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Dialogue direct ivoirien : La normalisation politique et institutionnelle en marche

Publié le mardi 6 février 2007 à 08h37min

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Désiré Tagro

Après les préliminaires qui ont consisté pour le médiateur Blaise Compaoré à rencontrer tour à tour les protagonistes du dialogue direct ivoirien, celui-ci a commencé à prendre forme, lundi 5 février 2007 à Ouagadougou, sous le magistère de Blaise Compaoré. Une entame prometteuse, à entendre les uns et les autres à la sortie de ce premier tour de table.

Nous avons juste souhaité la bienvenue aux deux délégations et leur avons rappelé leur responsabilité historique dans la crise ivoirienne et indiqué que nous attendons d’elles qu’elles puissent être constructives. Aussi, nous avons fait une évaluation des modalités et des thèmes qui pourront être traités ainsi que les mécanismes qui vont nous permettre d’obtenir des accords et nous éviter de tourner en rond comme cela s’est passé à différents moments.

Le débat contradictoire n’a pas commencé et nous allons essayer d’écouter longuement chaque partie afin qu’elle nous fasse des propositions sur les situations de blocage que nous observons". Ces propos mesurés, quoique pleins d’optimisme du médiateur Blaise Compaoré à la sortie de la séance inaugurale du dialogue direct ivoirien, laissent augurer d’une suite enchanteresse pour la normalisation politique et institutionnelle en Côte d’Ivoire.

Ce, d’autant que de Désiré Tagro, conseiller spécial du chef de l’Etat ivoirien, qui conduisait la délégation présidentielle, à Sidiki Konaté, directeur de cabinet de Guillaume Soro et porte-parole des Forces nouvelles, le ton était à l’optimisme, même si les deux hommes ont été peu diserts dans la matinée d’hier. "J’ai foi au dialogue sinon je ne serais pas là", a indiqué Désiré Tagro pendant que Sidiki Konaté annonçait qu’ils allaient "travailler" tout en nous enjoignant de "rester à l’écoute".
"Nous avons reçu la matière première et je suis confiant quant à la suite", terminera-t-il, avant de prendre le large.

Rien que des vibrations positives en somme, ce que l’on subodorait depuis que Désiré Tagro s’était déplacé il y a une décade à Bouaké pour y rencontrer Guillaume Soro, secrétaire général des Forces nouvelles. Un symbole fort que cette visite si tant est qu’une personnalité de ce rang du camp présidentiel ivoirien ne s’était pas rendu dans le fief des "rebelles" depuis belle lurette. Qui plus est, les invectives et autres "amabilités" que les deux camps se lançaient par presse interposée, avaient fini de pourrir une situation déjà délétère.

La normalisation était déjà en marche sous l’égide de Blaise Compaoré, car il faut rappeler que cette visite de Tagro est intervenue après que le président du Faso eut été mandaté par ses pairs lors du Sommet de la CEDEAO pour conduire la médiation pour une sortie de crise rapide en Côte d’Ivoire. Tagro savait qu’il n’y avait pas ou plus le "feu" du côté de Bouaké et que tout serait mis en œuvre pour que son séjour y soit paisible.

Pour autant, les divergences ne sont pas totalement aplanies, la principale étant cette question de l’identification qui met les nerfs des protagonistes à fleur de peau. "Il ne faut pas brader la nationalité ivoirienne au motif que l’on veut la paix", voilà le leitmotiv du camp présidentiel. Lequel, décrypté, laisse entendre que les audiences foraines ne doivent pas être des "foires" où l’on refile le certificat de nationalité à des "étrangers".

Cette question de nationalité qui fâche

Voilà qui nous replonge mutatis mutandis dans la situation de 1964 lorsque le projet de double nationalité entre ivoiriens et burkinabè avait fait des gorges chaudes des deux côtés de la
frontière avant d’être annulé.

Quant aux Forces nouvelles, elles n’ont de cesse d’affirmer que "la guerre du 19 septembre 2002 est la révolte des sans-papiers" dixit Sidiki Konaté (leur porte-parole). Il existe de ce fait un écart important entre les estimations des deux camps sur lesdits "sans-papiers". Les partisans de Gbagbo estiment qu’il n’y a guerre plus de 200 000 à 500 000 personnes à recenser, alors que les Forces nouvelles parlent au bas mot de deux millions de personnes.

Parmi lesquelles, beaucoup sont armées et n’entendent pas se laisser désarmer sans contrepartie. "Papiers contre kalachnikovs", voilà caricaturé le "deal". Lequel une fois accepté conduira automatiquement à un "new-deal" pour la Côte d’Ivoire. Il va falloir un dépassement de part et d’autre pour ne voir que l’intérêt supérieur de la Côte d’Ivoire, qui est comme chacun le sait, une mosaïque de peuples et de cultures.

Une mosaïque menacée "d’effrondement" ainsi que l’indique un communiqué du camp présidentiel, au regard des "graves problèmes qui la minent aujourd’hui du fait de la guerre et de la partition du pays". Insécurité, chômage, délabrement des infrastructures, grippage du système scolaire, déficience des services de santé, voilà les symptômes les plus visibles du mal ivoirien.

Il y a donc urgence, et, le "docteur" Compaoré malgré toute sa bonne foi et sa disponibilité ne pourra soigner le mal, si les Ivoiriens n’acceptent pas de se mettre ensemble dans le respect des différences. Si cela advenait, la crise sera automatiquement résolue, car la poudrière est avant tout identitaire.

Boubakar SY

Sidwaya

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