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Commerce de céréales : Des millions et des difficultés

Publié le samedi 9 juin 2007 à 08h57min

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Domaine d’activités économiques très rentables, le commerce des céréales occupe une place importante dans l’économie burkinabè. La libéralisation du marché depuis 1990 a permis l’essor de cette activité qui connaît cependant des difficultés.

Les céréales occupent une place importante dans l’agriculture et l’alimentation des Burkinabè. Mil, maïs, sorgho, riz, arachides... les spéculations cultivées sont très variées. Au Burkina Faso, huit (8) hectares cultivés sur dix (10) sont ensemencés en céréales, soit un total d’environ 3,4 millions d’hectares par rapport aux cultures de rente pratiquées sur plus de huit cent mille (800 000) hectares (selon des études réalisées en 2002 et 2003). Ces céréales produites chaque année sont collectées en quantité et revendues par les commerçants sur le marché national et régional. Il y a deux catégories de commerçants ou acheteurs au Burkina.

Les commerçants individuels et les commerçants institutionnels (PAM, SONAGES, et certains groupements de producteurs). Les commerçants individuels, les plus connus sont tous des privés qui achètent et revendent des céréales. On y retrouve des collecteurs qui achètent les céréales dans les villages, les commerçants moyens des zones rurales, les grossistes des grandes villes, plus les détaillants et les revendeurs. Depuis les années 1990, l’Etat burkinabè a entrepris un certain nombre de réformes, plus spécifiquement en ce qui concerne sa politique céréalière.

De l’autosuffisance alimentaire, on est passé à la notion de sécurité alimentaire, avec des réformes de politiques commerciales entrant dans le cadre de la libéralisation du marché. Sécurité alimentaire supposant l’accès à l’alimentation en qualité et en quantité à tout moment par les populations. A partir de ce moment, on ne se contentera plus de la production locale, on admettra que les céréales viennent de l’extérieur afin de couvrir les besoins alimentaires des populations.

L’Etat a donc ouvert ses frontières aux pays voisins, leur permettant de vendre leurs productions dans notre pays. La libéralisation du marché a été une aubaine pour les commerçants qui voient s’ouvrir à eux d’autres débouchés. Mais elle n’est pas sans conséquence pour le pays si l’activité est pratiquée de façon anarchique. La définition même de la notion de "libre marché" ne semble pas bien appréhendée par les commerçants. Chacun y va de son interprétation. La libéralisation du marché suppose-t-elle l’exportation des céréales sans aucune restriction ?

El hadj Wango Rasmané, secrétaire général du syndicat des commerçants de céréales pense que c’est le cas. "La loi nous permet d’exporter les céréales comme nous le voulons. Il n’y a pas de canevas qui limite les quantités exportables", explique-t-il. Des études ont pourtant montré que les productions peuvent être excédentaires au Burkina, mais une exportation massive des céréales peut conduire le pays dans une situation de pénurie, comme cela a été le cas en 2005. Une telle exportation des céréales a conduit à une régionalisation du marché. Ainsi les céréales vendues sur le sol burkinabè sont pour la plupart un mélange de céréales venues du Mali, du Niger, de la Côte d’Ivoire ou du Ghana.

Difficultés de la filière

Le manque d’informations sur le marché des céréales constitue une difficulté pour la filière.
Il est important pour les acteurs de connaître les produits, les prix et les différents marchés, les lois et les règles en vigueur. Mais ces informations font souvent défaut, parce qu’elles sont difficiles d’accès, pas assez fiables ou mal diffusées en milieu rural. Les mécanismes de fixation des prix des céréales par exemple sont différents d’une région à l’autre.

Les commerçants pour la plupart analphabètes n’ont souvent pas accès à ces informations, pourtant capitales pour se positionner sur le marché. "Nous n’avons pas de structure qui nous informe sur les prix des céréales. Nous nous informons à partir des commerçants installés dans les différentes régions. A défaut, nous nous fions à la pluviométrie enregistrée dans les régions pour nous faire une idée sur les prix", souligne El hadj Rasmané Wango.

L’accès difficile au crédit est également un handicap pour les acteurs. Principal moyen de financement, le crédit est souvent refusé aux commerçants parce qu’ils travaillent dans le secteur agricole. Selon El hadj Hamado Bougoumpiga, président du syndicat des commerçants de céréales, la plupart des banques qu’ils ont approchées pour des crédits leur ont opposé un refus, parce qu’ils sont organisés en syndicat. "Les banques ne nous font pas confiance. Elles trouvent que nous risquons de ne pas honorer nos engagement à cause de notre organisation en syndicat".

Un autre problème évoqué par les commerçants a trait aux tracasseries douanières. Selon Mme Maïmounata Velegda, directrice générale des Etablissements Velegda, les commerçants rencontrent souvent des problèmes sur les routes avec les agents du service des douanes. Ce problème, dit-elle, est dû à un manque d’information sur la fin de l’interdiction d’exporter les céréales, qui était en vigueur en 2005.

De nos jours, les bons résultats agricoles ont favorisé la levée de cette mesure. Mais Mme Velegda estime que cette information n’est pas parvenue à tous les agents du service des douanes qui, souvent leur font des misères lors des voyages. Elle en appelle aux plus hautes autorités pour que des informations aussi importantes soient largement diffusées.

Les commerçants s’insurgent contre l’attitude de certains responsables du pays qui les écartent délibérément des marchés de l’Etat. "On ne fait appel à nous que lorsqu’il y a une pénurie de céréales dans le pays, afin d’encourager les commerçants à vendre leurs stocks. Mais lorsqu’il s’agit de grands marchés, il n’y a pas d’appel d’offres. Le marché est tout simplement accordé à une personne qui n’exerce pas le domaine", explique El hadj Hamado Bougoumpiga, qui lance un appel pour que des mesures soient prises pour leur permettre de soumissionner à ces marchés.

Toutes ces difficultés évoquées par les commerçants ne permettent pas à la filière de se développer véritablement. Le Comité inter-professionnel des filières "céréales et niébé" du Burkina (CIC-B), structure d’appui aux acteurs de la filière, se propose d’apporter des solutions à ces problèmes, à travers son plan d’action sur les céréales (mil, sorgho, maïs).

Gladys DIENDERE (stagiaire)

Sidwaya

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