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Affaire Norbert Zongo : Le Manifeste pour la liberté contre l’enterrement du dossier

Publié le vendredi 25 août 2006 à 07h37min

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Le non-lieu accordé à Marcel Kafando dans l’affaire Norbert Zongo fait réagir le Manifeste pour la liberté. A travers l’appel suivant, la Coordination nationale de ce mouvement d’intellectuels s’élève contre la volonté manifeste d’enterrer l’affaire.

Ainsi donc la Cour d’appel vient d’entériner la volonté d’écarter le dossier Norbert Zongo en confirmant le non-lieu accordé à Marcel Kafando comme le craignaient beaucoup de citoyens de notre pays et de par le monde. Il faut le dire et le répéter : cette décision n’honore pas l’institution judiciaire de notre pays, malgré l’habillage superficiellement savant dont on voudrait l’entourer. Elle révèle avec une clarté incontestable la collusion entre la hiérarchie judiciaire et la classe politique au pouvoir au Burkina Faso, à travers notamment sa tendance congénitale la plus farouchement opposée à l’édification d’une démocratie moderne.

Comme nous l’écrivions dans la Déclaration inaugurale de notre Mouvement, voilà déjà huit (8) ans : « Nul besoin d’investigations commanditées

par un pouvoir constitué. Comme la disparition de Dabo Boukary, de Oumarou Clément Ouédraogo, de Sessouma Guillaume, etc. la mort de Norbert Zongo et de ses compagnons appelle la mise en accusation d’un régime tout entier par le peuple souverain, dépositaire de la légitimité, du pouvoir constituant, car ce régime n’a ni fait la lumière sur les disparitions antérieures, ni mis fin à la macabre série ».

La consécration de l’impunité comme finalité

Le non-lieu offert à Marcel Kafando vient couronner toute une série d’actes longuement mûris et destinés à effacer de la mémoire collective la revendication d’une justice pour les victimes des crimes politiques. Les forces de sécurité, emboîtant le pas à l’autorité judiciaire, semblent s’être aplaties devant la machine infernale du pouvoir politique. Elles ne se sont jamais courageusement saisies d’aucun dossier de crime politique depuis les années 1980 dans notre pays. C’est pourquoi les disparitions et les assassinats politiques ne trouvent jamais de dénouement sérieux, les assassins et leurs commanditaires courant toujours. Seule la lutte du peuple, à travers le Collectif, a permis, jusque-là, de contenir le funeste projet qui, alternant mesures politiques et décisions judiciaires, a pour aboutissement la consécration de l’impunité.

Les ennemis de la démocratie et de la justice au Burkina croient le moment venu de marquer des points définitifs. Pour eux, la réélection de Blaise Compaoré ainsi que la victoire du CDP aux communales constituent un contexte favorable pour écraser la résistance contre l’impunité. Ils oublient cependant que ces consultations électorales ont été largement ignorées par le peuple qui voit en elles une mascarade orchestrée en vue de donner du crédit à un pouvoir terni par ses crimes.

Une soif de justice inextinguible

Les ennemis de la démocratie et de la justice se trompent également en croyant que l’esprit de lutte impulsé sous la direction du Collectif s’est essoufflé et a laissé un vide favorable aux atteintes aux droits des citoyens. Contrairement à leurs fantasmes, l’expression du mécontentement populaire s’approfondit en prenant différentes formes. Et ce n’est certainement pas le non-lieu tendu à Marcel Kafando qui contribuera à apaiser la soif de justice de notre peuple. Notre mouvement est né à la suite de l’assassinat de Norbert et de ses compagnons. Nous avions, à l’époque, appelé les intellectuels à se ranger aux côtés du peuple pour s’opposer à l’impunité. Depuis les travaux de la Commission nationale d’enquête indépendante (CEI), l’implication de la 4e république dans la planification et l’exécution de Norbert est solidement établie dans la conscience collective. C’est pourquoi notre mouvement, le Manifeste pour la liberté, exige :

- que toute la lumière soit faite sur les crimes du 13 décembre 1998 ;

- que les coupables soient traduits devant la justice ;

- que tous les auteurs des crimes politiques et économiques soient jugés et punis conformément à la loi.

Nous invitons les intellectuels honnêtes de notre pays à rester mobilisés pour l’édification d’un véritable Etat de droit : "Fonctionnaires d’une humanité plus haute qu’un Etat qui n’a de droit que le nom, parce qu’attachés à des idéaux et à des valeurs universelles enracinées dans l"humanisme foncier de nos peuples, ils doivent assumer leur mission pour faire vivre la flamme inextinguible allumée par Norbert. Ils doivent se mobiliser pour conjurer l’avènement d’un Etat policier au Burkina Faso".

Ouagadougou le 22 août 2006

La Coordination nationale

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