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Crise ivoirienne : Une dramatique comédie

Publié le jeudi 19 octobre 2006 à 08h26min

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Laurent Gbagbo

Parlant de crise dans son pays, le président Laurent Koudou GBAGBO aime répéter à qui veut l’entendre : « Nous sommes fatigués ».

Ceux qui avaient cru que cette phrase présidentielle augurait un adoucissement des positions de son camp, ont par la suite compris que loin d’être fatigués, GBAGBO et les autres principaux acteurs de cette crise se sentent bien à l’aise dans la situation. Des acteurs qui, par la force des choses sont devenus des metteurs en scène avec les conséquences que l’on sait.

En réalité la résolution de cette crise va au-delà des sommets, résolutions de l’ONU et autres accords. Elle devra intégrer cette donne sociologique et même culturelle (ivoirienne) qui veut que l’Ivoirien, gâté par la nature, se sente toujours supérieur aux autres considérés comme des « moins que rien ». Ce n’est certainement pas exagéré, les faits l’attestent...

Si en théorie, le président ivoirien se dit fatigué par la crise, la majorité des Ivoiriens et les habitants de la sous-région sont dans la pratique, dans les faits. Si GBAGBO et les auteurs principaux étaient vraiment fatigués, il y a bien longtemps qu’on parlerait de cette crise au passé. Malheureusement ceux qui sont en train de faire actuellement l’histoire socio-politique et économique de la Côte d’Ivoire ne sont pas fatigués. Et rien ne prouve qu’ils vont se fatiguer dans la mesure où derrière cette crise se cache non seulement des intérêts économiques mais aussi le « bien-être ivoirien »

L’Ivoirien au-dessus de tous

Les dernières menaces du président du FPI, Pascal Affi N’GUESSAN, la récente déclaration de Laurent Koudou GBAGBO qui refusait toute médiation ou négociation d’où qu’elle vienne et le lever de bouclier qui avait suivi l’adoption de la résolution 1633, montrent si besoin en était, cette propension des Ivoiriens à se croire au-dessus de tous, avec pour conséquence le refus de tout ce qui est proposé de l’extérieur pour la résolution de la crise.

Quand GBAGBO dit par exemple que personne ne viendra résoudre la crise à la place des Ivoiriens, il a certes raison, mais il laisse apparaître en filigrane l’égocentrisme démesuré qui a toujours habité les Ivoiriens, principalement les acteurs de la crise. Quand dans une de leurs chansons des artistes ivoiriens disent : « Ambargo, ambargo...est-ce que c’est ambargo on mange, c’est arme on n’a pas, sinon on a tout chez nous », c’est encore la manifestation de cet égocentrisme démesuré.

Dans un tel contexte, faire confiance à l’extérieur, appliquer les résolutions et autres recommandations, deviennent pour l’Ivoirien Laurent Koudou GBAGBO, de se « rabaisser » ; or la modestie n’est pas dans le langage ivoirien. Gâté par la nature donc suffisant, l’Ivoirien en général se dit toujours supérieur aux autres. Si aujourd’hui, on demande à l’armée française de quitter la Côte d’Ivoire, c’est que pour les Ivoiriens, c’est la France qui a des intérêts en Côte d’Ivoire et non le contraire. Les menaces du président du FPI au sujet des ressortissants de la CEDEAO sont à inscrire dans cette dynamique ivoirienne.

C’est comme pour dire « Si vous avez des millions de ressortissants chez nous, c’est que c’est vous qui avez besoin de la Côte d’Ivoire, nous on n’a pas besoin de vous, donc faites attention à Abuja, ne touchez pas au pouvoir de GBAGBO ». Des menaces reçues d’ailleurs 5/5 par les chefs d’Etat présents à Abuja. Cette donne égocentrique qui sommeillait en l’Ivoirien a été réveillée et soutenue par le pouvoir FPI depuis 2002.

Ce n’est donc pas étonnant qu’aujourd’hui, on se retrouve à la case de départ. C’est comme s’il n’y avait pas eu de Marcoussis, d’Accra, de Pretoria, de Bamako, de New-York... Toutes ces rencontres assorties d’engagements, de résolutions et de recommandations, n’ont finalement servi à rien, sinon qu’à gaspiller de l’énergie et de l’argent qui aurait pu servir à la Croix-Rouge ivoirienne ou à certaines ONG sur le terrain pour alléger la souffrance des populations déplacées.

Finalement, chacun se sent bien dans cette crise
Si la majorité des Ivoiriens souffrent des conséquences de cette crise, il n’en est pas de même des différents protagonistes de chaque camp. Le pouvoir GBAGBO semble bien se nourrir de cette crise. Il en est de même de l’autre côté avec les Forces nouvelles (FN). Dans chaque camp, la question qui tenaille et qui peut expliquer les revirements est : « Que deviendrons-nous après la sortie de crise » ? Une question, bien évidemment, qui ne prend pas en compte la souffrance des populations.

Si on peut accuser les Forces nouvelles, on ne saurait occulter le fait que depuis le déclenchement de la crise le pouvoir GBAGBO n’a presque rien fait pour résoudre les problèmes réels qui sont à la base du déclenchement de la rébellion de septembre 2002. Et c’est à ce même GBAGBO qu’on s’apprête à donner encore un an de pouvoir à la tête de la Côte d’Ivoire.

GBAGBO forever ?

Si les chefs d’Etat de la CEDEAO, réunis à Abuja au Nigeria, ont proposé, de prolonger d’un an le mandat de Laurent Koudou GBAGBO, c’est presque certain que le Conseil de paix et de sécurité de l’Union, sera dans le même registre. Un an de plus donc pour GBAGBO.
Affi N’GUESSAN du FPI n’en demandait pas mieux. Ainsi, celui qui a passé 4 ans à rouler tout le monde dans la farine, se voit confier un autre mandat. Si on n’y prend garde et à force d’écouter les sirènes de menaces venant des bords de la lagune Ebrié, GBAGBO risque de passer une décennie à la tête de la Côte d’Ivoire.

Si en 4 ans de crise Koudou n’a pas pu se mettre au-dessus des « velléités conservatrices » de son camp pour voir l’intérêt supérieur de son pays en oeuvrant pour une sortie définitive de la crise, ce n’est pas en un an qu’il pourra faire sa mue pour devenir un autre personnage que l’historien, chef de l’Etat GBAGBO, incapable de résoudre la crise dans son pays.

Que pourra faire GBAGBO en un an quand on sait que toute l’opposition a déjà rejeté la décision de le maintenir à la tête de la Côte d’Ivoire. Des troubles et une chienlit en perspective ? Difficile de répondre. Ce qui est par contre certain, c’est qu’on repart à zéro... avec GBAGBO et compagnie. Les mêmes acteurs sur la même scène : la Côte d’Ivoire.

Par Ben Alex Béogo

L’Opinion

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Vos commentaires

  • Le 19 octobre 2006 à 16:13, par bra mogo En réponse à : > Crise ivoirienne : Une dramatique comédie

    L’erreur de beaucoup de personnes est d’ignorer la constitution ivoirienne. Celle ci dit (art.39) que le mandat du président cesse après la prestation de serment du nouveau président élu. En claire le mandat de GBAGBO peut durer même 20 ans. Et puis, que peut vraiment une communauté internationale dans cette crise après les évènements de novembre 2004 (Licorne) et de janvier 2006 ( onuci) ? A partir du moment où cette communauté n’est plus neutre aux yeux de tous les africains, il ne reste qu’aux ivoiriens de resoudre leur palabre. Et n’oublions pas que c’est le président français qui a dit que les étrangers n’étaient les bienvenus dans cette crise.

  • Le 19 octobre 2006 à 19:07, par KALMOGO En réponse à : > Crise ivoirienne : Une dramatique comédie

    Je suis entièrement d’accord avec Vous. On ne peut pas continuer de renouvellement en renouvellement du pouvoir de ce Boulanger Roublard GBAGBO !
    Il faut qu’on en finisse avec ce surplace et j’espère comme tout le monde que cette fois-ci ce sera la dernière ! Wody Boulanger Roublard Tout le monde est FATIGUE ! Haro.

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