LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Soyez un repère de qualité. Certaines personnes ne sont pas habituées à un environnement où on s’attend à l’excellence.” Steve jobs

Rébellions tchadienes : Contre l’ennemi commun, en avant !

Publié le vendredi 27 octobre 2006 à 08h24min

PARTAGER :                          

Idriss Déby Itno

A l’image du roseau qui plie mais ne se rompt pas, le régime d’Idriss Déby Itno fait l’objet depuis plusieurs mois d’attaques de rebelles, (comme pour dire contre l’ennemi commun en avant !) lesquelles n’empêchent pas l’ancien com’chef d’Hissène Habré de dormir.

Ainsi le 14 avril 2006, les forces militaires fidèles au maître de N’Djamena arrêtaient la progression de rebelles du Front Uni pour le changement (FUC). En fait, depuis le début de cette année, le pouvoir tchadien essuie estocade sur estocade : si ce ne sont pas les rebelles qui prennent certaines villes, ce sont des tentatives de putsch, tel celui du 14 mars 2006.

En bon militaire, Idriss Itno Déby a riposté, et même contre l’avis de la communauté internationale, a organisé une présidentielle le 3 mai dernier d’où il est sorti vainqueur.

Mais il faut dire que depuis un certain temps, un impératif catégorique anime le Socle pour le changement, l’unité nationale et la démocratie (SCUD) : le départ par tous les moyens du tombeur d’Hissène Habré. Et à l’évidence, ces rebelles privilégient la force, pour déloger Déby de N’Djaména.

Si ce scénario des adversaires du président tchadien se réalisait, personne ne le regretterait. Déby en effet n’est pas non plus un enfant de chœur. Parvenu au pouvoir en décembre 1990, l’homme s’était d’abord illustré auparavant lors du célèbre "septembre noir" en 1984 où les rebelles ralliés (codos) furent exterminés avec des civils, sans oublier le massacre des chefs de village du canton de Goré dans la région du Logre occidental au Sud du Tchad.

Ce qui fera dire à une coalition d’opposants dans un mémorandum publié en septembre 1999 que "la politique délibérée du président Déby consiste en l’utilisation systématique et ouverte de la liquidation physique comme moyen de résolution des contradictions politique" (1).

Avec donc des "Beria" tchadiens, (2) Déby Itno dirige le Tchad avec le bâton, et ça marche. Et pour cause, le pipeline Doba-Kribi constitue de nos jours un parapluie à la limite increvable pour l’homme fort du Tchad. Les conglomérats pétroliers genre Exxon, Shell et surtout Elf sont bienveillants envers lui, car après tout, l’or noir vaut bien quelques misères à des opposants ou rebelles, voire leur élimination physique.

De ce fait, le Tchad, désormais émirat pétrolier, suscite les convoitises. L’axe Washington-Paris voudrait bien se débarrasser de ce président perpétuellement aux prises avec des rebelles qui ne désarment pas, mais jusqu’à présent, le premier des Tchadiens fait l’affaire.

Ce n’est donc pas étonnant qu’après les bisbilles avec la Banque mondiale, sur les royalties dévolues aux générations futures, tout est rentré subitement dans l’ordre puisqu’il y a eu la main levée sur ces fonds qui dormaient à la Citibank (Londres) permettent à Itno Déby de s’acheter des armes contre des rebelles trop prétentieux.

Autant dire que le maintien au pouvoir de Déby Itno passe avant le sort des générations futures. Actuellement, selon certains observateurs du microcosme tchadien, c’est moins les tirs sporadiques des rebelles qui semblent inquiéter Déby que la désertion de certains de ses fidèles lieutenants. Le ver est à l’évidence dans le fruit et les rebelles appartiennent désormais au clan Déby, notamment les Zaghawa, particulièrement le sous-groupe des Bideyat.

Aussi en est-il du lieutenant-colonel Daoud Ali de l’escadron blindé d’Adré, ou encore du colonel Ali Orozi, ancien commandant de la région militaire de Bardai. Pire, la défection des frères jumeaux Timine et Tom Erdimi est symptomatique qu’il y a bel et bien une implosion du système Déby, en dépit de la dissolution de la garde républicaine et des mouvements à la tête des corps d’armée, concoctés par le président tchadien.

Autre boule chevillé au pied de Déby Itno, le dossier du Darfour. Selon les autorités de Kartoum, il existe une "connexion Zaghawa" soutenue à bras-le-corps par le chef de l’Etat tchadien qui font le coup de feu contre les dirigeants du Soudan. Ce qui, en pareille cas, provoque la loi de la réciprocité et de ce fait Khartoum tend une oreille attentive aux adversaires armés du président du Tchad.

Le missile lancé contre un avion français la semaine dernière est un signe que de plus en plus, cette coalition de rebelles reçoit un coup de pouce quelque part, d’où les brouille-reconciliations entre les deux pays.

Pour le moment, Déby Itno bénéficie d’un gilet parabole et quel gilet ! l’or noir ! Et encore il croit en son étoile quand il déclara, il y a à peine un an : "Ce n’est pas parce que Idriss Déby a marché sur N’Djaména à partir de l’Est que n’importe quel aventurier va faire la même chose". Le SCUD et autre FUC n’ont qu’à se le tenir pour un défi et un avertissement.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Notes :

(1) : Mémorandum sur la crise politique au Tchad (septembre 1999) signé du Mouvement pour la démocratie et la justice au Tchad (MDJT) du Mouvement pour la démocratie et le développement (MDD) et du Conseil démocratique révolutionnaire (CDR).

(2) Béria : homme à tout faire sous Staline en Russie et artisan des basses besognes, du père du "petit peuple".

L’Observateur Paalga

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique