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Accusations de destabilisation : Une arme de diversion des peuples

Publié le samedi 22 juillet 2006 à 16h49min

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Les Etats sont un peu comme des oeufs qui se cognent dans une besace sans jamais se casser. C’est la conclusion que l’on peut tirer après les réconciliations surprenantes auxquelles l’on assiste souvent entre des pays qui ont passé le plus clair de leur temps à s’accuser par exemple de déstabilisation ou d’ingérence dans leurs affaires intérieures.

L’exemple le plus illustratif est le rapprochement amorcé récemment entre le Tchad et le Soudan. Pourtant, il n’y a pas longtemps, le président tchadien Idriss Déby Itno avait accusé son homologue soudanais, Omar El Béchir, de déstabiliser son régime en permettant à des opposants tchadiens armés d’utiliser son territoire pour lancer des attaques contre le Tchad. Malgré les démentis du maître de Karthoum, les accusations n’ont pas cessé et le président soudanais a même été traité de tous les noms d’oiseau par son pair, surtout lors de la campagne présidentielle. Une élection pour laquelle l’homme fort de N’Djamena, l’on se rappelle, a modifié la Constitution pour pouvoir se représenter.

Aujourd’hui, tout cela est oublié ou presque et la lune de miel est en train de poindre. Qui l’eût cru ? Cet exemple de rapprochement entre le Tchad et le Soudan, après une période de "je t’aime moi non plus", n’est pourtant pas le premier du genre sur le continent africain. L’on peut citer celui de la Mauritanie et du Burkina dont les relations, à un moment donné, surtout sous le régime du président renversé Maouiya Oul Taya, n’étaient pas au beau fixe. En effet, jusqu’à ce que l’on lui ravisse son fauteuil, l’ancien président n’a cessé d’accuser le Burkina de vouloir le renverser. Aujourd’hui, tout cela semble oublié et relevé du passé, et l’axe Ouaga-Nouakchott se porte visiblement bien. Une preuve irréfutable de cette embellie est la visite officielle du chef de l’Etat burkinabè, Blaise Compaoré, en Mauritanie où il a été chaleureusement accueilli. Le président mauritanien, El Ould Val est, en retour, venu au Burkina plus d’une fois à l’occasion de rencontres internationales lors desquelles il a été souvent reçu en audience par son homologue burkinabè.

Ah, les Etats, les dirigeants ! Ils sont comparables à des enfants qui se chamaillent, se battent souvent, mais se remettent à jouer ensemble l’instant d’après. Somme toute, cela n’est pas mauvais en soi. Car, dans leurs rapports, les Etats doivent toujours s’employer à cultiver la paix. Ce qui serait plutôt suicidaire, c’est l’inimitié constante et la rancune permanente. Comme la langue et les dents, la cohabitation est par moments houleuse, douloureuse sans qu’il y ait jamais séparation. A l’échelle des pays, l’on peut dire que la cohabitation et la bonne entente sont nécessaires, surtout en ce siècle de globalisation, de mondialisation, d’intégration. Malheureusement, il y en a qui, malgré tout, rament à contre-courant de ce processus. Ceux qui, en Afrique surtout, ont recours aux accusations de déstabilisation, pratiquent, la plupart du temps, la politique de l’autruche et de la fuite en avant.

C’est connu : crier à l’agression extérieure avérée ou imaginaire réveille généralement le sentiment nationaliste qui, à son tour, fait place à la fameuse union sacrée pour combattre l’ennemi extérieur réel ou supposé. Pas besoin d’être devin pour savoir qu’en pareille situation, les difficultés existentielles sont momentanément oubliées et l’hymne à la défense de la patrie aussitôt entonnée. Certains dirigeants n’hésitent donc pas à jouer sur cette fibre patriotique pour détourner, en quelque temps, l’attention de leurs peuples.

Aussi, les accusations contre d’autres pays se révèlent être une arme redoutable, utilisée souvent pour régler des comptes à des adversaires politiques de l’intérieur. En effet, c’est de cette façon que l’on retourne facilement l’opinion contre un opposant accusé de bénéficier d’un soutien extérieur qui vise à déstabiliser le pays. L’étiquette d’apatride, d’ennemi du pays est vite brandie. Or, ce ne sont généralement que des manoeuvres politiciennes.

En fin de compte, et à la réflexion, indexer à tout moment un adversaire politique comme la cause de ses problèmes ne résout pas forcément ceux-ci. Le bon exemple dont certains Etats devraient s’inspirer nous a été donné récemment par le Mali qui a mis fin à un mouvement d’humeur de certains militaires touaregs sans, en aucun moment, pointer du doigt un quelconque pays comme l’ayant suscité ou soutenu. Pourtant, ce pays pouvait bien le faire surtout que des Etats et des personnes ont rapidement été suspectés d’être les probables commanditaires ou les parrains.

Il faut dire que les problèmes naissent généralement du refus du dialogue, de l’alternance et de l’absence de solutions endogènes. L’exaspération est telle que souvent, des personnes ont recours à des moyens radicaux pour crever l’abcès. Pour éviter ce genre d’éventualité fortement condamnable, il y a lieu de prévenir. Mais, le problème en Afrique est que même si le chemin vers la démocratie et le développement est connu, certains préfèrent prendre des détours.

Le Pays

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