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Fièvre typhoïde à Koupèla et à Pouytenga : Une origine introuvable

Publié le vendredi 26 mars 2004 à 07h23min

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Le journal Sidwaya dans son édition du 3 mars dernier faisait cas dans sa rubrique "Humeurs et rumeurs" d’une rumeur selon laquelle une épidémie de fièvre typhoïde sévissait à Koupèla et à Pouytenga. Ladite rumeur mettait en cause l’eau de l’Office national de l’eau et de l’assainissement (ONEA). Sidwaya a été invité par les responsables de l’ONEA à effectuer le déplacement sur Koupèla le 18 mars 2004 pour de plus amples informations. Quels constats ?

Après des échanges quelque peu teintés de colère avec le journal Sidwaya qui a osé publier une rumeur qui faisait état d’épidémie de fièvre typhoïde et qui mettait en cause l’eau de l’ONEA, l’équipe de Sidwaya a été invitée devant les autorités communales de Koupèla.

Objectif : vérifier la rumeur

C’est ainsi que les membres de la mission de l’ONEA et l’équipe de Sidwaya se sont retrouvés face-à-face avec le maire Daniel Tarhiguida. Celui-ci affirme n’avoir pas été saisi d’épidémie de fièvre typhoïde et n’être pas au courant de la rumeur qui a fait déplacer les deux équipes. "Nous avons mis un comité communal d’hygiène en place mais ce comité ne nous a pas saisi d’épidémie. En tout cas nous ne sommes pas au courant et la mairie se désengage", déclare M. Daniel Tarhiguida. Il reconnaît cependant que des cas de fièvre typhoïde existent à Koupèla et pour disposer de chiffre, il demande à ses hôtes du jour de se référer aux services sanitaires. Sans attendre les deux parties se sont déportées au district sanitaire de Koupèla.

Pas question de parler d’épidémie

En l’absence de la première responsable du district sanitaire de Koupèla, les journalistes et les agents de l’ONEA ont été reçus par le médecin du Centre médical de Pouytenga M. Harouna Sanou et deux techniciens de laboratoire (Oumar Bondé et Bassama Bayala). Cette entrevue a failli prendre l’allure d’un procès. "Nous à notre niveau, nous ne pouvons pas parler d’épidémie de fièvre typhoïde, puisqu’il y a un seuil à partir duquel on parle d’épidémie. Il faut que Sidwaya nous dise qui lui a donné cette information", estime M. Bassama Bayala. "Non, répond le journaliste, car demander à Sidwaya de dévoiler ses sources, c’est comme si nous étions devant un tribunal. Nous sommes venus de Ouagadougou pour vérifier une rumeur et non pour divulguer des sources d’informations". C’est à partir de cet instant que les trois spécialistes de la santé humaine ont donné des explications sur la fièvre typhoïde, une maladie causée par une salmonelle (bactérie). "Elle est comme le paludisme où on ne peut pas parler d’épidémie", explique l’un d’eux. Même si les agents de santé avouent qu’il existe des cas de fièvre typhoïde, ils refusent de parler d’épidémie ou de donner des chiffres sans autorisation de leur supérieur hiérarchique. Le médecin-chef en déplacement.

Elle-même contactée pour avoir plus de données sur le cas de fièvre typhoïde recensés à la date du jeudi 18 mars et le nombre de décès que cela a pu causer, semble hésitante. "A partir de quel seuil peut-on parler d’épidémie ?", questionne le journaliste. Motus et bouche cousue du côté des agents de santé. La seule chose certaine à leur niveau est que la fièvre typhoïde survient à une période bien précise de l’année qui est celle des crudités (salades, choux, tomates, etc.). Et le manque d’hygiène alimentaire peut favoriser cette maladie.

Au lycée Saint Philippe de Koupèla, une dizaine de cas de fièvre typhoïde ont été dénombrés depuis le début de l’année 2004. M. André Zoundi, surveillant général dudit établissement soutient : "depuis le début de l’année, ceux qui se sont plaints de ce mal sont estimés à une dizaine et moi-même je suis en train de suivre le traitement". M. André Zoundi a été conseillé de boire du yaourt et de manger la soupe de poisson pendant deux semaines.

L’eau de l’ONEA en serait-elle la cause ?

Le surveillant explique : "Il y a une rumeur qui est en train de courir comme quoi c’est l’eau qui est la principale cause de transmission mais je ne peux rien dire. Je sais seulement que j’avais des malaises et quand j’ai fait l’examen, il s’est avéré que j’avais la fièvre typhoïde. Mais dire de prime abord que c’est l’eau du robinet, ce serait trop se hasarder".

Cette rumeur est aussi parvenue aux autorités administratives de la province. Comme M. André Zoundi du lycée Saint Philippe, le haut-commissaire du Kourittenga, M. Sébastien Willy déclare avoir lui aussi appris la rumeur qui mettait en cause l’eau. Il pense qu’il est de l’intérêt de l’ONEA de chercher à connaître la source de cette maladie pour démentir la rumeur. "On ne peut pas empêcher les gens de spéculer. Et l’ONEA ne doit pas s’en offusquer", considère M. Sébastien Willy.

Du côté de l’ONEA, les responsables se veulent rassurants. Selon M. Jean Zongo, chef de la station de traitement de l’eau située à quelques kilomètres de la ville, le liquide précieux servi aux populations de Koupèla et de Pouytenga ne contient pas de germes. "Chaque jour nous faisons des prélèvements à Koupèla et à Pouytenga. Nous les analysons au laboratoire pour rechercher les germes les plus résistants. Et nous pouvons vous rassurer que notre eau est potable" confie M. Jean Zongo après une visite de ladite station par les deux équipes venues de Ouagadougou.

A la station de traitement, l’eau du barrage pompée par deux puissantes machines subit trois grandes phases avant d’être mise à la disposition des habitants des villes de Koupèla et de Pouytenga.

La première phase est celle de sa clarification. Celle-ci qui exige des produits chimiques tels le sulfate d’aluminium et d’autres adjuvants en plus d’un temps de décantation permet de passer à la seconde étape appelée filtration. Lorsque celle-ci est achevée, l’eau aboutit à la dernière phase qui est la désinfection. C’est à ce niveau que tous les germes sont anéantis à l’aide du chlore. "Nous émettons souvent du chlore libre pour la protection de l’eau contre les germes, c’est l’odeur du chlore libre que vous sentez souvent en buvant l’eau de l’ONEA. Je ne pense donc pas que notre eau soit à l’origine de la fièvre typhoïde". Telle est l’explication fournie par le chef de station de l’ONEA, M. Jean Zongo.

De nombreux cas de fièvre typhoïde

A Koupèla plus d’un s’interrogent sur cette maladie. "Je me demande s’il y a une famille ici qui n’a pas connu de cas de fièvre typhoïde. C’est maintenant que la situation tend à s’améliorer", constate le secrétaire général de la province du Kourittenga, M. Saïdou Zétiyenga. A la Congrégation des sœurs franciscaines de Seillon que dirige la Sœur supérieure Alicia, les examens sollicités par des patients confirment l’existence du fléau. Depuis le début du mois de mars 2004 jusqu’au 18 mars dernier, 257 personnes y ont demandé des examens divers. Ces examens ont révélé 38 cas de fièvre typhoïde. Pourquoi tant de malades de fièvre typhoïde ?

M. Désiré Balima, aide-laborantin à la Congrégation des Sœurs répond : "La typhoïde peut provenir de notre alimentation ou de notre boisson".

Notre tentative d’informer le public en demandant une analyse de l’eau, principale boisson de la population auprès de ce laboratoire s’est soldée par un échec. Etant en partenariat avec le district sanitaire de Koupèla, le laboratoire des Sœurs ne veut pas prendre le risque, du moment où les responsables de centre sanitaire traînent les pas sur les données chiffrées de malades de fièvre typhoïde. Il ressort néanmoins que le vaccin est disponible à Koupèla. A la pharmacie des Sœurs, le produit coûte 9 350 F. Et pour l’avoir, il faudrait au préalable subir des examens.

L’origine de la fièvre typhoïde reste donc à rechercher. Mais en attendant, l’hygiène alimentaire est recommandée par les spécialistes de la santé humaine.

Enok KINDO
Sidwaya

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