LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Vous n’empêcherez pas les oiseaux de malheur de survoler votre têtе, mаis vοus рοuvеz lеs еmрêсhеz dе niсhеr dаns vοs сhеvеux.” Proverbe chinois

Nouveau gouvernement togolais : L’UFC veut être dehors pour cracher dedans

Publié le vendredi 22 septembre 2006 à 07h35min

PARTAGER :                          

Les leaders de l’UFC

On s’attendait plus ou moins à cette rebuffade de l’UFC. Et bingo ! serait-on tenté de dire. Le nouveau gouvernement togolais conduit par Me Yawowi Agboyibo a été formé, le mercredi 20 septembre, sans un strapontin pour l’UFC, du moins sans un élément mandaté par la formation de Gilchrist Olympio.

A vrai dire, le refus des Ufcistes est presque un non-évènement pour peu qu’on ait pu observer la position de ce parti notamment celui de son chef, ces dernières années, surtout après la nomination du président du CAR à la primature. C’est de notoriété publique en effet au Togo, qu’entre Gilchrist Olympio et celui que ses ouailles appellent le "Bélier noir", les rapports sont cordiaux pour ne pas dire plus.

Le premier se considère comme l’opposant de toujours à un système incarné par son "ennemi de toujours", feu le président Gnassingbé Eyadéma. Il est celui qui a pris le "maquis" (1) sitôt après l’assassinat du premier président, Sylvanus Olympio, pour revenir de temps en temps croiser le fer avec celui qui a renversé son père. L’attentat du 5 mai 1992 acheva de sceller l’image du héros Gilchrist qui peut apparaître aux yeux de certains Togolais comme le seul opposant qui vaille la peine d’être suivi.

Enfin, force est de reconnaître que cette formation politique est représentative au Togo où, il est vrai, certains lieutenants de Gilchrist tels Jean-Pierre Fabré ou Lawson font un bon travail de mobilisation. Par exemple, comme le disait un Ufciste, "On a beau faire mille élections, le quartier Bè, (NDLR : fief de l’opposition à Lomé) ne tombera jamais dans les mains du RPT".

Avec ce pedigree politique, "Gil" se voyait tout indiqué pour occuper le poste de Premier ministre. Le "Belier noir" Premier ministre mérite également cette fonction, car lui a "crapahuté" dur contre le système Eyadéma. Il a connu la prison, les menaces, les attentats contre sa personne. Il a également prouvé qu’il mobilise, puisqu’en 1994, suite au boycott des législatives de 1994 par l’UFC, il n’a été battu que dans un mouchoir de poche par le RPT (36 contre 37). Il aurait dû du reste être nommé Premier ministre en ce temps-là si un certain Edem Kodjo n’avait pas "pirouetté" à 180 degrés.

Tout cela relève aujourd’hui du passé, et l’accord politique global du 20 août dernier devrait remettre les compteurs à zéro. En effet, il s’agit d’un gouvernement d’Union nationale censé conduire la transition jusqu’en juin 2007, date des législatives. En mettant en exécution leur menace, selon laquelle : "Si Me Agboyibo est nommé PM, l’UFC n’ira pas au gouvernement", "Gil" et ses partisans, "menacent" le modus vivendi politique d’août. Car, même si l’UFC professe qu’elle est toujours partie prenante à cet accord, si elle avait voulu lézarder le processus, elle ne s’y serait pas prise autrement.

A quoi joue donc Gilchrist Olympio ? A l’évidence, ce boycott n’a pas reçu l’assentiment de tout le monde, y compris dans le premier cercle du patron de l’UFC, dont Amah Gnassingbé (2e vice-président) qui est dans le gouvernement, "à titre personnel". De l’avis de ce dernier, dont le patronyme, à lui tout seul, est assez évocateur, (un Gnassingbé opposant dans le gouvernement, ça veut tout dire), "Le bureau et toutes les préfectures, convoqués en réunion le 18 septembre dernier sont pour l’entrée de l’UFC dans le gouvernement". Pourquoi "Gil" rame-t-il alors à contre-courant de son parti ?

A ce rythme, l’homme risque de créditer la thèse selon laquelle il poursuit une vendetta personnelle et se préoccupe peu de l’avenir du Togo. Certes, Faure n’ignorait pas qu’en nommant Me Agboyibo, il braquerait l’UFC, qui, on se rappelle, avait déjà revendiqué cette primature en plus de 40% des postes ministériels (à travers la coalition jaune) au lendemain de la présidentielle du 24 avril 2005. C’est cela qui avait abouti à la naissance du gouvernement monocolore d’Edem Kodjo. Ce petit couac est de bonne guerre pour Faure, car un président se gargarise toujours de la tambouille entre ses opposants.

Néanmoins, cette non-participation de l’UFC à l’équipe présente s’apparente à une erreur de jugement politique, car la preuve a été administrée qu’en politique, les boycotteurs professionnels se mordent toujours le doigt. Et nulle part, on ne peut se forger un destin politique pérenne, si l’on ne se frotte pas aux réalités du terrain et, surtout, c’est tout bénéfice pour un parti de s’exercer. La preuve, le professeur Léopold Gnininvi de la CDPA, lui, a choisi d’être présent dans l’équipe.

Visiblement, l’UFC a choisi de rester dehors pour pouvoir cracher dedans plutôt que d’être dedans et de cracher dehors, encore qu’en la matière, des postillons puissent l’éclabousser. Après tout, ce n’est qu’une période transitoire d’une année, et point besoin d’un "enragé politique" pour conduire une telle équipe gouvernementale. Mais comme ce n’est pas un refus total, car il y a l’accord politique global qui engage chacun, espérons que l’UFC rejoindra la barque. Ce ne serait pas la mer à boire pour certains des 34 ministres de lui céder des places, ou, à la limite, le Premier ministre en créera d’autres. L’avenir du Togo vaut bien un gouvernement pléthorique.

Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana

Observateur Paalga

PARTAGER :                              
 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique