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Verdict de la tentative de putsch : Des gorges chaudes à Bobo

Publié le mercredi 28 avril 2004 à 07h23min

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Le verdict du procès sur la tentative de coup d’Etat ne laisse pas
indifférents les Bobolais. Nous avons tendu notre micro en ville
où certains se réjouissent du jugement rendu par le tribunal
militaire. Par contre, d’autres continuent de croire à une
machination et rejettent le verdict.

Ibrahim Ouédraogo : "Le verdict est à la hauteur des actes posés"

Après le procès, je suis maintenant convaincu qu’il y avait un
coup d’Etat en préparation. Et des accusés ont avéré tout ce
qu’il ficelaient. Le capitaine Ouali a même déclaré qu’il voulait
mettre fin à la "Compaorose". Le verdict rendu par le tribunal
militaire n’a pas été très sévère. Il a été à la hauteur des
décisions dans un Etat de droit. Nous sommes dans un pays en
voie de développement, le gouverneur a pris les mesures pour
que nous puissions sortir de ce gouffre et tous les Burkinabè
doivent oeuvrer pour maintenir la paix. Un éventuel coup de force
va mettre à coup sûr ce pays en retard. Nous devons nous
donner la main pour travailler afin de sortir le pays du bourbier
dans lequel il est actuellement.

Yacouba Siribié (Enseignant, Kouka) :"Je refuse le verdict"

Les choses ont été très rapides. On devait chercher à
approfondir les recherches au lieu de se cantonner sur le sort
de ceux qui étaient à la barre. Aujourd’hui, la question se pose
toujours sur l’effectivité du chef d’inculpation, à savoir l’atteinte à
la sûreté de l’Etat. Du reste, il y a eu des points de vue
divergents à la justice. A la fin du procès on a senti que c’était
tout simplement un montage. Comme l’a dit un condamné,
c’était bien monté mais mal ficelé.

Le verdict rendu par le tribunal militaire est trop lourd. Le cas de
Ouali qui est capitaine est illustratif. Après 10 ans de prison
ferme, on se demande bien ce qu’il pourra devenir. Peut-être
que les peines pourraient être revues à la baisse plus tard. Si je
faisais partie des juridictions qui ont statué, je préconiserais
une autre issue. Personnellement, je ne suis pas d’accord et je
refuse le verdict.

P. T (Comptable) : "Il ne faut pas condamner pour condamner".

Lors du procès, Ouali a déclaré qu’il voulait opérer un
changement. Mais je crois que le parquet devait davantage
approfondir les enquêtes pour savoir si ces déclarations n’ont
pas été faites dans la peur. Beaucoup de choses se sont
passées mais il fallait toujours chercher à mieux situer les
propos du capitaine Ouali. La justice burkinabè va trop vite en
condamnant les gens. Cela est dommage. Il ne faut pas
condamner des gens pour les condamner.

Henry Bayala :"La condamnation des putschistes est normale"

Le verdict n’a pas été très sévère. Si cela n’avait pas été le cas,
d’autres frustrations allaient naître. La condamnation de ceux qui
ont déclaré qu’ils voulaient déstabiliser le pouvoir est normale
car leur voie n’était pas légale. Je suis content parce qu’il y a eu
des gens qui ont été acquittés tel que le sankariste Norbert
Tiendrebéogo. Si Norbert avait été conduit en prison, le pays
allait connaître encore des troubles.

Patrice Benkali (Infirmier, :hôpital Sanou Souro) : "La justice n’a pas pu démontrer grand-chose"

Le commun des mortels ne digérera pas les choses par l’angle
sous lequel elles ont été présentées. A la limite, j’ai l’impression
que c’est le pouvoir lui-même qui a ourdi quelque chose pour se
donner plus de crédibilité et attirer l’attention des masses
laborieuses. En ce qui concerne l’effectivité d’un coup d’Etat, je
ne pense pas du tout et la justice n’a pas pu démontrer
grand-chose. Ce sont des gens qui ont été lésés dans leur
carrière et qui ont décidé de se faire entendre. Dans la
hiérarchie militaire, un coup d’Etat suppose qu’il faut être un
grand et avoir ses hommes.

Dans ce cas, ces conditions
n’étaient pas réunies. Ouali qui fait appel au sergent Naon, qui
rassemble ses camarades du RSP en ne leur disant même
pas que c’était un coup d’Etat... Ils ont été sanctionnés par
rapport à leur prise de position avec le pouvoir. La peine est plus
que légère parce que qui parle de coup d’Etat, c’est comme
quelqu’un qui a voulu intentionnellement orchestré un
massacre. S’il s’avérait que les choses sont réelles, 10 ans
pour le cerveau, c’est léger.

L’acquittement de Norbert Tiendrebéogo est bien mérité parce
qu’il ne faisait pas partie du coup. Pour un coup d’Etat qui
n’existait pas, parler d’un civil, chef de parti politique, c’était trop.
Ils ont eu le bon sens en le relaxant sinon sa condamnation
allait entraîner autre chose.

Judith Kiemdé (Journaliste) : "C’est une première au Burkina"

Le procès a été une grande première au Burkina où des
présumés putschistes n’avaient jamais eu la chance de passer
devant les juridictions compétentes. On ne peut qu’encourager
cela et apprécier le verdict prononcé à sa juste valeur. Dix ans
en prison, ce n’est pas facile, mais cela vaut mieux qu’une autre
forme de procès que le pays a longtemps connue. Nous
sommes en démocratie et les gens doivent savoir que la seule
voie d’accès au pouvoir demeure les urnes.

Oumarou Maïga :"C’est un pur montage"

Jusqu’à présent, je ne pense pas à la véracité d’un complot. Un
complot qui se prépare pendant des années est difficile à
concevoir. Donc, tout ce qui découle du procès n’est qu’un pur
montage. Aujourd’hui, on ne doit même pas parler de légèreté
ou de dureté des peines prononcées parce qu’il y a encore
beaucoup de non-dits que le peuple veut savoir. Sinon, moi, je
continuerai à douter.

Propos recueillis par Ousmane Piè OUATTARA
Sidwaya

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