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Orpaillage dans la Comoé : Les villageois de Naniagara inquiets

Publié le jeudi 21 septembre 2006 à 07h58min

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Le village de Naniagara qui est situé à une quinzaine de kilomètres de Banfora sur l’axe qui mène à Mangodara est devenu le nouvel eldorado des chercheurs d’or de la Comoé.

En effet, les anciens sites de recherche que sont Moussoumourou et Dégué-Dégué dans le département de Sidéradougou ne font plus l’affaire des orpailleurs. Ceux-ci convergent tous vers Naniagara dans l’espoir de faire fortune.

Cela fait deux mois que les trois sites de recherche d’or de ce village ont été découverts. Dans ce même laps de temps, c’est un village aux maisons de fortune qui s’est érigé. Ces maisons, construites à l’aide de branches d’arbres, de seccos et de plastiques, sont utilisées comme dortoirs ou comme point de vente du métal précieux.

Les orpailleurs, dans leur mouvement, ont amené un nombre impressionnant de commerçants dans le village qui pourtant ne dispose pas d’un marché. Du même coup, leur site d’accueil se transforme en un marché le jour où l’on peut se procurer des denrées de première nécessité. Egalement dans ce marché, se trouvent des vidéoclubs, des restaurants, des kiosques. Nous avons dès notre arrivée sur les lieux trouvé un boulanger traditionnel qui construisait son four. Preuve que le site en a pour longtemps à Naniagara.

L’érection du village et du marché des orpailleurs a nécessité beaucoup de bois. Ce bois qui sert de charpente a été coupé dans les environs et quand on voit le nombre de hangars, de huttes, on se rend compte de l’importance du bois coupé dans la forêt. Les orpailleurs ont trois sites différents de recherche situés, chacun à environ 7 km de la route départementale. Pour accéder au plus grand, les orpailleurs doivent traverser trois rivières. Sur les sites, les trous sont creusés un peu partout. Les éleveurs ont une peur bleue de ces trous car un bœuf qui y tombe est perdu.

La question de l’insécurité

Naniagara a accueilli un grand nombre d’étrangers qui ont des allures de citadins. Le trafic y est devenu important car les 404 bâchées ne cessent de faire la navette entre le village et Banfora transportant soit des marchandises, des passagers ou du matériel. Bien au courant du quotidien des orpailleurs, les villageois s’inquiètent pour leur sécurité. On se rappelle que sur les sites du département de Sidéradougou et de Tiéfora, les interpellations, arrestations opérées par la police étaient fréquentes.

Même la crainte s’exprime entre les orpailleurs car il n’est pas rare que des incompréhensions, pouvant conduire à des dérapages, s’installent. Le plus souvent, c’est l’usurpation du trou d’autrui qui en est la cause. C’est pourquoi, certains d’entre eux refusent de regagner la base le soir. Ils préfèrent passer la nuit auprès de leurs trous pour mieux les surveiller. Cela, malgré l’opposition du chef de village.

Les trous dans lesquels se fait la recherche d’or non plus ne rassurent, même s’ils sont pour le moment à des profondeurs variant entre 1 et 4 mètres. Cependant, à chaque fois que la fouille connaît une trêve, même d’un quart d’heure, les trous se remplissent d’eau qu’il faut évacuer avant de reprendre.

Le quotidien de l’orpailleur

Très tôt le matin un peu avant 6 h, les orpailleurs sont partis. Ils bravent la longue distance et les rivières pour se rendre dans les sites de recherche. C’est le soir vers 17 h qu’ils reviennent à la base, tout jaunes et tout épuisés. Le drame est que parmi eux, figurent des enfants dont l’âge est compris entre 15 et 17 ans. A la question de savoir si le récent éboulement de Poura ne les inquiétait pas, ces braves gens pensent que c’est une question de destin.

Certains refusent d’en débattre, de penser à un éventuel malheur. "C’est notre métier et c’est ce qui nous permet de vivre", disent d’autres. Présentement, nous ne trouvons pas grand-chose comme or car nous sommes à une étape embryonnaire, déclara l’un d’eux. Mais tous craignent l’arrivée des agents du Comptoir burkinabè de métaux précieux.

Selon les orpailleurs, ces agents ne permettent pas de réaliser le maximum de gain avec leurs trouvailles. Très souvent, le site tout entier est "vendu" à une personne chez qui tout le monde est obligé de vendre son or. Ce dernier fixe son prix au gramme et personne ne quitte les lieux sans être minutieusement fouillé. Le prix fixé par l’acquéreur du site est souvent très bas par rapport à celui pratiqué dans les villes. C’est alors à partir de ce moment que commencent les tentatives de sorties frauduleuses de l’or donnant lieu à des arrestations.

Les services compétents en matière de site aurifère doivent, dès à présent, prendre le taureau par les cornes. Nous pensons aux services environnementaux, de sécurité, et surtout ceux qui s’occupent de la question de l’enfance afin que les dégâts à Naniagara ne dépassent pas les limites acceptables.

Mamadou OUATTARA

Le Pays

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