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"Paroles d’honneur" : Ou quand Simone Gbagbo réécrit l’histoire de la Côte d’ivoire (5)

Publié le vendredi 30 mars 2007 à 07h31min

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Simone E. Gbagbo n’aime pas les journalistes français qui sont, dit-elle, "manipulés, persuadés par d’autres des inepties qu’ils colportent". Si elle consacre plusieurs pages à "l’affaire Kieffer", c’est qu’elle implique Michel Legré, "l’époux de [sa] petite soeur". S.E.G. va évoquer cette affaire en quatorze stations (ces "quatorze stations" renvoient, bien sûr, aux quatorze stations du "chemin de croix" suivi par le Christ).

Conclusion de S.E.G. : "J’ai essayé de savoir, de par moi-même, pourquoi Michel Legré avait fait toutes ces déclarations qu’on avait lues dans la presse. J’ai parlé longuement avec lui, sans rien y trouver de satisfaisant. L’enquête non plus, n’aura pas apporté les réponses que j’attends. Michel Legré a-t-il été manipulé ? A-t-il fait preuve de mythomanie ?". S.E.G. n’envisage pas que les hommes du pouvoir puissent avoir une quelconque responsabilité dans cette affaire (si S.E.G. parle de Kieffer, elle n’évoque pas l’assassinat de Jean Hélène, le correspondant de RFI).

Le pouvoir n’a pas de responsabilité dans "l’affaire Kieffer". Ni dans "l’affaire Probo Koala". Pire encore, c’est "un acte d’agression chimique contre notre pays [...] Les intentions sont incontestablement criminelles et visent à provoquer des mouvements insurrectionnels dans le pays". Les responsables sont les "araignées de l’ombre". "Ce sont les mêmes personnes qui ont fait le coup d’Etat en 1999, les mêmes qui sont revenus tenter un nouveau coup d’Etat en septembre 2002. Ce sont toujours les mêmes qui nous font la guerre aujourd’hui. Car qui est Ouattara et qui est Soro Guillaume ? [...] des chefs rebelles [...] reçus à bras ouverts par les dirigeants français [...]. Qui se ressemblent s’assemblent. Certains de ceux qui dirigent la France emploient des méthodes peu recommandables pour arriver à maintenir leur suprématie économique, coûte que coûte [...] Les idées de Laurent Gbagbo dérangent, son ouverture d’esprit, son désir de mieux-être pour l’ensemble de son peuple, son refus de la corruption dérangent [...] Il est devenu "le cauchemar" de Jacques Chirac, tout simplement parce qu’il dit NON à la mise sous tutelle, NON à la recolonisation de son pays. La Côte d’Ivoire était considérée comme un beau gâteau réservé. L’arrivée au pouvoir du "patriote résistant" Laurent Gbagbo, Président atypique, a déjoué les plans de tout ce beau monde. Et "ils " ont orchestré des meurtres, réinventé pogroms et charniers, simplement parce que notre foi dans notre pays et notre éthique n ’étaient pas monnayables".

Selon S.E.G., la tentative de coup d’Etat du 18-19 septembre 2002 a "bénéficié d’un très gros budget, des dizaines de millions d’euros. Cette opération ne peut avoir été commanditée que par de puissants soutiens. Les actions avaient dû être bien planifiées et bien réglées dans leurs détails". S.E.G. s’interroge : " Quels principes ont pu conduire le gouvernement de Chirac à soutenir des rebelles en Côte d’Ivoire ? " alors que des rebelles ivoiriens "avaient été entraînés sur le sol du Burkina Faso voisin". S.E.G. ajoute : "On entend encore des hommes politiques français dire "qu’Alassane Ouattara fait partie de ces hommes qui font honneur à l’élite africaine". Pitié pour la France ! Pitié pour la Côte d’Ivoire ! Pitié pour l’Afrique !".

Nous venons de passer le cap des 330 pages et l’essentiel est dit : Ouattara est le "fléau" qui depuis 1990 ne cesse de multiplier les actions en vue de conquérir un pouvoir qui lui est refusé. Ses complices sont Blaise Compaoré et Jacques Chirac. L’un forme les mercenaires ; l’autre organise la déstabilisation médiatique de la Côte d’Ivoire. Ceci étant dit, il reste encore 250 pages pour enfoncer le clou.

1 - "Toutes les initiatives de paix à partir de Marcoussis, Kléber, Accra, Pretoria, Abuja, Addis Abeba, New York, n’auront été engagées ou, tout au moins, n’auront produit comme effet que le dépouillement progressif de Laurent dans le seul but d’opérer un transfert du pouvoir à un homme du choix de la France ".
2 - "L’ONU s’est toujours alignée automatiquement sur les positions de la France concernant la Côte d’Ivoire".
3 - "Les rebelles ne craignent rien. Ils se sentent soutenus par la France, par l’ONU, par l’opinion internationale".
4 - "Seul le président Thabo M’Beki, médiateur désigné par l’Union africaine, a pu élever la voix pour démontrer que le président de la République de Côte d’Ivoire avait réalisé toute sa part de tâche exigée par la Communauté internationale".

S.E.G. va alors revenir sur les accords de Marcoussis. Ils sont, dit-elle, "mauvais". "Ils n’auraient jamais dû être signés ni même proposés. Les représentants du FPI, mon parti, les ont signés, mais ils ont eu tort de le faire". Ces accords ont permis de faire entrer au gouvernement des "individus sans aucun niveau intellectuel, sans aucune culture politique (cuisinier, frigoriste, sans même un certificat d’études primaires)" . Seydou Diarra a échoué ; Charles Konan Banny aussi ("Chaque Premier ministre, "autorité " investie par la communauté internationale, s’est mis à se prendre pour "l’Autorité" suprême de l’Etat, le chef de l’Etat ne devenant plus qu’un être "tout juste toléré" pour le maintien de la paix sociale").

Si Gbagbo a été amené "à accepter de s’inscrire dans le processus arrêté à Linas-Marcoussis" c’est qu’il ne pouvait pas y avoir de solution militaire à la guerre, l’armée ivoirienne comptant, "en son sein des félons que grâce à Dieu nous avons pu identifier". L’échec de Marcoussis va donc conduire la France à mener son action contre la Côte d’Ivoire dans le cadre de l’ONU. Objectif : "Que la Côte d’Ivoire devienne progressivement un pays placé sous la tutelle directe de l’ONU, c’est-à-dire la France. Mais la Côte d’Ivoire n’est pas le Kosovo. Et Dieu soutient les faibles ! Le diable, nous disent les Saintes Ecritures, est persévérant dam la défaite. Et la France de Chirac va persévérer".

Sur la résolution 1721, S.E.G. va délirer "grave" comme diraient mes enfants. "L’intervention de Dieu se fit de façon extraordinaire et puissante à travers la contestation de quatre membres permanents du Conseil de sécurité sur cinq et de la Tanzanie, membre non permanent [...] Le débat sur le principe du respect de la Souveraineté et de la Constitution d’un pays a donc connu une conclusion heureuse. Mais à part cela, la résolution 1721 est un mauvais texte. Elle contient des dispositions qui violent la Constitution ivoirienne et qui visent à créer, à la tête de l’Etat, une dyarchie, un bicéphalisme, nuisible. Elle ne peut que semer dans le pays un désordre dont le pays n’a pas besoin en cette période où, au contraire, toutes les énergies doivent être mobilisées pour reconquérir et rétablir la paix sur l’ensemble du territoire ".

Pour expliquer le jeu trouble de la communauté internationale et, tout particulièrement, la France, S.E.G. va revenir sur l’opération "César" lancée le 4 novembre 2004 par Gbagbo pour permettre la reconquête du Nord par les troupes du Sud. Après trois jours de bombardement des bases rebelles, les troupes gouvernementales étaient aux portes de Bouaké et allaient libérer Bouna, Odienné, Korhogo et Danané. C’est alors qu’un obus non identifié serait tombé "par mégarde " sur le camp français de Bouaké : huit soldats français et un ressortissant américain (dont on ne sait toujours rien - S.E.G. souligne : "On ne sait pas ce qu’est devenu le corps de la victime américaine, ni qui il était. Pourquoi ?" ) sont tués. Réplique immédiate : l’armée française détruit "l’aviation" ivoirienne sur l’aéroport de Yamoussoukro.

A suivre

Jean-Pierre BEJOT
La Dépêche Diplomatique

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