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SGS, COTECNA, INTERTEK, BIVAC : Tripatouillages, malversations et scandale ?

Publié le mercredi 28 avril 2004 à 11h27min

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Nous en parlions dans notre édition du 20 avril. Le Réseau
national de lutte anti-corruption (REN-LAC) lève, dans l’écrit
suivant, un autre coin de voile sur ce qu’il qualifie de "scandale
politico-financier" dans le processus d’attribution d’un marché
relatif à la vérification des importations au Burkina. Un cri
d’alarme pour que la plaie ainsi ouverte ne vide totalement le
corps de son sang...

Il y a un scandale certainement politico financier qui couve dans
le processus d’attribution du marché n° 000745 sur la
vérification des importations au Burkina Faso. La presse, le
journal "le Pays" notamment, en a fait écho dans sa livraison
n°3108 du 20 avril 2004. Une société, la Société générale de
Surveillance ( SGS) a été éliminée dans un appel d’offre et les
résultats à ce qu’on dit sont en voie d’être annulés. Attention au
tripatouillage de prédateurs !

L’histoire se passe entre l’administration burkinabé et quatre
grandes sociétés compétentes pour la réalisation du
programme de vérification des importations (PVI) adopté par le
Burkina depuis 1991. Ledit programme se fonde, entre autres,
sur l’idée d’obtenir une amélioration des recettes douanières et
aussi le souci d’assurer le bon contrôle et la qualité des
produits importés. Pour y parvenir, le choix des consultants
présumés capables de réaliser une telle tâche obéit à une mise
en concurrence des propositions de faisabilité. D’où le
renouvellement en 2003 d’un appel d’offre international pour la
sélection d’un consultant pour le PVI..

Quatre sociétés que sont
INTERTEK TESTING SERVICE LTD, COTECNA INSPECTION
SA, BIVAC INTERNATIONAL et SGS Société Générale de
Surveillance SA ont toutes soumis leurs offres dans le cadre de
l’appel d’offre en question, référencé n° 2003-00745/MFB/SG
DEP du 15 octobre 2003.

Le processus, on le connaît, une commission d’attribution de
marché est constituée. Elle délibère sur les offres techniques et
financières et en dresse un rapport d’analyse afin que soit
retenu le prestataire le mieux disant et le plus performant. Et
c’est ce qui fut réglementairement adopté avec la convocation de
la commission d’attribution des marchés
n°2003-086/MFB/DG/DEP du 21 novembre 2003.

C’est
précisément les résultats de cette commission qui sont objet à
querelle, plutôt à tripatouillage, et qui ont fini par semer de
l’indignation dans les milieux avertis.

De quoi s’agit-il ? Dans le dossier technique de la SGS, une
pièce fondamentale exigée de tout soumissionnaire : le certificat
de non-faillite. Selon le rapport d’évaluation des propositions
techniques "le document faisant état de certificat de non faillite
fourni par la SGS est délivrée par un cabinet d’audit international
basé en Suisse du nom de Deloitte & Touche qui se trouve être
le réviseur externe dudit soumissionnaire.

Or les termes de
l’article 8 relatifs aux candidats étrangers exigeait que ledit
document soit délivré par le service national compétent. La
sous-commission a estimé que le cabinet Deloitte et touche
n’est pas la structure nationale suisse compétente pour délivrer
un tel document. Au demeurant l’autorité judiciaire (notaire)
ayant co-signé ledit certificat à la date du 10 novembre 2003
déclare qu’il « …n’assume aucune responsabilité quant au
contenu du présent document » En se référent à l’article 8
suscité, la sous-commission estime que la soumission de SGS
n’est pas conforme aux exigences de la présente demande de
proposition. Cela constitue à ses yeux une carence et se fondant
sur l’article 5 des instructions aux soumissionnaires elle
déclare l’offre de SGS administrativement irrecevable." Est-ce ce
qu’il ne fallait pas faire ?

Le 27 novembre, une explication de SGS adressée au DEP du
ministère des finances et du budget précise que "la SGS
domiciliée en Suisse, ne peut pas présenter d’attestation de
non faillite délivrée par une autorité nationale compétente car
une telle autorité nationale n’existe pas. Les
autorités cantonales (régions) assument la compétence de
rapporter les jugements de faillites". Ce que dément la société
COTECNA (soumissionnaire) en écrivant de Genève le 1er
décembre 2003 au DEP du ministère des finances et du budget.
Extraits de la loi suisse en appui elle affirme que « le code civil
de la loi suisse en son article 9 alinéa 1, de même que l’article
1 de la loi d’application sur les faillites dispose clairement que
seul "l’office des poursuites et des faillites" tient le registre des
faillites et que seules les attestations de cet office font foi des
faits qu’elles constatent".

Plus tard, sur demande d’éclaircissement du DEP du Ministère
des finances et du budget, une réponse du Chef de bureau de la
coopération de l’Ambassade suisse au Burkina à propos des
certificats de non faillite précise ceci : " …l’organisation de ce
domaine relève des cantons.
Dans le canton de Genève, l’office en charge des poursuites et
faillites est l’office des poursuites et faillites. Il est le seul habilité
à délivrer des attestations de non-faillite…aucun document émis
par des organes de contrôle externe ne peut remplacer une
attestation de non-faillite délivrée par cet office."

Ces tribulations n’ont cependant pas empêché la commission
de faire son travail. L’évaluation technique des autres offres fut
faite en passant en revue, entre autres critères de choix :

- l’expérience du consultant dans le domaine des tâches à
accomplir,

- la conformité du plan de travail et l’approche proposée avec
les termes de référence,

- la qualification professionnelle des dirigeants de la société et
du personnel proposé pour le bureau de liaison,

- l’appui un service des douanes

- et enfin l’implantation des sociétés en Afrique de l’Ouest et du
centre et du contexte du pays et de la région.

Au niveau des offres financières, le rapport d’analyse a pris en
compte des critères basés sur le coût de revient des
inspections sur les différents types de marchandises(
spécifique et générales) et la comparaison des honoraires
minima.

Les résultats ont été adressés à qui de droit. L’offre financière
de COTECNA Inspection S.A. fut retenue comme la meilleure les
offres techniques se situant tous dans la fourchette acceptable (
plus de 70/100.)

Extrait du rapport d’analyse des offres financières.

Consultant

Critères
COTECNA
BIVAC
ITS

Montant de la facturation
2 485 483 600 FCFA avec un minimum de 69 000 fcfa par
attestation de vérification.
2 499 186 200FCFA avec un minimum perceptible de 75 000
fcfa par attestation de vérification 2 796 675 000 FCFA

Mais depuis, la publication des résultats se fait attendre
pendant que le contrat SGS est à terme depuis novembre 2003
et que depuis lors le système fonctionne sur un gré à gré qui ne
dit pas son nom.

Les importations, nous le disions dans notre rapport 2003, ont
connu un accroissement sensible depuis les années 1990
passant de 145,8 à 385,97 milliards de FCFA entre 1990 et
1998. En même temps, nous indiquions que cela a donné lieu
au développement de multiples canaux de mauvaises pratiques
sur fond de corruption souvent concoctées dans les rouages
politico-administratifs et commerciaux.

Comment arrive-t-on doucement à une remise en cause des
travaux d’une commission mise en place pour servir l’Etat ?
L’élimination de la SGS dès l’ouverture des offres techniques en
serait pour beaucoup, malgré les premières tentatives de
remise en cause des résultats de la sous-commission
technique, malgré de fortes pressions internes à
l’administration burkinabé et que seuls les membres de ladite
commission peuvent décrire.

Pourquoi le blocage de la proclamation des résultats ?
Et si ce sont les intérêts de l’Etat qui sont visés, alors de l’avis
des spécialistes, les économies réalisées par rapport au
contrat SGS sont évidentes. Des simulations faites sur la base
du contrat actuel montre que l’Etat devrait économiser plusieurs
centaines de millions de FCFA sur la base de l’offre (avant
négociation) de COTECNA ou même celle de BIVAC. Alors
pourquoi viendrait-il, comme on le suppute, à l’idée de
certaines administrations d’annuler les délibérations et de faire
prolonger, de gré à gré, le contrat SGS en attendant d’ici un ou
deux ans un nouvel appel d’offre ?

Cette suite fâcheuse audit appel d’offre explique-t-elle le refus
"malgré les nombreuses lettres itératives de relance…" de la
Direction Générale des Douanes de participer aux travaux de
ladite commission ?
Au Burkina par ces temps de banalisation de la corruption, plus
rien ne surprend dans certains milieux futés dans les pratiques
de la grande corruption.

Les tripatouillages sur les marchés
publics ont un coût et leur pesant d’or dans les circuits mafieux.
Le ministère en charge des finances et du budget est plus
qu’interpellé sur la loyauté dans le traitement de ce nouveau
dossier. Le recouvrement de la fiscalité de porte et les intérêts
du consommateur en matière d’importation sont d’une très
grande importance pour le développement du pays.

Alors, se
débarrasser de tout prédateur de l’intérieur comme de l’extérieur
devrait être un devoir sacré, un acte de citoyen au service du
développement humain durable de son pays.
Le REN-LAC rappelle cela au besoin et demande que pour ce
marché comme pour tant d’autres l’on puisse se débarrasser
des pratiques licencieuses débouchant sur des
enrichissements illicites et autres prises illégales d’intérêts.

Le REN-LAC se propose de publier vos réactions, vos
suggestions, vos dénonciations (si cela est conforme à la
déontologie et à l’éthique professionnelle.) Vos critiques et
suggestions sont les bienvenues.

Pour toutes informations et suggestions contactez-nous à
l’adresse suivante :

Réseau National de Lutte Anti-Corruption (REN-LAC) 01 BP :
2056 Ouagadougou 01,
Tél. : 33 04 73, Email : renlac@renlac.org ,
site : http://www.renlac.org
Tél. vert : (11-22.)

Le Pays

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