Né au Burkina Faso, Yves Arnaud Ouattara, connu sous le nom d’artiste Yvarno, est le deuxième d’une fratrie de dix enfants. Son enfance est marquée par les nombreux déplacements dus à la fonction de son père, policier, qui oblige la famille à changer régulièrement de cadre de vie. Pour assurer sa stabilité scolaire, le jeune garçon est confié à un certain moment à ses grands-parents maternels à Bobo-Dioulasso. Sa grand-mère, enseignante et exigeante, inculque discipline et rigueur à un petit-fils qu’elle juge turbulent. Une éducation qui contribue à forger la personnalité d’Arnaud Ouattara.

Dès son jeune âge, il est bercé par la musique. Sa mère, artiste chanteuse, fredonne souvent des chansons, lui transmettant sans le savoir une passion qui va s’ancrer durablement en lui. « Ces mélodies qui séduisaient mon âme sans que je le veuille ont fait germer en moi un amour fou pour la musique », confie-t-il. En 2006 par exemple, il intègre la chorale de la paroisse de Bissighin, à Ouagadougou. Durant ce passage, il y affine sa voix et découvre la force du chant collectif. Parallèlement à sa passion pour la musique, il nourrit le rêve d’apprendre un métier technique. Après son CEP, son père l’oriente vers le Cours professionnel le technicien (CPT), où il obtient un CAP en mécanique auto. Dans son évolution, il fait des stages au Burkina. Puis une formation complémentaire au Ghana lui donne un bagage solide. Malgré tout, son cœur, lui, reste tourné vers la musique.

Artiste complet, Yvarno ne se limite pas au chant. En 2015 et 2016, il est double lauréat du concours de « la plus belle phrase d’amour », organisé par Ouaga FM pendant la Saint-Valentin. Ce talent poétique, il l’insuffle aussi dans ses chansons qui mêlent émotions personnelles et réflexions sur la société.

L’aventure américaine : le début d’une carrière d’artiste

En 2016, Yvarno s’installe aux États-Unis. Loin de son pays natal, il doit apprendre à s’intégrer, d’abord en comprenant les lois, les obligations et les usages de son pays d’accueil. « Après, le reste, c’est comme partout dans le monde, avec des jours ensoleillés et des jours sans », ironise-t-il. Mais aux États-Unis, il reconnaît que rien n’est simple dans le domaine musical. Faute de moyens, il doit porter plusieurs casquettes : producteur, manager et artiste à la fois. En 2019, il sort son premier single “Enfant du désert”, une œuvre qui évoque la douleur des familles frappées par le terrorisme au Sahel. Ce morceau deviendra aussi le titre de son album paru en 2023. Il est revenu récemment en 2025 avec “Tèguèrè”, un single en collaboration avec l’artiste Joey le Soldat. À travers ces titres, Yvarno revendique et prône la transmission de l’amour, la solidarité et des valeurs humaines universelles.

En avril 2022, il est sélectionné pour jouer le rôle d’un policier dans « Coûte que coûte, vaille que vaille », un film tourné entièrement à New York par une équipe de réalisateurs majoritairement burkinabè. Cette expérience cinématographique, qu’il décrit comme « très belle et enrichissante », renforce sa polyvalence artistique.

À partir de 2025, il s’ouvre aussi à l’univers de la mode. Il pose pour plusieurs marques, dont COOGI, très en vue aux États-Unis. Avec le soutien de Christian Ruart, un homme de mode aux États-Unis, il multiplie les collaborations et fait de son image un vecteur artistique supplémentaire.

Conscient des difficultés du milieu musical souvent impitoyable, Yvarno fonde son propre label qu’il nomme « Sixième Stratégie », afin de produire et de gérer lui-même ses œuvres. Pour lui, cette autonomie est à la fois un choix artistique et une nécessité. « Faire ce que j’aime est un avantage inestimable, donc porter toutes ces casquettes est plus une fierté qu’une contrainte », dit-il. Cependant, cette indépendance a un coût. Le manque de régularité des revenus oblige parfois l’artiste à cumuler d’autres petits boulots, notamment dans la livraison. Une réalité qu’il assume sans détour.

Pour revenir à sa musique, il faut souligner que Yvarno refuse de s’enfermer dans un seul style. Soul, reggae, musique classique ou encore influences traditionnelles ; son répertoire est varié et suit ses inspirations du moment. Son vécu, son observation de la société et du monde nourrissent ses compositions. Ce mélange des genres lui permet, selon lui, de toucher un public diversifié, tout en affirmant une identité musicale singulière.

Malgré la distance, Yvarno reste profondément attaché à son pays natal. Pour lui, le Burkina Faso est un symbole de l’espoir pour les Africains. Sa musique, ses engagements et ses choix artistiques portent en eux cette volonté de témoigner, d’honorer ses racines et de contribuer, à sa manière, au rayonnement de son pays. Il conseille par ailleurs aux jeunes qui ont un rêve de travailler avec passion car le soutien ne viendra pas des autres. « Même si les choses ne marchent pas comme vous l’espérez, il y a toujours une leçon à tirer », a-t-il conclu.

Farida Thiombiano
Lefaso.net