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Fonction publique burkinabè : Il faut secouer le cocotier

Publié le vendredi 29 juin 2007 à 07h51min

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Pourquoi pensez-vous que les concours organisés par la Fonction publique réunissent chaque année un nombre si impressionnant de postulants ? Le chômage, surtout celui des jeunes, explique en partie ces ruées. Une fois entré dans la Fonction publique, l’élu est assuré d’un emploi à durée indéterminée.

Le lauréat entame une carrière permanente, sans risque apparent. Des habitudes se créent. Puis, une inclinaison pour la politique de la courte échelle au détriment des voies loyales, naît.

Les sociologues disent que l’environnement façonne l’homme. Le jeune fonctionnaire, à peine titularisé, envie la position sociale de celles et de ceux qui totalisent quinze ans, vingt, voire plus, d’années de carrière. Pour parvenir à ses fins, il est obligé de passer par la magouille et la fraude. Et si l’on n’y prend garde, il ira jusqu’au détournement des biens de l’État. Il veut bousculer les habitudes et les hiérarchies. Il est prêt à tout pour s’attirer les bonnes grâces de ses supérieurs. Notre jeune fonctionnaire devient vite un minable larbin. Devenu le garçon de course du ministre et l’homme à tout faire du directeur général, le bonhomme va créer un vide autour de lui. Il est craint parce qu’il a l’oreille des patrons qui, pour récompenser ses basses oeuvres, le nomment à un poste de responsabilité que ni son niveau, ni son grade, encore moins son ancienneté ne lui donnent droit. Ainsi s’installe le favoritisme dans la Fonction publique.

S’il se trouve un autre qui a pris le chemin contraire du malheureux ambitieux, quelqu’un qui veut, lui, bousculer les choses, mais dans le bon sens par sa ponctualité, sa compétence et sa diligence dans le traitement des tâches qui lui sont confiées, il est mis aussitôt à l’index, isolé. Il devient l’ennemi déclaré d’une partie du personnel à cause des calomnies de son intrigant collègue. Il est muté ailleurs pour ne pas gêner les mauvaises habitudes. C’est ainsi que certains agents honnêtes de la Fonction publique sont affectés à des postes pour lesquels ils n’ont pas le profil.

Voilà les caractéristiques essentielles d’une Fonction publique laxiste. Une Fonction publique où les gens sont payés pour faire tout, sauf ce qu’ils devraient faire. Et cela dure depuis des décennies sans que l’on puisse changer quelque chose. Une Fonction publique inadaptée aux aspirations de développement du Burkina actuel. Qu’on en juge, un instituteur ou un infirmier qui se trouve en dehors de Ouagadougou, et même dans les environs de la capitale, est obligé d’abandonner ses élèves, ses malades pour descendre à Ouagadougou pour régler ses problèmes de carrière.

Pour obtenir la correction sur son bulletin de paie de certaines indemnités officiellement décidées par le gouvernement, ils sont obligés de venir eux-mêmes dans la capitale. On pourrait multiplier les exemples à l’envi. La situation est encore plus dramatique s’agissant des hommes d’affaires qui désirent créer une entreprise ou qui veulent monter une affaire. Ils vont être baladés de bureau en bureau, de service en service, de ministère en ministère pour rassembler les papiers nécessaires. Devant ces blocages, les moins tenaces finissent par se décourager. Ils abandonnent et vont sous des cieux plus favorables.

Les misères faites aux prestataires de services pour obtenir le paiement de leurs factures dévoilent également une partie de la laideur de la Fonction publique. On a la désagréable impression que des hommes éprouvent un malin plaisir à dresser des obstacles sur leurs chemins.

Alors, que faire ? Il faut encourager la politique de privatisation. Certes, les privatisations comportent de grands inconvénients. Mais les privatisations ont cet avantage que chaque agent est utilisé à son poste et au maximum de ses compétences. Dans une entreprise privée, il n’est pas question de déserter le bureau à 10 h pour aller à la recherche du porc au four ou d’une bière fraîche dans la buvette du coin. Dans une entreprise privée, l’utilisation des moyens se fait de manière judicieuse.

Il se trouve malheureusement qu’aujourd’hui, du fait de la politisation à outrance de tous les secteurs de la vie, le laxisme et toutes les habitudes nuisibles dont souffre la Fonction publique sont en train de faire leur nid dans le para-public. On ne peut pas sanctionner, encore moins licencier tel agent parce qu’il est le frère, le beau-frère ou le frère de la femme de X, un bonze du parti au pouvoir. Ce dernier se permettra tout dans l’entreprise : il volera, il détournera, il utilisera indûment les biens de l’entreprise à des fins personnelles, etc. Alors commence la descente aux enfers pour cette unité naguère prospère. Elle finira par fermer, renvoyant des centaines de travailleurs au chômage.

Alors, que faire ? Il faut secouer vigoureusement le cocotier. Il faut stigmatiser le laxisme et toutes les autres mauvaises manières de faire qui gangrènent la Fonction publique burkinabè : affairisme, trafics de tous genres, paresse chronique, absentéisme, etc. Depuis sa nomination le 14 juin dernier, le Premier ministre, Tertius Zongo a initié des rencontres avec les représentants du corps social. Ces rencontres, on l’espère, ont pour but de lui faciliter le travail à la tête du gouvernement. Le Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté que le Burkina Faso a adopté, la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le Développement resteront au stade de voeux pieux aussi longtemps qu’il existera cette Fonction publique où le laxisme et l’affairisme sont des vertus sublimées tandis que la compétence et l’honnêteté sont des vices.

Il faut mettre les travailleurs au travail. Par un discours sincère, vigoureux, le nouveau gouvernement ne doit pas craindre de heurter les esprits en stigmatisant le laxisme et tous les maux qui sont élevés au rang de vertus dans notre Fonction publique. Il faut responsabiliser chaque femme et chaque homme sur sa place dans le vaste chantier du développement de ce pays. Pour survivre dans la jungle de la mondialisation, il faut au Burkina une administration efficace, responsable, patriote et juste. Pour cela, il faut absolument restaurer la "méritocratie" et chasser hors du temple le laxisme, l’incurie, la paresse, le favoritisme et la malhonnêteté.

Le Fou

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Vos commentaires

  • Le 29 juin 2007 à 12:42 En réponse à : > Fonction publique burkinabè : Il faut secouer le cocotier

    Voilà encore un citoyen qui réfléchi. Mais Monsieur je vous donne un cas encore frais et qui mérite beaucoup d’analyses. Des fonctionnaires de notre chere patrie-les agents du ministère des affaire etrangères et de la coopération régionale- ont voulu attirer dans leurs revendications l’attention des decideurs sur cet état des faits. Tenez aux affaires etrangères , des recutements sur mesures nouvelles se font chaque jour sans la mise en compétition des postes vacants de façon officielle de manière à selection des compétences. Ce sont des frères beaux frères , belles soeurs et autres copines qui sont engagés ; pendant ce temps ceux qui terminent leurs formations à l’ENAM ou IDRI sont vu comme des concurrents des directeurs et autres. Ils effectuent les meilleurs missions , sont affectés dans les directions dites à missions quand bien meme qu’ils sont recrutés comme agents de liaison. C’est pour celà que les gens crient à l’injustice et les diplomates qui aiment raser les murs sont allés mentir diffamer. Peut-on developper un pays avec des menteurs,c’est ça etre diplomate ? Je vous soutien dans votre analyse mais que faire ?

    • Le 30 juin 2007 à 10:47 En réponse à : > Fonction publique burkinabè : Il faut secouer le cocotier

      Je comprends la lassitude des honnêtes gens qui voient au quotidien cette injustice ! Le PM a promis de s’attaquer à ce fléau qui donne une mauvaise image au pays des hommes intègres.Il est temps que chacun porte vraiment ce qualificatif de burkina (intègre !).Où se trouve l’intégrité si la magouille, le clientelisme,le favoritisme et j’en passe sont exaltés alors que le travail dans la rigueur, la transparence et la compétence sont relégués au second plan ? Il faut que l’administration soit impartiale et sans reproche.Alors mettons en avant la compétence et le sérieux dans le choix des gens.Le pays a besoin de gens qui ont à coeur le bien commun.Les fonctionnaires doivent être valorisés mais aussi contrôlés.Les manquements doivent être sanctionnés avec la plus grande fermeté.On ne peut pas continuer à couvrir des incompétents et des laxistes parce qu’ils ont des bras longs ou des soutiens de personnes intouchables.les mentalités doivent changer car l’avenir du pays en dépend ! L’amiral

      • Le 30 juin 2007 à 20:36, par internaute anonyme En réponse à : > Fonction publique burkinabè : Il faut secouer le cocotier

        C’est bien de dresser une liste des maux qui minent notre Fonction Publique ! Mais il serait temps de nous rendre compte que l’Etat-Providence, ou du moins pourvoyeur d’emplois pour tous, n’est aujourd’hui qu’un rêve inaccessible ! Mieux encore, même ceux qui ont réussi à intégrer l’Administration Publique sont si mal rémunérés qu’ils sont contraints de mener des activités parallèles pour pouvoir, pour ainsi dire, s’en sortir ! Hélas, oui ! Pour venir à bout de cette crise de l’emploi, il est inéluctable de développer le secteur privé, seul à même d’apporter des solutions satisfaisantes à la crise ! Car, l’Etat ne peut pas donner du boulot à tout le monde ! Quand bien même il le voudrait qu’il ne pourrait pas, faute de moyens ! Il ne peut pas non plus grassement payer ses employés, fautes encore de moyens ! La solution pour qu’ils soient rétribués comme ils le souhaitent tous, c’est que leur nombre soit considérablement revu à la baisse ! Eh oui ! Cette solution déplaît au premier chef, mais c’est hélas le rémède aux mauvais traitements financiers des employés de l’Etat ! En parallèle, l’Etat doit mettre en place un système d’aides, surtout fiscales et financières, à la création d’entreprises ! Seulement, le préalable à tout développement, c’est la stabilité politique, la Paix sociale ! DIEU merci ces conditions sont chez nous réunies ! Faisons en sorte de les préserver, tout en mettant sur pieds
        de meilleures conditions d’accès à l’emploi pour tous ! Qu’en dites-vous ? Merci de votre attention !

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