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Affaire Hissein Habré : Vers le bout du tunnel ?

Publié le samedi 8 juillet 2006 à 09h52min

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Les organisations de défense des droits humains peuvent de nos jours se réjouir de l’arrestation et du transfert de Charles Taylor à la Cour pénale internationale de La Haye. Mais leur combat ne compte aucunement s’arrêter en si bons chemins.

Il y a en effet le dossier de l’ancien président tchadien qui demeure toujours en suspens. L’affaire Hissein Habré, cet autre dossier pendant de crime contre l’humanité en Afrique, est, selon Amnesty International, un dossier qui doit être jugé.

Pendant son règne ( 1982-1990), Hissein Habré s’est rendu coupable de quarante mille assassinats et environ deux cent milles cas de torture.

Ces faits à lui reprochés par la justice belge qui demande son extradition vers la Belgique et les enjeux politiques de son procès ont fait de cette affaire comme une braise et à propos de laquelle le Tchad ne veut prendre ses responsabilités. Ainsi, le 22 mai dernier à Addis-Abeba, un comité de juristes africains a entrepris d’étudier les diverses options pour que Hissein Habré soit jugé. Ces options ont été soumises à l’appréciation des chefs d’Etat de l’Union africaine à son sommet ordinaire à Banjul en Gambie, les 1er et 02 juillet derniers.

Si à l’Union africaine, les choses semblent traîner, les organisations de défense des droits de l’Homme saisissent cette occasion pour faire monter la pression sur le dossier Habré. Des déclarations, des rencontres avec les journalistes font actuellement l’objet de publication dans les médias. Cette interpellation a pour objectif de mettre fin aux enjeux politiques du dossier pour en faire réellement un dossier courant de justice. Pour Amnesty International/section du Burkina qui a rencontré la presse le 30 juin dernier à l’hôtel Avenir de Ouagadougou, peu importe le lieu ou sera jugé l’ex-dictateur tchadien, l’essentiel est qu’il réponde des faits qui lui sont reprochés devant une juridiction ayant les compétences nécessaires pour se saisir de ce dossier.

Compétences juridictionnelles et enjeux politiques

Hissein Habré doit être jugé et cela ne souffre pas de doute. Cependant le problème du lieu où siégera ce tribunal et sa compétence demeurent posés. La justice du Tchad s’est déclarée incompétente sur ce dossier. Comment faut-il comprendre cette incompétence de la justice tchadienne ?

Quand on sait que sous l’ère Hissein, l’actuel chef d’Etat était le chef d’Etat major de l’armée nationale. Il est donc censé savoir certaines choses sur les violations graves des droits de l’Homme que son président aurait commises en son temps. C’est dire que s’il y a justice, sa part de responsabilité doit être évoquée afin de situer le tribunal. C’est peut-être cet aspect politique du dossier qui a conduit les autorités juridiques de Ndjaména à déclarer la justice tchadienne incompétente à connaître ce dossier.

Cependant l’Etat tchadien peut-il, s’il y a jugement, échapper au verdict de la juridiction qui traitera ce dossier ? Apparemment non ! Hissein Habré a commis les faits qui lui sont reprochés en sa qualité de chef d’Etat. Ainsi donc, au cas où le tribunal condamnera l’accusé Habré à payer des dommages et intérêts aux victimes ou à leurs ayants droit, ce devoir incombe à l’Etat tchadien. Il est donc clair que la fuite en avant de Ndjaména ne sera que de courte durée d’autant plus que l’Etat aura à exécuter la décision de justice en s’acquittant de ce devoir.

Par ailleurs, la responsabilité de l’Union africaine est fortement engagée dans cette affaire. S’étant arrogée le droit de décider de l’issue de ce dossier, l’UA doit prendre la décision qui sied pour donner plus de crédibilité à son action et défendre du même coup l’image d’une Afrique qui sait faire face à ses problèmes de justice.

De plus en plus de voix s’élèvent pour soutenir la création d’une juridiction spéciale africaine compétente pour connaître ce dossier car selon elles, l’Afrique regorge de compétences en droit qui peuvent bien jouer pleinement leur rôle de justiciers.

Une hypothèse qui nécessite que l’on pousse davantage la réflexion à ce niveau. Le droit est universel et l’exemple du tribunal spécial des Nations unies pour la Sierra Leone doit inspirer les dirigeants africains.

Abou OUATTARA

L’Hebdo

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