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Mise en œuvre du NEPAD en Afrique de l’Ouest : Le retour de l’intégration économique

Publié le mardi 23 mars 2004 à 08h08min

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Le président du Faso, Blaise Compaoré a participé les 19 et 20 mars à Accra (Ghana) à un sommet de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) sur la mise en œuvre du Nouveau partenariat pour le développement de l’Afrique (NEPAD). Huit autres chefs d’Etat et des Premiers ministres ont échangé avec le président de la Banque mondiale, M. John Wolfensohn sur le financement du NEPAD.

Les travaux du téléphone par cable qui va bientôt relier le Burkina aux pays voisins ; l’interconnexion des réseaux électriques conduite par le système d’échanges électriques ouest-africain (West african power pool)... sont des exemples concrets de mise en œuvre de projets communautaires initiés par la CEDEAO dans le cadre du NEPAD et soutenus entre autres par la Banque mondiale, selon des sources autorisées de la délégation burkinabè.

M. James Wolfensohn, président de la Banque mondiale a annoncé à la fin du Sommet que son Institution a mis à la disposition des Etats africains au sud du Sahara quatre milliards cinq millions (4,5) de dollars US. Les infrastructures absorbent un milliard sept cents millions (1,7) de dollars US. M. Wolfensohn précise que la Banque mondiale est disposée à accorder quatre cents (400) millions de dollars supplémentaires pour les projets régionaux en Afrique de l’Ouest dans les domaines des infrastructures, de l’énergie et du soutien aux pays en sortie de conflits. A condition, précise-t-il "que les priorités dégagées ici (Accra) soient acceptées par tous". Il a invité les chefs d’Etat à se retrouver pour affiner de façon consensuelle ces priorités. Car d’autres partenaires comme la Banque africaine de développement, la Commission économique pour l’Afrique, etc., sont prêts à s’associer à la Banque mondiale pour venir en aide à la CEDEAO.

Le président en exercice de la CEDEAO, le Ghanéen John Kufuor s’est réjoui des résultats du Sommet et indiqué que des consultations régulières vont s’établir entre la Banque mondiale et les chefs d’Etat de la région ouest-africaine. Le communiqué final fait état de l’approche régionale dans l’exécution des projets dans les secteurs comme les infrastructures, les échanges commerciaux, la paix et la sécurité. Aussi le Sommet a-t-il décidé de se doter d’un plan d’action à court terme qui bénéficierait du soutien actif de la Banque mondiale et des autres partenaires. Ce plan d’action accélérerait certains programmes existant dans le domaine des infrastructures, des transports, de l’énergie, de l’accès aux marchés, du renforcement des capacités institutionnelles de la CEDEAO. Le principe de partenariat servirait de base à ce plan d’action.

Priorités régionales

"Cette rencontre se veut une rupture avec les pratiques anciennes entre la Banque mondiale et les Etats africains, ce n’est pas à la Banque mondiale de dire ce dont ont besoin les Africains, mais aux Africains de dire ce dont ils ont besoin", a affirmé M. Paolo Gomez de l’institution de Bretton Woods pour marquer la qualité du dialogue d’Accra.

Les chefs d’Etat présents à Accra ont dit chacun ses priorités. Chacun aurait présenté ses projets dans le cadre du NEPAD. Ce qui s’explique par le fait que la plupart des institutions de financement sont régies par des procédures qui ont comme interlocuteurs les pays et non les régions.

Les participants au huis-clos d’Accra notent qu’une trentaine de projets répartis dans les secteurs ci-dessus mentionnés auraient retenu l’attention des chefs d’Etat. Dans le domaine des infrastructures et des transports, on peut citer : la réalisation des tronçons manquants de la transcotière et de la transahélienne ainsi que la réhabilitation des sections déjà construites mais dégradées ; la réalisation d’un réseau de chemin de fer sur l’étendue de la région ; l’extension de certains ports de la côte ouest-africaine, ainsi que l’aménagement de ports secs et autres facilités portuaires pour les pays sans littoral ; la modernisation des aéroports internationaux de la région, la construction du gazoduc de l’Afrique de l’Ouest et le développement des énergies nouvelles et renouvelables. Depuis le sommet de Yamoussoukro, le 17 mai 2002, la CEDEAO a été désignée comme structure de coordination et de suivi de la mise en œuvre des projets NEPAD en Afrique de l’Ouest.

Les conflits en arrière-plan

Le président en exercice de la CEDEAO a fait observer les remarquables efforts accomplis par l’Organisation pour résoudre les situations de conflit et se tourner résolument vers une sous-région de paix. Ainsi en 2003, après l’intervention de la CEDEAO, la Côte d’Ivoire a pu constituer d’un gouvernement de réconciliation pour stopper la guerre civile. Avec l’aide de la CEDEAO, le Liberia sort d’une décennie de guerre fratricide et d’instabilité et se dote d’un gouvernement de transition. La Guinée Bissau, avec l’assistance du groupe CEDEAO a pu éviter un potentiel bain de sang et s’achemine vers des élections démocratiques. La Sierra Leone recouvre rapidement sa stabilité, après plusieurs années d’un conflit à caractère génocidaire et dévastateur.

A cause de ces multiples conflits, explique John Kufuor, on avait fini par oublier que CEDEAO signifie Communauté "économique" des Etats de l’Afrique de l’Ouest et l’intégration économique était restée en rade.

Le président Olesegun Obasanjo du Nigeria, au cours de sa communication sur les conflits a dit que la CEDEAO avait été longtemps préoccupée par le maintien de la paix dans la sous-région à travers l’ECOMOG. Aussi les chefs d’Etat de la CEDEAO ont-ils reconnu que sans paix et il ne peut y avoir de développement. "Une aube nouvelle s’élève aujourd’hui pour l’Afrique de l’Ouest. Le triomphe de la démocratie, des réformes économiques, le réveil culturel et la restructuration politique ont repositionné nos pays dans la stabilité, la croissance et le développement. L’émergence de nouveaux leaders, de nouvelles voix, une société civile renforcée et une robuste culture de la tolérance, de dialogue et de compromis élargissent les espaces politiques et supportent la consolidation des valeurs et pratiques démocratiques...".

C’est pour être témoin de ce retour à l’intégration économique que la CEDEAO a invité le président de la Banque mondiale, M. James Wolfensohn, une figure de proue de la communauté financière internationale.

Tiergou P. DABIRE, Envoyé spécial à Accra


Neuf chefs d’Etat présents

Neuf chefs d’Etat ont pris part au sommet d’Accra sur la mise en œuvre du NEPAD en Afrique de l’Ouest. John Kufuor, le président en exercice de la CEDEAO et du Ghana, Mathieu Kérékou du Bénin, Blaise Compaoré du Burkina Faso, Yaya Jammeh de Gambie, Amadou Toumani Touré du Mali, Mamadou Tandja du Niger, Olesegun Obasanjo du Nigeria, Abdoulaye Wade du Sénégal, Tejane Kaba de Sierra Leone.

Deux pays étaient représentés par leur Premier ministre : Seydou Diarra de Côte d’Ivoire et Kofi Sama du Togo.


Vu et entendu à Accra

Question de langue ?

Le président du Faso, au dîner officiel avait à sa gauche, les présidents Tejane Kaba de Sierra Leone et Mathieu Kérékou du Bénin. A sa droite les présidents Yaya Jammeh de Gambie et Amadou Toumani Touré du Mali. La conversation était particulièrement animée sur cette table. Beaucoup d’observateurs se sont demandé en quelle langue, ils dissertaient. La langue de Molière ou celle de Shakespeare ? Comme quoi la barrière linguistique n’est pas un frein à l’intégration.

Aussitôt arrivés, aussitôt partis

Les présidents Obasanjo et Wade, deux grands chantres du NEPAD ont passé chacun quelques heures au sommet d’Accra sur la mise en œuvre du NEPAD.

Le premier est venu délivrer son message sur les conflits, communication d’ailleurs fort riche qu’il a exigé qu’elle soit traduite en français au diner officiel le 19 mars. Au petit matin du 20 mars, il était retourné dans son grand Nigeria. Le second Abdoulaye Wade est arrivé en trombe le 20 mars aux environs de midi, alors que les autres pairs étaient en huis-clos depuis 10 h 30 à 14 h 00, il était en route pour Le Caire, en Egypte.

Un fonds de péréquation ?

Le président Wade, au cours de cette conférence, aurait proposé un fonds de péréquation pour les produits de base dans le cadre des échanges de la CEDEAO avec le monde extérieur. Une espèce de stabex (stabilisation des exportations) qui existe entre l’Union européenne et les Etats d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.

Quand on sait que la Banque mondiale s’est évertuée à démanteler les caisses de stabilisation, de péréquation et autres dans les Etats africains... faire cette proposition devant le président de la Banque mondiale ne manque pas d’entregent.

Dialogue de sourds ?

"Notre défi aujourd’hui est de trouver les voies et moyens de traduire le NEPAD de philosophie en une nouvelle manière pragmatique de faire ensemble des affaires" a dit le communicateur de la Banque mondiale M. Victor Hugo au cours des travaux. Pour lui, il faut des résultats pour convaincre les citoyens d’Afrique que le NEPAD n’est pas une illusion de plus, ni un concentré de nobles intentions. Il poursuit : "les gouvernements africains ont accepté de prendre la responsabilité du développement de leurs pays et des programmes qui vont avec. Nous, la communauté de donneurs, acceptons de mettre à la disposition les ressources nécessaires à la mise en œuvre de ces programmes.

Mais qu’est-ce que cela signifie concrètement ? Avons-nous établi clairement ce que chaque partie attend de l’autre ? Je crains que la réponse soit "non".

Le Burkinabè du collège de sages

Le Ouidi Naaba et président du Comité national d’éthique fait partie pour l’année 2004 du comité de médiation de la CEDEAO au collège de sages. Le comité de médiation, un organe institué par l’article 19 du Traité a été installé le 19 mars par le président Kufuor. Le président de ce collège des anciens est le nigerian El Hadj Aboubakar Abdulsalami, ancien chef de l’Etat du Nigeria. Les nominations se font intuitu-personnae, selon des sources bien informées et les gouvernements n’y auraient rien à voir. Le précédent représentant du Burkina (2003) était Mgr. Anselme Titiama Sanou, archevêque de Bobo-Dioulasso.

Le président Jammeh à Ouagadougou

Le président Yaya Jammeh de Gambie serait bientôt dans nos murs. L’information s’échangeait dans la délégation burkinabè à Accra. Le président gambien se rendra en visite à Ouagadougou dans les prochains jours.

T. P.

Sidwaya

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