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Grandes funérailles bobo : la période des masques

Publié le lundi 19 avril 2004 à 10h07min

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Le mois d’avril est généralement consacré aux grandes funérailles en terre Bobo Mandarè. C’est la sortie des masques dans les quartiers habités par les autochtones de Bobo-Dioulasso et aussi dans les villages environnants où se pratique le culte du Dô. Au quartier Kuinima (secteur 6), les grandes funérailles ont coïncidé cette année avec la fête de Pâques.

On distingue différentes sortes de masques chez les Bobo Mandarè : les masques en lianes herbacées, les masques en fibres, les masques en feuilles de palmier et les masques en tissu. Parmi eux, il y en a qui sortent de jour et ceux appelés "Logwè" qui ne font leur apparition que la nuit. Les masques bobo, zoomorphes pour la plupart, représentent des animaux tels que le buffle, l’antilope, le singe, le coq, l’épervier, etc.

Chez les Bobo Mandarè, quand quelqu’un meurt, il y a ce qu’on appelle les "funérailles fraîches", c’est-à-dire le rituel par lequel le mort est conduit à sa dernière demeure. Quand il s’agit d’une personnalité importante comme par exemple un chef de la société des masques, il y a la présence de ceux-ci pendant l’enterrement. Pour les autres, les masques paraissent seulement le troisième jour du décès.

Il y a également les "funérailles sèches" ou grandes funérailles. Ce sont des manifestations collectives à l’intention de toutes les personnes décédées au cours de l’année ou pendant les deux dernières années. Ces manifestations donnent lieu à des cérémonies liées au culte du Dô. Les masques sortent et dansent sur les places publiques du village. Suivent après les ripailles et beuveries.

N’importe qui ne peut avoir droit à des funérailles avec sortie de masques. Il faut être une notoriété du village, avoir un certain âge et surtout être initié au culte du Dô. Les masques peuvent également sortir pour honorer la mémoire d’une personnalité n’étant pas d’ethnie bobo, mais qui mérite du respect au regard des actes posés de son vivant. Seulement, il ne faut pas que le défunt soit musulman ou protestant, religions qui n’admettent pas cette pratique qu’elles considèrent comme de l’idolatrie.

Les masques en lianes, ceux en fibres et en tissu ainsi que les "logwè" se promènent le fouet en main, et gare à "l’intrus" qu’ils croisent en chemin. Ne sont épargnées que les personnes adultes ou très âgées et celles initiées au langage des masques.

C’est pourquoi en cette période des grandes funérailles, la prudence est recommandée à toute personne voulant se rendre dans des quartiers comme Dioulassobâ, Kuinima, Tounouma, Dogona, Bindougousso et Kua où résident les autochtones Bobo.

Les masques sont un phénomène attrayant et leur sortie draine toujours des foules de curieux. Ce sont surtout les jeunes gens (filles comme garçons) et parfois de grandes personnes qui provoquent les masques et prennent plaisir à se faire pourchasser. En quelque sorte, pour eux, c’est faire du sport car il faut courir et courir encore pour échapper au fouet de leurs poursuivants. Malheureusement dans la mêlée, un accident est vite arrivé, dû soit à des chutes de personnes, soit causé par un véhicule ou un engin à deux roues en raison de l’encombrement de la voie par la foule. Il y a aussi des blessures graves occasionnées par les coups de fouet. Parfois, la situation peut dégénérer en conflit avec des conséquences fort regrettables. Autant d’inconvénients qui font que certains redoutent, à raison, la période des grandes funérailles, notamment ceux qui sont à proximité des quartiers bobo. Malgré tout, les badauds n’en démordent pas et prennent d’assaut les lieux où se produisent les masques afin de les provoquer. A noter au passage que les écoles et établissements secondaires situés dans les quartiers à risques se voient obligés de cesser les cours pendant la période des grandes funérailles.

Quant aux masques en feuilles de palmier appelés "Koro" en bobo et "Logwè" en dioula, ils ne sortent que vers la tombée du jour et dansent parfois jusqu’à l’approche du matin. C’est pour avoir de la pluie que les Bobo ont recours à ce masque particulier. Sa sortie intervient en hivernage quand la saison tarde à s’installer. Dans les années 60 et antérieurement, le "Koro" pouvait atteindre au moins 10 mètres de haut, mais depuis l’électrification des quartiers de Bobo-Dioulasso, sa taille a été considérablement réduite afin de faciliter son passage sous les fils électriques. Selon des témoins, ce masque une fois sorti, ne rentrait jamais sans avoir été battu par la pluie. Seulement au regard des sécheresses successives qui ont sévi dans notre pays, on se demande si le masque "Koro" a gardé encore le pouvoir de faire pleuvoir.

Enfin, il faut souligner qu’après la fin des grandes funérailles, c’est le début des travaux champêtres communément appelé ici "levée de la daba". C’est en ce moment que sont préparés les champs dans l’attente des pluies. D’ici là, espérons que la période des masques se termine cette année sans incident.

Sibiry KONE
Sidwaya

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