticence

La réticence voire la méfiance, à l’égard du projet de formation d’un gouvernement panafricain ne semble pas s’expliquer seulement par son caractère prématuré. La transformation de l’Organisation de l’unité africaine (OUA) en Union africaine (UA) en 1999 n’a pas produit les résultats escomptés, même aux yeux du principal initiateur de cette réforme, le guide de la Jmahiria arabe libyenne, Mouammar Kadhaffi.

Le président de la Commission de l’Union africaine, Alpha Oumar Konaré, reconnaît que son continent est un spécialiste des décisions à dormir dans les tiroirs. Il a avoué que l’opérationnalité d’un exécutif panafricain voulue à travers la création de la commission n’a pas abouti. "Pourquoi tant de décisions qui ne sont pas appliquées" ? s’est interrogé avec amertume le Malien. L’initiateur du grand débat sur le gouvernement fédéral africain embouche la même trompette, pour dénoncer l’inefficacité de l’Institution panafricaine et de ses organes.

"La Commission de l’Union africaine a échoué, le conseil des ministres a échoué, le parlement africain est un parlement de croupion", a fustigé Mouammar El Kadhafi. Dès lors, l’Afrique du Sud et d’autres pays suggèrent un audit des organes de l’Union africaine, tandis que le président de la commission demande une autonomie des institutions en prenant l’exemple du parlement panafricain qui n’a qu’un rôle consultatif alors qu’il pourrait légiférer. "L’intégration ne doit pas reposer seulement sur des aspects techniques, il faut une volonté politique.

Pour faire avancer la cause africaine, il faut l’affirmation d’un leadership continental", a indiqué Alpha Oumar Konaré. Pourtant des institutions telles la commissions économique des Nations unies pour l’Afrique (CEA) perçoivent dans l’idée du gouvernement africain une aubaine continentale, pour promouvoir le développement. "Ce IXe Sommet est très important et très opportun. Il permettra aux dirigeants africains de partager leur vision commune pour le développement de l’Afrique", s’est réjoui Abdoulie Janneh, secrétaire exécutif de la CEA.

Quarante quatre ans (25 mai 1963 création de l’OUA) après s’être inscrits dans la perspective universelle -l’union fait la force -pour se libérer du colonialisme et de l’apartheid, l’Afrique n’a pu véritablement s’engager sans faux-fuyants sur les chemins de l’unité et de l’intégration, comme l’Europe aux lendemains de la seconde guerre mondiale : Conseil de l’Europe (5 mai 1949), Communauté européenne (25 février 1975), Union européenne (7 février 1992) avec une réelle volonté politique de stabilité, de paix, de libre circulation des personnes et des biens sur le continent.

Bien que le président en exercice de l’Union africaine John Kuffor ait rappelé à ses pairs à l’ouverture du IXe sommet la conviction de Kwamé N’krumah lors de l’accession de son pays à la souveraineté internationale en 1957 : "L’indépendance de son pays n’a de sens qu’à travers une indépendance totale de l’Afrique".

Jolivet EMMAÜS,
Envoyé spécial à Accra


Blaise Compaoré, président du Faso : "Le débat sur le gouvernement africain ne peut être un acte de proclamation"

"Ce Sommet est entièrement consacré à l’accélération de l’intégration et à la discussion sur les modalités de création d’un exécutif panafricain. Bien avant Accra, des débats préliminaires ont eu lieu. Notre position a toujours été de s’inscrire impérativement dans cette accélération.

Nous ne devons pas voir cela comme un acte de proclamation, mais plutôt comme l’aboutissement d’un processus au regard de l’immensité des défis et de la grande variété du continent africain au plan juridique, linguistique, des cultures, de l’histoire des peuples du continent. Il s’agit plutôt de travailler à mettre en place les conditions préalables. Il faut œuvrer à une plus grande stabilisation du continent. On ne peut pas parler d’exécutif panafricain s’il n’y a pas de libre circulation entre nos pays, s’il n’y a pas de bon voisinage (...) Il faut un minimum d’harmonisation des politiques.

Tout cela amène à penser qu’il faut nécessairement une réforme profonde de l’Union africaine, en commençant par sa commission. Cela consistera à donner des pouvoirs exécutifs plus grands, fondés sur le principe de la subsidiarité. C’est d’abord là une base de départ pour envisager la construction d’un exécutif panafricain.

Après, il faudrait aller vers une phase pilote qui consistera à traiter les questions pour lesquelles on a besoin nécessairement de la communauté. Il s’agit des questions de l’environnement, de la défense, de la sécurité (...) Il faut prendre en compte, dans un tel processus, les questions liées à la souveraineté des Etats, à la représentativité d’un tel gouvernement et à sa base de popularité (...)

Propos recueillis à Accra par J.E.

Sidwaya

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Vos commentaires

  • Le 3 juillet 2007 à 21:25, par Tonica En réponse à : > Gouvernement fédéral africain : Accra n’a pas réalisé le rêve

    Pourquoi un gouvernement fédéral africain ? Pourquoi Abdoulaye Wade et son copain pensent que c’est ce gouvernement qui fera avancer l’Afrique ? Pourquoi une marche forcée alors que l’union Européenne qu’ils semblent imiter ne s’est pas convertie du jour au lendemain ?

    Kadhafi, après avoir échoué sur le plan arabe avec ses différentes tentatives d’union avec des pays comme l’Egypte, la Tunisie, etc... n’a pas trouvé mieux aujourd’hui que de nous faire rêver. Il est vrai, l’idée en elle même est tout ce qui est souhaitable pour une Afrique qui sur le plan international est presque inexistante mais, reconnaissons tout de même que si l’idée est la bonne qui soit aujourd’hui, elle est défendue par un très mauvais avocat, Khadafi.

    Pendant qu’il traverse avec sa caravane l’Afrique en distruant de l’argent par ci et par là, il ordonne à l’administration de son pays de renvoyer les africains noirs de son pays. Est-ce qu’il est vraiment sérieux ce monsieur qui dit une chose et fait en même temps son contraire ?

    Aujourd’hui les Africains ont mieux affaire que de participer à cette comédie. Que Khadafi cesse donc de nous amuser car si lui n’a rien à faire, les africains ont d’autres chats sérieux à fouetter. Puisqu’il a perdu le leadership sur le plan arabe, il veut se consoler en pensant pouvoir devenir le prémier président de l’union africaine.

    De grâce, l’Afrique mérite mieux que cette plaisanterie de mauvais goût. Ques ces abrutis cessent de se moquer de nous.

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