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Affaire Norbert Zongo : Michel, pourquoi nous étriper si nous voulons la même chose ?

Publié le mercredi 9 août 2006 à 08h23min

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J’ai lu avec beaucoup de consternation votre spécial sur le traitement que nous avons fait du travail de la justice dans le dossier Norbert Zongo (Sidwaya n° 5665 du 2 juillet 2006). Je suis consterné, mais je me garde de glisser dans la confrontation dans laquelle vous voulez nous entraîner.

Sur cette affaire Norbert Zongo, nous refusons le piège du combat de chiffonnier entre confrères. C’est possible que nous ayons un traitement pas professionnel du dossier. Nous sommes des humains avec nos limites. Et pour cela nous vous remercions des cours de traitements de l’information que vous nous avez administré. Vous pouvez certainement le faire parce qu’en la matière vous avez la science infuse. Et puis n’êtes- vous pas un aîné ?

Mais ayant dit cela, il reste l’essentiel. C’est comment rendre justice à Norbert Zongo ? Vous comme nous, sommes préoccupés par la question. Vous, vous l’êtes encore plus, parce que contrairement à nous autres, vous avez l’extrême privilège d’avoir été un ami très proche de Norbert Zongo. Un confident même. Vous le dites à qui veut bien vous entendre. Vous connaissez mieux Norbert Zongo, que tous ceux qui s’agitent. Personnellement je ne revendique pas cette proximité.

J’ai vu Norbert Zongo. Je ne l’ai pas connu. Quand je finissais mes études de journalisme au CIERRO en 1992, il était déjà trop grand pour nous autres débutants. Sur Norbert Zongo, je sais donc très peu de choses. Mais mon engagement n’est pas dicté par la proximité que j’ai pu avoir avec un tel ou un tel autre. Mon engagement n’est pas à géométrie variable. Je reste convaincu, qu’au-delà de la force que tel ou tel autre individu, peut à un moment donné posséder, sa grandeur demeure et reste dans son aptitude à être juste et à rendre justice.

Ce dossier a pris une orientation qui met en cause personnellement la famille du chef de l’Etat, le président Blaise Compaoré. Nous, à notre humble niveau, nous n’y avons été pour rien. Vous pensez vraiment que ce sont nos écrits qui ont induit cette orientation ? Vous nous faites trop d’honneur. Le problème, ce n’est pas nous. Mais des faits qui accusent.

Et dans cette situation, nous pensons que les plus malheureux, devraient être le président du Faso et sa famille. Parce que ce « Non-lieu », peu importe les explications savantes que l’on en donne, les met davantage à l’indexe. Et comme ils n’ont eu cesse de clamer leur innocence, ils auraient dû être les premiers à s’indigner et à réclamer que le dossier ne s’arrête à ce stade.

Quand nous disons cela, c’est pas parce que nous avons une animosité quelconque vis-à-vis du président du Faso et de sa famille. Nous n’avons pas eu la chance de les connaître. Mais, il nous semble qu’à moins d’une autre évolution du dossier, si l’affaire Norbert Zongo devait en rester là, le nom du chef de l’Etat et de sa famille resteront associés à cet horrible drame. Ce n’est pas ce que nous leur souhaitons, mais aujourd’hui, même vous, cher grand frère, vous ne pouvez pas exclure cette hypothèse de vos analyses.

Pour le reste, c’est Dieu qui sait. Nous ne sommes pas l’ennemi de Blaise Compaoré et de sa famille. Nous disons des choses qui peuvent leur déplaire au plus haut. Mais, nous ne nous trompons pas forcément. Pour ce qui concerne le juge Wenceslas Ilboudo, là également nous n’avons aucune raison de lui en vouloir. Si en son âme et conscience, il pense qu’il a fait son travail, c’est lui et sa conscience. En tant qu’analystes, nous nous donnons la liberté de lire les faits selon nos petites connaissances imparfaites. Il est possible que nous ayons tout faux, parce que contrairement à vous, nous n’avons pas le privilège de disposer des procès-verbaux d’audition du juge d’instruction et de les recopier mot à mot. C’est un privilège immense, ça. Même la loi ne le permet pas. Mais comme qui dirait en fonction de ce que vous êtes fort ou faible, vous n’aurez pas la même justice. Il n’y a pas longtemps, maître Farama était poursuivi pour dit-on, avoir livré les procès-verbaux d’audition du sergent Naon à RSF. Il était simplement soupçonné. Mais vous, cher grand frère, vous faites fort, en recopiant les questions et les réponses.

Faut-il croire que ce dossier est désormais tombé dans le domaine public ? Si c’est oui, c’est que ce n’est plus un « Non-lieu » pour Marcel Kafando, mais un « Non lieu » pour le dossier Norbert Zongo dans son entièreté, comme nous le craignons. Hélas ! Si c’est non, c’est que inévitablement, vous vous exposez à des poursuites. Ce n’est pas moi qui le dit, mais la loi.

En tout état de cause, nous avons, comme nous avons pris le risque de l’écrire, entretenu des relations avec le juge Wenceslas. Mais, il ne nous est jamais venu à l’esprit de demander à lire les procès-verbaux d’audition. Ce que nous avons écrit dans « Wens m’a dit... », ce sont les apartés avec le juge. Il peut les nier. Il les nie d’ailleurs. Mais, c’est ça aussi les relations tumultueuses entre juge et journaliste.

Par contre, pour un journaliste aussi chevronné que vous, cher grand frère, vous auriez pu nous toucher avant de faire certaines affirmations. Pas plus tard que le mercredi 26 juillet 2006, nous avons animé ensemble un atelier du Conseil supérieur de la communication à Koudougou. Ce jour, en terminant mon exposé, j’avais eu cette réflexion : « je ne créerais pas un scandale dans cette auguste assemblée en évoquant le danger que le non-lieu dans l’affaire Norbert Zongo fait peser sur notre profession. Si cette affaire devait en rester là, ce sera très grave. Or il y a toutes les chances qu’il n’en soit pas autrement. Mais le plus désolant, c’est la bataille de chiffonniers que les journalistes se croient obligés de mener dans cette triste affaire... ».

Et j’ajoutais que pendant longtemps, certains confrères et pas des moindres, ont vu la léthargie du dossier dans la trop forte implication du Collectif, un regroupement trop politisé à leur goût. Maintenant que le Collectif est affaibli, j’exhortais ces confrères à occuper rapidement la place laissée vacante. Je ne crois pas trahir vos mots en disant que vous étiez le seul conférencier à acquiescer mes propos. Par la suite, nous avons eu un petit aparté, dans lequel vous me promettiez de me saisir ultérieurement pour une éventuelle concertation.

En lisant votre article (In Sidwaya N° 5665 du 2 août 2006), je n’ai pas retrouvé cette bonne disposition. Vous dites en recopiant le procès-verbal de nos différentes auditions, que nous avons refusé de donner nos sources. Mais il faudrait être juste et ajouter que nous avons à plusieurs reprises demandé au juge Wenceslas Ilboudo, s’il avait les moyens d’assurer la sécurité aux témoins qui viendraient faire des révélations ? Demandez-lui ce qu’il nous avait répondu.

Dans la situation actuelle, ce ne sont pas à la vérité les témoins qui manquent. Le juge Ilboudo Wenceslas sait pourquoi personne ne veut se risquer. En ce qui concerne le secret des sources, je n’ai pas bien compris votre raisonnement. Vous dites en terminant votre article « certes, les sources du journaliste sont sacrées (vous mettez sacrées entre guillemets) mais la vie humaine n’est-elle pas plus sacrée ? ».

Pour nous, la question de la sacralité de la vie humaine ne se pose même pas. La vie humaine est sacrée. C’est le premier des biens. Celui qui permet de profiter des autres biens. Nous ne le posons pas en opposition à tout autre principe, parce qu’il faut comparer ce qui est comparable. Il n’en reste pas moins que ce serait complètement immorale que de jeter en pâture, des gens qui vous font confiance, qui se confient à vous. Ces personnes aussi dans les circonstances actuelles, courent le risque de perdre la vie. Alors faut-il occasionner la perte d’une vie, pour faire justice à une autre déjà perdue ?

Nous croyons que le rôle du journaliste, ce n’est pas d’être un indicateur de la justice, mais de faire simplement son travail en faisant des investigations et en les rendant publiques. Il appartient au juge, qui a plus de moyens que le journaliste de mettre en branle tous les moyens de l’Etat et de droit pour vérifier les allégations du journaliste.

Mais, j’ai cru comprendre en vous lisant que faisant notre travail, nous sommes devenus coupables de n’avoir pas livré nos sources. Vous vous érigez en défenseur du juge d’instruction, contre vos confrères, qui sont coupables de l’échec du juge. C’est une façon de voir les choses. Mais cher grand frère, si j’ai bonne mémoire pour une affaire, tout ce qu’il y a de plus banale, vous accordiez l’anonymat à un quidam, qui l’avait demandé, et qui mettait en cause Hermann Yaméogo dans une ténébreuse affaire d’argent avec le régime de Gbagbo. Pourquoi l’aviez-vous fait ? Etes-vous prêts à livrer son nom si Hermann Yaméogo attaquait en justice ? Je suis sûr que non. Parce que vous avez, je le crois, une certaine idée de la morale et de la dignité humaine. Et si on vous forçait à le faire, vous me trouverez à vos côtés.

Je ne le fais pas pour vous. Je le ferai pour moi et pour l’idéal que je crois être celui du métier que nous avons embrassé. Un métier, qui sous nos tropiques, est une condamnation perpétuelle à mort pour celui qui veut vraiment l’exercer. Nous, nous avons intégré cette donne dans notre vie et nous nous comportons en conséquence.

Mon cher grand frère, vous dites, et vous vous indignez même, du fait que n’ayant jamais rencontré Naon, comment je peux prétendre avoir recueilli ses propos. Je ne crois jamais avoir dit que j’avais recueilli les propos de Naon. Je cite des propos qui lui sont attribués et auxquels vous avez pu avoir accès, puisque vous avez de la chance d’avoir tout le dossier d’instruction que vous pouvez citer in extenso. Dites-nous alors si ce que nous avons dit n’est pas ce qui est contenu dans le procès-verbal d’audition de Naon. Et pour plus de clarté, il faudra même le publier. Vous en avez les moyens et le droit.

Je vous rappelle juste, que quelques années avant, Naon nous aurait certainement flingué, si nous critiquions le régime. Mais si nous parlons de lui, c’est que nous pensons que tous les Burkinabè ont droit à la même dignité d’être humain. Or il y en a qui pensent que c’est tout pour celui qui est dans les bonnes grâces et l’enfer pour celui qui est en disgrâce. Ils oublient que la grâce et la disgrâce ne sont rien d’autre que les deux faces d’une même médaille. Mais en général quand on est dans la gloire, on oublie qu’il peut aussi exister des « jours sans ». C’est la nature humaine qui est ainsi faite.

Sur la question de la rencontre entre François Compaoré et Naon. Parce que le lieu ne concorde pas (le procès-verbal de l’audition de Naon dit « son bureau » et notre article dit à « Ziniaré »), vous parlez d’incohérence. Mais grand frère, vous avez peut-être raison, seulement « bureau » en lui-même n’indique pas forcément la ville où la rencontre a eu lieu. Et puis pourquoi pinailler sur les détails si le fait lui-même est avéré. La rencontre n’a peut-être pas eu lieu à Ziniaré, mais elle a eu lieu. Vous-même vous le dites. Dans son fond donc cette information est juste.

Seulement comme vous le savez, les moyens de contrôle de l’information pour un journaliste, sont tellement limités que des détails peuvent nous échapper. Mais le fond reste la chose la plus importante. Or, sur cette affaire, le fond est vrai. Naon a eu une discussion avec François Compaoré sur l’affaire Norbert Zongo. Vous nous le confirmez en citant le procès-verbal de son audition. Ensuite, vous en appelez à Norbert Zongo : « Norbert Zongo de l’Au-delà saura apprécier ». Eh bien ! S’il peut de là où il est jauger le cœur de chacun de nous, alors qu’il le fasse.

Quant au titre « Naon, un sergent qui menace la République », il semble vous déplaire au plus haut point. Mais comme vous le savez, c’est juste un titre de Une. Mais pas seulement, puisque comme vous avez pu en rendre compte, son audition confirme notre titre. L’Evénement contrairement à ce que vous prétendez, ne fait pas dans la titraille. Un gros titre à la Une du journal correspond toujours à un article de fond. Parce que nous avons une certaine idée de la mission qui est la nôtre. Pour le reste, faisons ensemble avancer le dossier, si nous le pouvons.

Vous croyez savoir que « deux journaux notamment « L’Indépendant » et « L’Evénement » peuvent donner des éléments nouveaux, à même de faire rebondir le dossier Norbert Zongo... ». Merci de nous prêter ce pouvoir. C’est aussi une certaine façon de nous jeter en pâture. Si nous savons, nous sommes dangereux. Nous le sommes encore plus, si nous refusons de tout dire. Une chose est certaine, nous ne nous prêterons pas à ce jeu. C’est pourquoi nous avons choisi la voix du droit de réponse à publier dans Sidwaya. Dans l’Evénement, il n’en sera pas question. Nous n’avons pas créé l’Evénement pour nous-mêmes. C’est pour servir un idéal : « l’information est un droit ». Confraternellement.

Newton Ahmed BARRY
Rédacteur en chef de l’Evènement


Cher confrère,

Nous aurions souhaité que nous puissions nous tutoyer en toute confraternité, mais comme vous avez choisi, le « vous », pour vous adresser à un confrère, nous vous retournons la politesse.

En effet, nous aurions publié ce droit de réponse sans une note, s’il ne s’était pas agi une fois encore du dossier Norbert Zongo. Nous refusons la polémique. Nous apprécions certaines amabilités et restons convaincu que la confraternité ne saurait se substituer à une complicité tacite. C’est pourquoi, nous osons relever certaines incorrections et répondre à quelques questions :

Premièrement : Affaire d’Etat ou affaire de la famille Compaoré ?

A nouveau, vous assenez une certitude que nous ne partageons pas. Ne faites pas de l’affaire Norbert Zongo, une affaire de « la famille Compaoré ». Restons au moins constant dans nos analyses. N’est-ce pas vous, qui écriviez dans les colonnes d’un confrère « le pouvoir responsable, mais pas coupable ». Or qui dit « le pouvoir », fait référence à l’Etat. Et Halidou Ouédraogo, président du Collectif est clair et net sur la question : « ... Norbert Zongo a été tué par l’Etat burkinabè. C’est le pouvoir de la IVe République qui a tué Norbert Zongo... » (in l’Indépendant n° 588 du 14 décembre 2004, p.10).

Et c’est selon cette manière de comprendre que le président du Faso, Blaise Compaoré, au nom de l’Etat a demandé pardon au peuple burkinabè et à toutes les familles victimes le 30 mars 2001 lors de la JNP pour tous « les crimes commis au nom de l’Etat ». Ne faisons donc pas du dossier Norbert Zongo une affaire de la « famille présidentielle ». Elle est bien une affaire d’Etat. Ce sont ces genres d’amalgame et de confusions qui sèment les germes de la haine et instaurent la désinformation.

Deuxièmement : de ce que « même la loi ne permet pas »

Vous nous faites le reproche très clairement de disposer de sources vérifiables. Et pour vous, c’est un privilège que la loi ne permet pas. De quelle loi parlez-vous ? Du Code de l’information ou d’une autre loi ? Et laquelle ? La précision était nécessaire. Pour votre gouverne, relisez les articles 49, 50, et 51 du Code de l’information. En ce qui concerne l’article 51, nous sommes au regret de vous faire comprendre que notre article ne vise pas à « faire échouer, dévier ou compromettre une enquête ou une procédure judiciaire effectivement en cours » ; (in Code de l’information, janvier 1994, art. 51, alinéa 3, p. 14).

Manifestement, vous voyez bien qu’avec le non-lieu, la procédure judiciaire est pour l’instant suspendue, attendant des charges nouvelles pour reprendre. Chose pour laquelle votre contribution est quémandée par le peuple burkinabè. Nous savons respecter la loi. Reconnaissez aussi avec nous, que dans le traitement de l’affaire Norbert Zongo, vous avez plusieurs fois bafoué la loi, l’article 53 du Code de l’information qui stipule : « Le secret professionnel énoncé à l’article 52 ci-dessus ne peut-être opposé à l’autorité judiciaire dans les cas suivants » ; et parmi ces cas, l’alinéa 5 précise : « Lorsque l’information porte sur les secrets de l’instruction judiciaire », (in Code de l’information, janvier 1994, p.14). Ainsi, pendant que l’instruction était en cours, vous avez fait des « révélations ». Et lorsque le juge d’instruction veut en savoir plus, vous gardez le silence. Il aurait pu vous inculper pour obstruction à la manifestation de la vérité. Il ne l’a pas fait, c’est à son honneur. Car que n’aurait-on pas écrit et entendu ? Voilà, cher confrère, nous ne croyons pas avoir fait ce que la loi ne permet pas.

Troisièmement : de « la sécurité des témoins »

Est-ce un cas de conscience ou une tentative de justification après coup ?

Votre mémoire semble vous trahir. Nous n’avons pas connaissance à la consultation de nos sources que vous vous soyez inquiété de la sécurité des témoins. Car si vous l’aviez fait, si vous vous étiez intéressé tant à la sécurité et à la vie des témoins et informateurs, pourquoi aviez-vous livré Naon Babou ? Dans cette affaire, c’est bien Naon Babou qui est votre principal témoin. Les « personnes crédibles » ne sont que des informateurs. La vie de Naon Babou ne compte-t-elle pas ? Celles des informateurs sont-elles supérieures à la sienne ? Si vous avez donné l’identité du « Sergent qui menace la République », ce ne sont pas celles des « personnes crédibles » qui ne menacent pas la République que vous ne pouvez pas livrer à la justice. Naon Babou a été jeté en pâture. Ainsi, vous donnez à vos témoins une sécurité à « géométrie variable ». La vie du sergent ne mérite-t-elle pas d’être aussi sauvegardée ? Naon Babou saura apprécier la considération que vous portez à sa vie.

Quatrièmement : le juge et le journaliste

Que peut faire un juge sans témoin, même s’il dispose de tout le trésor et de tous les moyens du monde ? Qu’aurait pu faire la CEI sans témoin ? Pour la manifestation de la vérité dans un dossier aussi brûlant que celui de Norbert Zongo, un juge et un journaliste peuvent collaborer, sans que ce dernier ne devienne « auxiliaire de la justice ». La CEI n’a-t-elle pas bénéficié des indications et de la collaboration de certains journalistes ? Le rapport de la CEI, n’était-elle pas destinée à la justice ? Ces journalistes sont-ils pour autant devenus des auxiliaires de la justice ? Les journalistes n’ont-ils pas été représentés au sein de la CEI par plusieurs associations ? A leur manière, ils ont collaboré pour la manifestation de la vérité. Et cette collaboration pouvait et devait se poursuivre à travers les différentes rédactions. Ce ne sont pas les moyens qui font la vérité, mais les témoins.

Cinquièmement : affaire 650 millions de Hermann Yaméogo et le dossier Norbert Zongo

Vous êtes bonnement arrivé là où nous vous attendions. Si vous considérez les 650 millions de Hermann Yaméogo comme « une affaire banale », permettez-moi une fois d’être en accord avec vous. Mais l’affaire Norbert Zongo n’est pas banale. Et c’est parce qu’elle n’est pas banale que nous ne devons pas donner dans la manipulation de l’opinion avec des scoops bidons.

Permettez-moi pour une fois de rendre un hommage à Hermann Yaméogo, car il n’a pas voulu ester en justice contre nous, même si certains confrères l’ont poussé à bout. En homme politique, il a plutôt cherché à rebondir en voyant la main du pouvoir, même si c’était une erreur. En vérité, l’homme du « Tekré » a une pleine conscience du pouvoir des médias et en profite. Sidwaya n’a pas été le seul organe à recevoir cette correspondance. Des hommes politiques même dans l’opposition l’ont reçue.

Et sur la question de la divulgation des sources, nous souhaitons que les choses soient claires. Pour un crime comme celui de Norbert Zongo, qui a suscité un sanglot national, aucun journaliste n’a le droit de garder le silence s’il a des preuves ou des témoins qui peuvent contribuer à la manifestation de la vérité. Nous parlons bien de crime et non pas « d’affaire banale ».

Enfin, nous voulons terminer notre note, en vous rassurant de notre totale disponibilité, même si vous avez choisi de travestir à dessein notre échange à Koudougou. Cela semble pour vous, une manie qui frise le cynisme. Et comme vous faites allusion à l’atelier du Conseil supérieur de la communication (CSC) dans cette localité le 26 juillet dernier, nous voudrions vous rafraîchir la mémoire en vous rappelant notre soutien à votre réaction : « Je partage la réaction de mon confrère et petit frère Newton Ahmed Barry. Sur le dossier Norbert Zongo, si des journalistes ne s’étaient pas mêlés, comme il le souligne au jeu politicien, nous aurions pu apporter collectivement notre contribution à la manifestation de la vérité. Je me réjouis aujourd’hui qu’il puisse partager cette position originelle que nous avions eue dès le déclenchement de cette affaire. Je ne suis pas un intellectuel, mais un alphabétisé. Mais à la lecture de certains écrits de certains journalistes sur l’affaire Norbert Zongo, il y a nécessité de rétablir la vérité. C’est ce que nous devons faire en tant que journalistes. Il est regrettable que ce soit un non-lieu qui nous impose cette prise de conscience aujourd’hui, et qui nous amène à chercher à réfléchir par nous-mêmes journalistes ».

Dans le respect de cet engagement, c’est ce que nous avons tenté de faire dans notre article (Sidwaya n° 5655 du 2 août 2006, p.16, 17 et 18). Nous pensons avoir fait œuvre utile pour la nation et pour la manifestation de la vérité dans l’affaire Norbert Zongo. Certains journalistes doivent faire leur auto-critique publique à commencer par vous. Il ne s’agit pas de produire des articles mensongers, calomniateurs à coup de manchette et dire après au juge que l’on a écrit sous la pression de la rumeur, comme l’ont confessé des journalistes.

Nous ne pouvons pas demander la lumière sur l’assassinat de Norbert Zongo et livrer aux lecteurs et au peuple, des informations infondées. Ceux qui veulent jouer à la bataille des esprits peuvent la commencer. Nous ne pouvons pas écrire ce que Naon Babou n’a pas dit au juge d’instruction.

Cher confrère, nous voulons certes la même chose mais les méthodes sont divergentes. Vous optez pour la manifestation de la vérité par le silence et nous pour la manifestation de la vérité par le témoignage. La nuance est grande.

Confraternellement.

Michel OUEDRAOGO

Siwaya

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