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Bagré : La grogne des riziculteurs

Publié le jeudi 18 mai 2006 à 08h21min

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N’eût été la présence à Bagré du haut- commissaire de la province du Boulgou, la journée du lundi 17 avril dernier aurait été très mouvementée. Et pour cause, certains exploitants de la plaine rizicole tenaient mordicus à organiser une manifestation contre le chef de la mission chinoise, Lee Chiaa-Meng. Depuis, une crise de confiance est ouverte entre les 2 parties ?

Situé à 45 km de Tenkodogo, le département de Bagré compte 25 426 âmes, selon le recensement de 2004. Il serait difficile de parler de Bagré sans évoquer son barrage, riche en poissons. Sa construction qui a duré de 1989 à 1992 a été rendue possible grâce au concours financier de la Chine Taïwan. Il s’agit d’un barrage hydro¬électrique et agricole.

Aussi attendue que la pluie dans le désert, sa mise en service a été effective en 1993. Ce qui a permis l’aménagement de la plaine rizicole. Ainsi, la riziculture est devenue l’une des principales sources de revenus des populations de la localité, et même au-delà. L’effectif des riziculteurs est en net accroissement d’année en année. La production aussi.

Au total, la rive gauche compte 6 groupements et 634 exploitants. Pour ce qui est de l’Union des groupements villageois (UGV), elle totalise 16 villages dont 1 634 producteurs. 3 techniciens se sont succédé à la mission agricole chinoise : Chenchung, Chung et Feng-Cheng-Ming.

Lee Chiaa-Meng est aujourd’hui aux commandes de cette mission. Une politique de relance accompagnée de mesures incitatives a donné confiance aux agriculteurs. Les rendements moyens à l’hectare ont continué de progresser.

Ces bonnes performances s’expliquent par une augmentation de la fumure, une meilleure utilisation et un dosage mieux approprié des intrants.

Des fonctionnaires-exploitants

L’encadrement des cultivateurs, de même que certaines mesures incitatives telles que la distribution de crédit agricole sont autant de dispositions qui ont motivé les paysans. Même certains fonctionnaires y gagnent leur pain. « Je n’aurais jamais payé ma voiture si je n’avais pas été affecté à Bagré », avoue un "fonctionnaire-exploitant".

A la mission taïwanaise (MT) comme à la maîtrise d’ouvrage de Bagré (MOB), on est unanime sur un point : la riziculture nourrit son homme.

Seulement, voilà qu’un bras de fer est engagé entre certains exploitants et le chef de la M.T., à propos de l’affectation d’un jeune technicien chinois, M. WENG, qui devait remplacer à N’dorola un certain H. Suchung admis à la retraite.

Pour exprimer leur mécontentement, ces exploitants ont tenté d’organiser une manifestation, annulée in extremis grâce à la médiation du haut-commissaire du Boulgou, venu sur place pour calmer les esprits. Tout semblait être rentré dans l’ordre. Mais l’apaisement intervenu dissimule en vérité la réalité des divergences. Il reste que par leur mécontentement, les agriculteurs ont révélé l’existence d’une crise profonde qu’il convient de résoudre sérieusement.

Alors qu’il était en déplacement à Ouagadougou, nous avons pu joindre M. Lee au téléphone, le 16 mai dernier, pour avoir sa version des faits.

Les membres de l’UGV accusent...

La conversation a duré exactement 33 minutes. Né en 1942 à Taïpeh, c’était un vieux routier des techniques culturales furieux que nous avons eu au bout du fil. Il s’est emporté contre 3 personnes qu’il a citées nommément comme instigateurs des troubles : Ernest Yoda (président/VOV), Hamidou Karia (Secrétaire adjoint) et Adama Batongo (Trésorier).

« On a fait d’un rien, une histoire grotesque. Je suis venu au Burkina Faso en 1965 pour apprendre aux paysans les bonnes techniques culturales. Partout où je suis passé, je n’ai eu de problème avec personne. D’ailleurs, j’ai toujours eu beaucoup de respect pour les producteurs, car c’est grâce à eux que je suis sur le terrain depuis 41 ans », explique M Lee.

A écouter le technicien chinois, son passage à la Vallée du Kou reste un souvenir inoubliable pour lui. Il s’est dit ahuri par les propos tenus par un groupe d’exploitants dans un hebdomadaire de la place, le mardi 16 mai dernier. Quant à Youssouf Ouattara, l’un des proches collaborateurs techniques de M. Lee, il a qualifié ces propos de billevesés. « Je ne défends pas M. Lee, loin de là, mais il me paraît ridicule de le traiter d’affairiste et de dictateur », a-t-il affirmé. Devenu presque aphone vers la fin de l’entretien, M. Ouattara prône le dialogue et invite les autorités nationales à prendre le dossier à bras-le-corps.

Selon certaines sources, M. Lee aurait soutenu financièrement l’un des 2 partis politiques censé gerer la commune rurale de Bagré. Le collaborateur de M. Lee s’inscrit en faux contre cette assertion qui, selon lui, est sans fondement. Le chef de la M.T. lui-même s’en défend : « Je ne suis pas un politique mais un technicien ». Mais Hamidou Karia enfonce le clou : « Ce monsieur s’est majestueusement enrichi sur le dos des paysans ». Un peu plus loin, il demande au chef de la M.T. de revenir sur sa décision d’affecter M. Weng à N’dorola. Il risque de quitter Bagré ad vitam aeternam. Boukary Bikienga de la MOB appelle les uns et les autres à mettre de l’eau dans leur vin.

Un autre responsable de la MOB est catégorique : "Il n’y a pas de fumée sans feu."

Il était 8h 30 ce mercredi 17 mai quand nous avons également contacté le premier responsable de la province, Charles Louis Namoano. Même si le haut-commissaire dit comprendre les producteurs, il leur recommande néanmoins la retenue et la patience. Il dit avoir rendu compte à ses supérieurs hiérarchiques de la situation qui prévaut actuellement à Bagré. « Je demande tout simplement aux paysans d’être patients. Nous n’avons pas compétence pour agir directement, il faut passer par la voie hiérarchique », a dit M. Namoano. Avant de raccrocher, le haut-commissaire nous a confirmé qu’il était en route pour Bagré. Sa mission était de rencontrer les protagonistes ainsi que les premiers responsables de la MOB, partenaire technique de la mission chinoise. Aux dernières nouvelles, la rencontre a bel et bien eu lieu. Les producteurs ont exigé le départ du chef de mission.

Par Ben Ahmed NABALOUM

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 13 mai 2013 à 17:25, par Rétinas En réponse à : Bagré : La grogne des riziculteurs

    Qu’on fasse un sondage entre tous les riziculteurs pour savoir qui du taïwanais ou des riziculteurs concernés a raison.

    Les capitalistes ont toujours exploité l’homme !

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