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Charly Sidibé : "Je mets ma musique au service de l’histoire"

Publié le mardi 10 octobre 2006 à 07h44min

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Après son premier album "Complainte" en 1999, Charly Nouhoun Sidibé revient avec un nouveau nom de baptême, Charly Sidibé, et une nouvelle œuvre "Macina" aux rythmiques peulh. L’artiste nous a rendu visite le jeudi 24 août 2006 pour échanger sur sa nouvelle vision de la musique.

Tu as commencé ta carrière musicale sous le pseudonyme Sydney Charly. Aujourd’hui, à la faveur de ton second album, tu t’es rebaptisé Charly Sidibé. Pourquoi ce changement de nom ?

• Parce que c’est un retour aux sources. Seydney Charly était un surnom et en même temps mon nom d’artiste. Mais, aujourd’hui, je suis attaché à mes racines. Alors j’ai décidé d’utiliser mon nom à l’état civil, Charly Sidibé.

Qu’est-ce qui a prévalu à ce retour aux sources ?

• Mon passage au département d’histoire et archéologie de l’université de Ouagadougou m’a été bénéfique. Parce que cela m’a permis de me réconcilier avec mon histoire en valorisant les rythmes traditionnels. Aujourd’hui, beaucoup de jeunes citadins ignorent presque leurs traditions.

Ta longue collaboration avec Bil Aka Kora ne serait-elle pas aussi un autre facteur qui a favorisé ce changement ?

• Dans mon premier album "Complainte", j’avais composé des chansons en peulh. Mais, honnêtement, je reconnais que Bil Aka Kora m’a beaucoup inspiré.

D’aucuns disent que ce changement est une stratégie musicale parce que tu n’as pas réussi à t’imposer par le reggae. Que réponds-tu ?

• Je fais la musique depuis très longtemps. Je veux donner un concept à ma musique. Celui qui consiste à restaurer la conscience historique en Afrique. Les maux du continent ne sont pas seulement politiques et économiques, mais il y a aussi la rupture avec le passé.

Comment peut-on appeler ton nouveau style musical ?

• Je fais une musique qui s’inscrit dans la tendance World. Je prends ce concept avec des pincettes. Bref, ma musique a une rythmique peulh, mais elle est ouverte à d’autres rythmes.

Pourquoi prends-tu le concept World music avec des pincettes ?

• Parce que c’est un concept où les gens mettent tout ce qu’ils veulent. Pour moi la World music est un genre musical qui a subi plusieurs influences. Je ne veux pas me figer dans un seul genre.

En tant qu’historien, on s’attendait à ce que tu donnes un nom à ta musique à l’image de Bil Aka Kora qui parle de djongo.

• Je m’inspire beaucoup des sonorités traditionnelles. La rythmique de ma musique est tirée d’une danse traditionnelle peulh appelée Djiré Nana. C’est une danse pratiquée lors des fêtes par les griots. Elle m’a beaucoup bercé pendant mon enfance. Je mets ma musique au service de l’histoire de l’Afrique. Chaque fois que je compose je pense au continent africain.

Quels sont les artistes qui t’ont influencé dans ta thématique en dehors de Bil Aka Kora ?

• Ce sont de grands Africains qui ont mis leurs empreintes sur la musique du continent, je peux citer Francis Bebey, Pierre Akendégué, etc.

Pourquoi as-tu intitulé ton album "Macina" ?

• Mon souci n’est pas de faire des louanges, mais je veux chanter des empires, des personnes qui ont marqué leur époque. C’est l’exemple d’Hambodedio qui a été un grand guerrier.

Cet album a pris combien de temps pour son enregistrement ?

• Je suis rentré en studio en Janvier 2006 et j’ai bouclé l’album le 10 août. Beaucoup de musiciens m’ont soutenu dans cette œuvre, notamment Yacouba Moumouni du groupe Mamar Kassey.

Il semblerait que tu as fait le clip de Hambodedio au Mali dans les falaises de Bandiagara. Pourquoi ?

• Je suis allé dans les falaises de Bandiagara afin de retracer toute l’histoire de l’empire Macina. Je voulais tourner ce clip dans les limites géographiques de l’empire peulh de Macina.

Retournons un peu dans le temps. Tu as été choisi lors du dernier festival jazz à Ouaga pour rendre hommage à Ali Farka Touré. Quels étaient tes sentiments ?

• Jazz à Ouaga m’a beaucoup lancé musicalement. C’est vrai, j’ai commencé à prendre de l’assurance en jouant aux côtés de Bil Aka Kora lors de Burkina Musique Tour et aux côtés de Habib Koité pendant une édition de Fet’Arts. Mais Jazz à Ouaga a été un tremplin pour ma carrière. J’étais comblé d’avoir mon nom parmi des grands musiciens lors de l’hommage à Ali Farka Touré. C’était un monument de la musique africaine et mondiale.

Lors du récent concert d’Alif Naaba, "Barka", des artistes ont été hués et insultés par le public ; mais toi, tu as réussi à ramener la bonne ambiance dans la salle. Comment t’es-tu senti ce jour-là ?

• J’ai eu un pincement au cœur. Mais je me dis que c’est le résultat d’un travail bien fait. J’ai beaucoup appris auprès d’autres artistes en jouant en live. C’est la seule façon de progresser de se remettre en cause dans son travail.

D’ici quelques mois, peut-être en novembre, le Mali organise un grand hommage à Ali Farka Touré avec de grands artistes africains. Chez nous, c’est Floby qui a été désigné pour représenter notre pays. Qu’en penses-tu ?

• Je ne sais pas comment la sélection a été faite, mais nous continuerons toujours à rendre hommage à Ali Farka Touré. Je n’ai pas écouté toutes les chansons de Floby, donc je ne peux pas me prononcer.

Peux-tu nous parler de tes projets pour cet album ?

• Je serai bientôt en France à un festival de musique peulh. Je prépare la sortie de l’album avec Seydoni Production au Mali et en Côte d’Ivoire. Pour terminer, je demande du soutien pour la musique d’inspiration traditionnelle.

Alassane Kéré Didier Ouédraogo

L’Observateur Paalga

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