LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Que retenir de la Conférence de l’OMC sur le coton ? Une contradiction dans les termes ?

Publié le mercredi 21 mars 2007 à 07h47min

PARTAGER :                          

Une conférence sur l’aide au coton à l’OMC... A première vue, il y a quelque chose de contradictoire dans les termes. D’aucuns diront que ce n’est pas le rôle de l’OMC de s’occuper de l’aide, que d’autres enceintes et organisations sont bien plus appropriées pour traiter ce genre de sujet.

Et ils n’auraient pas tort. Toutefois, à l’origine, cette conférence devait porter sur la cohérence entre le commerce et l’aide. A ce titre, l’OMC retrouve déjà une plus grande légitimité à organiser et héberger un tel événement.

Bien que tout le monde sache que les subventions des pays riches constituent la principale épine dans le pied des producteurs de coton africains, les pays développés ont cherché à vider la conférence de sa substance commerciale et à focaliser la discussion sur l’aide, arguant du fait que l’on ne pouvait pas discuter de la négociation en dehors de la négociation. Ils n’ont d’ailleurs pas envoyé de représentant de haut niveau pour le commerce, pas plus que pour l’aide d’ailleurs.

Or, de quel autre cadre que l’OMC peut-on rêver pour traiter de la cohérence entre commerce et aide, dans les politiques multilatérales et nationales autant au Sud qu’au Nord ? Ce refus ne traduit-il pas une forme de contradiction, ou une volonté à peine cachée d’éviter d’entrer dans le vif du sujet ?

Qu’a cela ne tienne, les représentants des pays africains se sont contentés de la possibilité qui leur été donnée de pouvoir au moins parler de l’aide, en rappelant que cette dernière ne pouvait être qu’additionnelle et non substitutive à une solution commerciale.
Des discussions polies mais stériles ?

Les discussions sur l’aide se sont focalisées sur la formulation des programmes et projets dans des tableaux récapitulatifs. Les membres se sont accordés sur la nécessité de reformuler ces documents, ce qui devrait permettre de se faire une idée plus juste de l’aide effectivement disponible pour le coton. En aucun cas cela ne signifie que les donateurs ont fait des annonces sur une éventuelle aide additionnelle. Ils ont plutôt tenté de focaliser leurs propositions sur des mécanismes de gestion des risques et des prix, dont la mise en place pourrait être intéressante si les filières coton africaines étaient saines mais qui ne répondent pas aux besoins urgents des pays producteurs aujourd’hui.

Verre à moitié plein ou à moitié vide ?

Si les résultats de la conférence ne sont pas à la hauteur des problèmes abordés, la satisfaction doit néanmoins se mesurer à l’aune des objectifs formulés. En effet, des clarifications vont être apportées en matière d’aide et des mécanismes de soutien à la filière coton sont à l’étude. De plus, et ceci n’est pas le moindre des résultats, il a été rappelé qu’il ne pourrait y avoir de conclusion de Doha sans solution pour le coton. Pascal Lamy a d’ailleurs insisté dans ses conclusions sur le fait que le coton constituait un « test quant à la dimension développement du cycle de Doha et par conséquent quant à l’urgence d’un accord ».

Une fois de plus, les délégations des pays africains fortes de nombreux ministres - 13 en tout, du Commerce et de l’Agriculture - ont fait la preuve de leur engagement sur le dossier coton et de leur confiance dans le système multilatéral. Ils auraient mérité que les pays occidentaux leur envoient des interlocuteurs de même envergure. Car c’est en effet au niveau du traitement de la question commerciale que la conférence a failli. Parent pauvre de la Conférence, la discussion sur le noeud du problème s’est trouvée reléguée au sein d’une simple séance d’information sur l’état de la négociation agricole.

Il faut toutefois saluer l’intervention de l’Argentine qui a démontré que la proposition de Farm Bill américaine dans sa forme actuelle violerait les engagements de l’OMC envers le coton. Et il y a fort à craindre que la version du Congrès soit encore plus dure que la proposition actuelle.

Conclusion

Tout le monde s’est accordé sur les deux sources du problème du coton : les subventions d’un côté, la crise de la filière de l’autre. Dans la conférence de presse qui a suivi la manifestation, Pascal Lamy a répondu aux journalistes qu’en tant que directeur général de l’OMC, il s’occupait principalement du dossier des subventions mais qu’il ne pouvait dire quelle proportion elles représentaient dans le problème global.

Lamy a également déclaré que les participants avaient pu glaner de « l’énergie politique » pour faire avancer le dossier. Est-ce que ce sera suffisant pour que le coton incarne réellement la dimension développement du Cycle de Doha ? Dans l’attente d’une « percée multilatérale » initiée par un accord entre le G4, les regards vont se tourner avec encore plus d’insistance vers les Etats-Unis qui se refusent à abattre les cartes qu’ils ont en main (prix agricoles en hausse, renégociation de la Farm Bill, etc.) et qui devraient logiquement leur permettre de proposer une offre acceptable à l’OMC et politiquement peu couteuse au niveau national....

IDEAS Centre, 10, rue de l’Arquebuse,
1204 Genève, Suisse
T +41 22 807 17 40, F +41 22 807 17 41
www.ideascentre.ch .

IDEAS Centre offre des services de conseils de politique générale aux gouvernements des pays en développement et en transition dans les domaines du commerce international, du développement et de la gouvernance économique. En liaison avec l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC), IDEAS Centre aide les pays à faibles revenus à défendre leurs intérêts commerciaux et ainsi à mettre à profit leur appartenance à l’OMC d’une manière favorable à leur développement.

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique