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Commémoration de l’abolition de l’esclavage : Quelle France après Chirac ?

Publié le vendredi 11 mai 2007 à 07h54min

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Sarkozy et Chirac

Côte à côte, Jacques Chirac et Nicolas Sarkozy ont participé le 10 mai 2007 à la commémoration de l’abolition de l’esclavage. Un sujet qui a marqué la mémoire collective de l’Hexagone, ancienne puissance coloniale, et celle de ses ex-colonies. La France a décidé, environ 150 ans après l’abolition de l’esclavage, d’accorder à cet acte une journée commémorative.

C’est tout à l’honneur de Paris, et de Chirac surtout, qui a voulu mettre son pays à la pointe du combat contre l’esclavage. La loi Taubira du 10 mai 2001 en est la parfaite illustration, qui déclare l’esclavage comme crime contre l’Humanité. Il appartient désormais au reste du monde de rebondir sur cette occasion pour marquer l’événement, en lui conférant une dimension internationale.

Au-delà du caractère officiel de cette cérémonie, Jacques Chirac rappelle ainsi à Nicolas Sarkozy certains grands principes de ses deux mandats écoulés : une France accueillante, reconnaissant ses erreurs, et qui fait du devoir de mémoire une source de cohésion sociale et de fraternité républicaine.

L’homme qui prendra le 16 mai les rênes de la république française comprendra-t-il tout le sens de cette commémoration ? Pas si sûr.

Bien avant la date de commémoration, Nicolas Sarkozy annonçait déjà les couleurs. Alors ministre du gouvernement, il avait salué l’initiative. Aujourd’hui, il est contre toute idée de repentance. Sacré Sarkozy ! L’homme de la rupture surfe visiblement sur une corde sensible. Le crime contre l’humanité qu’est officiellement devenu l’esclavage a bel et bien des auteurs et des victimes, au-delà des pays et des communautés qui en ont tiré parti.

Chirac "l’Africain" a eu la sagesse de faire face à ce passé douloureux, fait d’exactions, de tortures et de morts par milliers.

Rendre hommage à ces « déportés » n’est pas s’auto-flagéler comme le laisse entendre le nouveau président. Il a certainement peur des désirs de réparations qui pourraient se profiler à l’horizon. A juste raison d’ailleurs. Mais ici, comme il s’agit de l’Afrique, il n’y a pas urgence en la matière. On tente de nous faire croire que les habitants des pays occidentaux (Hollande, Portugal, Angleterre, par exemple) ne se sentent absolument pas concernés par ces revendications, et que ceux qui estiment avoir une responsabilité dans la traite sont extrêmement minoritaires. Pire, on voudrait faire croire que le commerce triangulaire n’a été qu’une affaire de quelques colons ou de quelques trafiquants sans scrupules, et que, de toute façon, il fait aujourd’hui partie de l’Histoire.

Si telle est la vision de « Sarko », la rupture recommande ici que l’on revisite un pan de l’histoire de l’esclavage et de la colonisation. Comparaison n’est pas raison, mais la Shoah était le fait de Nazis illuminés.La vraie histoire de la Shoah n’a-t-elle pas été retracée ? N’a-t-on pas fait payer les traîtres, les collabos ?

La question du dédommagement ne doit pas être éludée. L’esclavage, c’est plus de 100 ans de déplacements forcés, doublés d’une exploitation économique éhontée. C’est suffisant pour faire mal à un peuple et à tout un continent. L’esclavage, c’est peut-être trop loin (150 ans) pour qu’on "exige des fils qu’ils expient les fautes supposées de leurs pères et de leurs aïeux". Mais Sarkozy oublie que la France d’aujourd’hui est la synthèse de tout ce passé, avec ses immigrés non choisis ou choisis, ses Français de souche, ses Harkis et « pieds noirs » et autres descendants d’esclaves. Cette attitude équivoque du président français nous fait croire qu’il aurait pu être partisan de la loi sur les bienfaits de la colonisation. Une loi qui s’est révélée un véritable bide, puisque retirée presqu’ en catimini.

Dans ce cas, on se demande dans quelles dispositions d’esprit le nouveau président va négocier son « union de la méditerranée » avec un voisin comme l’Algérie, s’il n’est pas prêt à solder moralement le passif historique avec ce pays, un chemin qu’indique courageusement Jacques Chirac.

Le président Bouteflika maintient, lui, son exigence de la repentance par rapport aux crimes commis par les Français en 1830 et en 1962.

Le 16 mai, la barque France va appareiller sur les eaux africaines avec comme nouveau capitaine, Nicolas Sarkozy. Va-t-il ramer à contre-courant de son prédécesseur ? On peut le craindre

Le pays

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Vos commentaires

  • Le 12 mai 2007 à 13:38 En réponse à : > Commémoration de l’abolition de l’esclavage : Quelle France après Chirac ?

    Allez, Sarko, un petit effort et beaucoup d’hypocrisie : un soupçon de repentance, ç’est comme... le pardon : ça ne coûte qu’un peu de vanité ravalée, un brin de comédie et de spectacle larmoyant, et le tour est joué. Les partisans et les gogos, dans la gibecière ; les autres, les récalcitrants, vous les tiendrez toujours à l’oeil, vigilant mais... repenti... Repenti et vigilant. Afin que rien ne change. Ah la supercherie du suugri...
    Fretback.

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