LeFaso.net, l'actualité Burkinabé sur le net
Proverbe du Jour : “Avec de la persévérance et de l’endurance, nous pouvons obtenir tout ce que nous voulons.” Mike Tyson

Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

Publié le mardi 29 août 2006 à 07h43min

PARTAGER :                          

Laurent Gbagbo

Un journaliste ivoirien avait écrit, en 1996, parlant de la défaite de l’ASEC d’Abidjan : "Bédié était au stade, la poisse aussi". Bien sûr, cette déclaration osée lui valut les foudres du prince du jour. Il n’empêche qu’elle traduisait, à l’époque, le sentiment d’exaspération des médias face à un président qui perd.

On peut en dire autant du chef de l’Etat au pouvoir depuis 2000 et dont le mandat est marqué par une longue agonie de la Côte d’Ivoire. Gbagbo est là, le malheur aussi. Toutes les formules ont été expérimentées pour ramener la paix dans le pays depuis la grave crise survenue en 2002, mais sans résultat palpable.

On a changé de médiateurs, nommé un autre premier ministre, pris des sanctions, édicté des feuilles de route, signé des accords... On a annoncé mille fois la sortie de crise, mais aujourd’hui, tous les acteurs de la crise ivoirienne sont obligés de se rendre à l’évidence : rien n’a bougé depuis 2002.

Les positions restent les mêmes, figées. C’est le statu quo ante. Les Forces nouvelles continuent d’occuper le Nord, Gbagbo se satisfait de diriger une moitié du pays, les Français et l’ONU jouent les « faiseurs de paix ». Bref, un vaste cirque qui a abouti à ce que l’on sait, le report, pour la seconde fois, de l’élection présidentielle.

Nommé le 4 décembre 2005 avec pour objectif premier de diriger une transition réussie, synonyme d’élection présidentielle transparente en octobre 2006, le Premier ministre Charles Konan Banny n’y verra que du feu. Pas d’élection. Pire, la perspective d’une déflagration sociopolitique se profile à l’horizon, avec la radicalisation des positions des différents camps.

D’un côté, Laurent Gbagbo qui veut rééditer le coup d’octobre 2005, où il avait réussi à se maintenir au pouvoir grâce à la communauté internationale, malgré la fin de son mandat. De l’autre, l’opposition politique et armée dont la patience est à bout et qui n’entend plus se faire berner une seconde fois. Entre eux, des arbitres qui semblent ne plus savoir à quel saint se vouer.

Après s’être discréditée pour n’avoir jamais pu faire respecter les règles du jeu qu’elle a édictées, la médiation incarnée par le Groupe de travail international et l’ONU saura-t-elle enfin faire entendre raison aux protagonistes de la crise ?

Rendez-vous en tout cas a été pris à la mi-septembre, à New-York où, devant Kofi Annan, les uns et les autres auront à s’expliquer. Il ne faut rien espérer de cette nouvelle rencontre si les Nations-unies s’évertuent à appliquer la même recette, celle qui consiste à ménager le véritable fauteur de troubles, le président Gbagbo, au nom du concept inopérant du respect des institutions issues d’élections.

Dans la situation ivoirienne, seule une opération chirurgicale radicale pourra soigner le cancer. Continuer à maintenir Gbagbo dans les probabilités de résolution de la crise, c’est faire fausse route. L’homme est un disciple de Machiavel dont l’hypocrisie et la roublardise n’ont d’égales que sa soif de se maintenir au pouvoir.

Comment composer éternellement avec un tel personnage sans courir le risque de faire basculer la Côte d’Ivoire dans un chaos général ? Konan Banny l’a appris à ses dépens, lui qui avait naïvement cru qu’il pouvait agir en "tandem" avec le chef de l’Etat. Au début, ce dernier contrariait quelque peu son partenaire en n’allant pas au même rythme, histoire sans doute d’endormir sa méfiance pour mieux l’étrangler. Puis, il s’est carrément mis à pédaler dans le sens contraire que Banny, pour l’essouffler et le déstabiliser moralement et politiquement.

Le Premier ministre actuel pourrait subir le sort de son prédécesseur, le pauvre Seydou Elimane Diarra, qui avait dû jeter l’éponge à force de recevoir des coups de tous les côtés. Aujourd’hui, Banny, s’il n’est pas encore KO, est dans la situation du boxeur acculé dans les cordes, espérant un second souffle, la défaillance subite de son adversaire ou une intervention divine pour s’en sortir.
Le plus grave, c’est qu’il ne semble plus avoir aucune autorité ni sur le FPI, ni sur les autres forces de l’opposition, du fait du long et patient travail de démolition entrepris sur lui par le clan présidentiel.

Qui sauvera Banny et la Côte d’Ivoire ? Car, venu en sauveur, le chef du gouvernement se retrouve en situation de naufragé qui a besoin lui-même d’une main secourable. La France ? Elle a montré jusque-là son incapacité à dompter Laurent Gbagbo. Préoccupés par l’échéance électorale de 2007, les dirigeants français risquent de mettre le dossier ivoirien en berne. La crise israélo-libanaise semble un enjeu plus stratégique pour Paris, partagé entre les amitiés arabes de Chirac et l’influence irrésistible du lobby juif.

Reste l’ONU, vers qui tous les regards sont désormais tournés. Quelle alchimie va-t-elle encore nous inventer ? En tout cas, le temps n’est plus aux formules douces qui font perdurer la chienlit et qui ont atteint leurs limites. Avec le report de l’élection présidentielle, la Côte d’Ivoire est promise à des lendemains de violences si les mesures indiquées sont encore une fois évitées. Et il est clair que l’ONU en portera une grande responsabilité, même si la classe politique ivoirienne, toutes tendances confondues, n’est pas excusable.

Gbagbo, qui a beaucoup de sang sur les mains , n’hésitera pas à marcher à nouveau sur des cadavres pour rester au pouvoir après le 31 octobre. On est donc dans la logique de l’affrontement, un exercice dans lequel le président ivoirien est aussi passé maître, grâce à certains de ses parrains qui semblent trouver leur compte dans l’économie de guerre. Un contexte qui profite largement au régime et à ses soutiens, mais appauvrit chaque jour davantage la grande majorité de la population.

Comment peut-on alors demander gentiment, comme le fait la communauté internationale depuis toujours, de renoncer à une telle manne ? A moins d’une conspiration contre la Côte d’Ivoire et, partant, l’Afrique de l’Ouest, il est incompréhensible que la communauté internationale continue à laisser Laurent Gbagbo la défier de la sorte. Mais attendons les résultats de la prochaine rencontre, sous l’égide de l’ONU, pour se faire une idée définitive de ce que l’on veut que la Côte d’Ivoire soit.

Le Pays

PARTAGER :                              

Vos commentaires

  • Le 29 août 2006 à 09:51, par Me Baugha (Londres) En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

    Une analyse qui manque d’intelligence et de lucidite. Cher ami apres le 31 octobre 2006 il n’y aura rien en cote D’ivoire tant qu’il n’y a le dearmement de vos rebelles. Le PR Gbagbo restera a son poste de commandement et la vie continuera.
    Ce qui va se passer c’est que :
    1) IL faudra enfin obliger vos rebelles a deposer les armes d’une facon ou d’une autre.
    2) continuer les audiences foraines dans un cadre legal
    3) Delivrer les certificats de nationalites a ceux qui y ont droit au regard de la loi.
    4) Faire la liste electorale
    5) Organiser les elections generales en Cote d’Ivoire.
    Voila la chronologie des faits qui se produire tres bientot en CI. Le pays sera reunifie malgre le propos des marchands de reve que vous etes. Vous qui avez renonce a votre vocation de journaliste pour faire plaisir a vos parains sanguinaires.
    Il est temps que l’on se ressaisisse pour construire ensemble notre Afrique dans le respect des lois.

    • Le 29 août 2006 à 11:26, par Un observateur suisse En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

      Je veux bien croire votre chronologie, mais dans tout ça à quoi sert le fait que Gbagbo reste au pouvoir pendant que ces 5 étapes sont réalisées ? Pourquoi ne pas nommer un gourvernement de transition, qui a si souvent fait ses preuves pour sortir d’une impasse ? En plus si Gbagbo renonce au pouvoir (d’ici aux prochaines élections auxquelles il peut participer) cela facilitera le désarmement des rebelles qui n’auront plus d’arguments pour soutenir leur rebellion.
      Je suis aussi surpris par la virulence de vos propos : quels sont ces parains sanguinaires ? Amadou Kourouma a pourtant dressé un portrait de la CI dans son dernier livre, quand on refuse on dit non, où les "parains sanguinaires" sont bien présents de part et d’autre. Qu’en est-il de Pierre-André Kieffer ? Est-ce les parains sanguinaires du nord qui l’ont fait disparaître ? Et pour les charniers mis à jours ?
      Je ne cherche pas à défendre mordicus la rebellion du nord, mais pour avancer dans une crise il faudrait mieux l’aborder de manière rationnelle et sans ommitions. Gbagbo n’a plus de légitimité dans une CI divisée, pourquoi le soutenir au pourvoir ? Quel pouvoir d’ailleurs, celui d’empêcher la résolution du conflit ?

      • Le 29 août 2006 à 13:06 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

        Pour ma part, je ne comprends surtout pas les ivoiriens ! Ils ont tendance à chercher le mal ailleurs alors que l’origine du mal se trouve dans leur pays et qu’ils sont à l’origine de cette crise qu’ils traversent.
        Quant j’entends des réactions de la sorte, je suis vraiment peiné ! peiné de voir que des intellectuels de la trempe de ce monsieur qui à réagi en second avoir des visions de ce genre ! pauvre Afrique, pauvre Côte d’Ivoire de nana Houphouet !
        les rancunes de pourront jamais finir dans ce pays avec des gens de cette nature qui voit le mal ailleurs et non pas à l’intérieur ! Qui est à l’origine de l’ivoirité ? qui déchirait les cartes des ivoiriens ? qui considérait les autres ivoiriens comme des sous ivoiriens ? Cela ne vient pas des autres pays limitrophes à ce que je sache !
        De grace, essayer de balayer devant votre porte qui commence à prendre de la salété de toute part !
        les autres aussi gère leur angoisse !

        • Le 29 août 2006 à 20:26, par tarbala En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

          Personnne et aucun pays extérieur n’est à l’origine de votre crise ne rêvez pas, mes chèr(es) frères et soeurs, vous êtes à l’origine de ce qui vous arrive. Après ces années de crise, vous n’avez toujours pas compris que vos langages guerrières vous nuisent. Je pense que la paix est proche, il faut éviter de tenir des langages d’exclusions. de grâce, ne qualifier pas vos propres frères d’étrangers. Vous-même n’allez jamais accepter que l’on vous traîte ainsi.
          Soyez réfléchis, ne soyez pas des" y voit rien"

          • Le 30 août 2006 à 23:40, par B. B En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

            moi je m’étonnerai toujours de ces annalyses pseudo journalistiques, bien bornées.
            si ça pête en Cote d’ivoire le vent va souffler jusqu’aaaaaaa Bukrina Fasho ! wait and see !

            • Le 31 août 2006 à 20:55 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

              Mon frere, tu n’as dit que la verite ; prions bon dieu que ca ne pete pas en Cote d’Ivoire si non le vent l’emportera sur toute la sous region (mali ghana, senegal, burkina etc..)

              • Le 1er septembre 2006 à 13:33, par Sebastien En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

                je ne vois pas les raisons d’un tel acharnement contre M.Gbagbo.
                Il a gagné des élections dont il n’a pas écrit les textes, c’est un vrai patriote parce qu’il pense d’abord aux interêts de son Pays en mettant en place des politiques de developpement qui ont fait leurs preuves en occident pour développer son economie et sa puissance militaire afin d’assurer la protection de cette économie et de ses compatriotes ainsi que de tous ceux qui vivent avec nous dans ce pays hospitalier.
                Une chose est clair:ceux qui font la guerre à M. Gbagbo car c’est ainsi qu’il faut le dire font la guerre à l’avenir prometteur de la Côte d’Ivoire. Ils refusent de voir un jour un ivoirien épanoui, autonome, capable de gérer son pays sans tendre la main vers l’extérieur pour développer ses régions, de choisir librement ses partenaires économiques parce que INDEPENDANT.

                Les questions d’IVOIRITE, d’EXCLUSION, de XENOPHOBIE... sont des arguments qu’ils créent pour justifier la guerre faite à ce pays.
                Soyons calmes les naturalisations continuent d’être signées et les étrangers positifs et refléchis vaquent tranquillement, comme depuis toujours, à leurs occupations dans ce pays.

                Nous devons aussi retenir que tant que des gens à eux seuls voudront s’approprier l’économie d’un Etat souverain ces arguments de déstabilisation feront toujours surface. La moralité de tous est interpelée dans notre société humaine parce que sinon aucune paix ne pourra exister dans aucun pays dans ce monde.

                Aimons nous et apprenons à aimer les autres.

  • Le 29 août 2006 à 12:02, par Bersany Touré En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

    Bonjour à Tous
    L’article correspond à une analyse bien ménée au point de faire sortir le patriote de Gbagbo de ses gongs. Sa réponse prouve qu’il n’a pas d’arguments valables car la colère et les insultes sont les justificatifs des gens sans arguments.Sans passion pour ma part je pense que le problème de la CI est plus un problème de dirigeants que politique.La question qui se pose c’est comment debarasser la classe politique ivoirienne de tous les dirigeants actuels qui ont montré leur incompétence pour la résolution des vrais problèmes des ivoiriens . C’est ce manque de compétence et de solution qui les ont améné à braquer les ivoiriens ( nordistes ,musulmans .... ) contre les ivoiriens ( sudistes , chrétiens ... ). En plus de Gbagbo qui est au pouvoir ( le + visible ) les autres aussi doivent être disqualifiés car n’oublions pas que les difficultés d’aujourd’hui ont pour origine le concept d’ivoirité créee par Bédié pour se relancer quand il est tombé en panne. Quand à Mr ADO que l’on dit proche des étrangers souvenez-vous qu’il fut l’auteur de la carte de résidence qui a permis aux forces de l’ordre bien maltraiter les étrangers ( =lle avec Mr Sarkho ).
    Sans rancune

  • Le 29 août 2006 à 14:44, par isidore02002 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

    Où est il question de "gentillesse" dans la façon dont cette affaire est traitée ?
    Il faut enlever gbagbo, c’est juste mais pas pour mettre des Ouattara ou Soro qui ont mis des Kalachnikov dans les mains de gosses de quatorze ans.
    Il semble bien que ce soit la raison pour laquelle la communauté internationnale continue d’observer cette situation sans faire plus que ce qu’elle a fait jusque là.

  • Le 1er septembre 2006 à 12:38 En réponse à : > Côte d’Ivoire : Gbagbo est là, le malheur aussi

    Je dirai plutôt que ce journaliste ne connais pas l’histoire du pays dont il parle et c’est decevant.

 LeFaso TV
 Articles de la même rubrique
Niger : Bientôt une École militaire de guerre (EMG) à Niamey