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ONU : Kofi Annan part la tête haute

Publié le vendredi 15 décembre 2006 à 07h42min

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Kofi Annan

Pendant dix ans, sa silhouette élégante a occupé les médias, tant il était sous les feux de la rampe. A cette apparence extérieure attrayante de Kofi Annan, se greffe un caractère profondément empreint d’humanité. Ceux qui le connaissent lui attribuent de nombreuses qualités : calme, affabilité, sincérité...

C’est ce personnage aux allures de gentleman qui a été propulsé un jour de 1997 à la tête de l’Organisation planétaire. En même temps, il mettait pied dans un monde impitoyable qu’il a côtoyé certes tout au long de sa carrière au sein du Système des Nations unies, mais qu’il découvre avec un nouveau regard et une nouvelle responsabilité.

Tout de suite, il est projeté dans les secousses d’une humanité en proie à toutes sortes d’épreuves et qui attend de lui les remèdes à ses maux. L’insigne honneur qu’il a eu de traverser un nouveau siècle avec l’ONU ne lui a pas moins compliqué la tâche au regard de l’emballement de l’actualité, de l’explosion de nouveaux conflits et fléaux, de la crise du système des relations internationales. Mais en 2001, le locataire de la maison de verre de New York recevra le prix Nobel de la paix, preuve qu’il a su imprimer sa marque à la marche du monde.

Kofi Annan n’oubliera sans doute pas de si tôt l’invasion américaine de l’Irak à laquelle il s’est opposé en vain. Cet acte de belligérance a terriblement fragilisé l’ONU et mis en péril le droit international. Le secrétaire général est sorti bien sûr affaibli de son bras de fer infructueux même s’il avait le soutien de la plupart des pays du Sud paniqués à l’idée de subir un jour le sort de l’Irak sans pouvoir compter sur un secours quelconque.

Cinq ans après, les faits lui donnent davantage raison : l’Amérique est embourbée jusqu’au cou en Irak, les dégâts sur les populations et les infrastructures indescriptibles. Vilipendé hier par l’Administration Bush, Kofi Annan, qui a le beau rôle aujourd’hui, ne se prive pas de critiquer l’unilatéralisme américain. Dans son discours d’adieu, lundi dernier, il a simplement cité l’ancien président américain Harry Truman : "La responsabilité des grands Etats est de servir et non de dominer les peuples du monde..."

A 68 ans, le premier secrétaire général originaire de l’Afrique noire que l’ONU ait eu, part donc sans trop de regrets. Parce que ses échecs (comme ses succès) sont

en grande partie imputables aux puissances qui régentent ce monde. Lui-même l’a avoué, "aucune de nos institutions mondiales ne peut grand-chose quand les Etats-Unis se tiennent à distance". Pour le cas de la réforme jamais aboutie du Conseil de sécurité, les Etats-Unis ne se sont pas tenus à distance ; ils ont purement et simplement bloqué le projet.

Il faut avouer que la bonne volonté du secrétaire général a souvent été contrariée par la mainmise des grands pays sur les organes de l’ONU, surtout sur le Conseil de sécurité dont ils ne veulent pas la réforme, gage d’un minimum de justice pour les autres nations qui ne sont pas moins dignes de détenir le droit de veto. Le dossier israélien est à ce titre un véritable casse-tête puisque les Etats-Unis brandissent systématiquement la menace du veto quand leur protégé est sous le coup d’une sanction. Et quand il arrive que des résolutions, édulcorées jusqu’à l’extrême, soient prises, elles font l’objet d’un mépris total de la part d’Israël.

Malgré ces difficultés, Kofi Annan peut s’enorgueillir d’un bilan globalement positif qui bat en brèche tous les clichés réducteurs sur l’incapacité des Noirs à assumer certaines fonctions. Son combat en faveur du développement, ses initiatives dans la lutte contre le Sida, ses actions de paix comme en République démocratique du Congo, arrivent à contrebalancer les piétinements au Darfour et en Côte d’Ivoire.

De la part d’un Africain accédant à cette haute fonction avec des préjugés sur le dos, il est incontestable que le secrétaire général sortant laissera une marque indélébile dans les annales de l’Organisation mondiale, en ce sens qu’il a pu briser tous les tabous et surmonter les adversités pour faire valoir ses qualités de diplomate, d’homme tout simplement.

On l’a surtout vu, au cours de son second mandat, s’affranchir de la tutelle encombrante des grandes puissances, pour se mettre résolument à l’écoute des plus faibles. Cela lui a valu de recevoir des coups à travers les tracasseries faites à son fils, dans le dossier "pétrole contre nourriture" de l’Irak. Mais tout affranchissement a un prix et Annan n’a pas eu peur de le payer, pour partir la tête haute, en homme libre et digne.

Le Pays

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