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Réouverture du corridor ivoirien : La désillusion de certains chauffeurs burkinabè

Publié le lundi 15 mai 2006 à 08h04min

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Dans Le Pays N° 3616 du 08 mai 2006, l’agence IRIN nous apprenait que 29 camions burkinabè ont transporté des balles de coton au port d’Abidjan. Visiblement, le trajet n’a pas été aussi paisible pour les membres de ce convoi comme certaines autorités ivoiriennes l’ont pourtant fait croire.

C’est en tout cas ce qui ressort des propos de quelques chauffeurs et membres de l’Union des chauffeurs routiers du Burkina que Sidwaya a rencontrés dans le grand parking de la douane à Bobo-Dioulasso le 11 mai 2006.

Sié Palenfo, secrétaire général de l’Union des chauffeurs routiers du Burkina : J’ai fait le trajet Bobo-Dioulasso-Abidjan-Bobo-Dioulasso avec le convoi de 32 camions qui transportaient des balles de coton sur le port d’Abidjan. A l’aller, les camions étaient ensemble, mais au retour, ils sont rentrés au Burkina en rangs dispersés. Cela est dû au fait que tous les camions ne sont pas arrivés au port d’Abidjan le même jour et n’ont pas déchargé les balles de coton le même jour.

A l’aller, au premier poste de contrôle des Forces Nouvelles, les éléments trouvés sur place nous ont dit qu’ils n’étaient pas informés de notre arrivée. Ils ont soumis tous les camions au même régime qu’ils appliquent aux véhicules non convoyés c’est-à-dire le paiement de la somme de 112 000 F CFA par camion. On a dû payer de l’argent sans savoir pourquoi puisque pour chaque camion du convoi la somme de 100 000 F CFA a été payée avant le départ. En zone loyaliste, on a eu moins de problème. C’est au retour que des chauffeurs ont affirmé avoir eu des difficultés avec les forces de sécurité aussi bien en zone loyaliste que sur le territoire contrôlé par les Forces Nouvelles.

Hamadou Ouattara, chauffeur : Nous sommes revenus seuls d’Abidjan et au carrefour d’Agboville (zone loyaliste), on nous a dit de payer de l’argent. Nous leur avons fait savoir que nous étions en convoi, mais en retard sur le reste des camions. Les forces de l’ordre trouvées sur place nous ont dit que ce n’était pas leur problème et qu’il fallait absolument payer. Nous avons été amenés dans une maisonnette où nous avons été bastonnés. Chacun a dû payer la somme de 1 000 F CFA avant de recouvrer sa liberté et de rentrer en possession des documents de son véhicule et de son permis de conduire.

Lassina Fofana, trésorier du bureau de l’Union des chauffeurs routiers de Bobo-Dioulasso : Notre délégué nous a fait savoir qu’aussi du côté des Forces Nouvelles que des loyalistes, les chauffeurs de ce convoi ont rencontré des problèmes. A notre avis, la venue des chauffeurs burkinabè en territoire ivoirien n’est pas du goût des Forces Nouvelles et des loyalistes et leur récent comportement vis-à-vis d’eux le prouve. En dehors des cas où ils sont en convoi, les chauffeurs subissent toutes sortes de tracasseries et de rackets. Pour les autorités burkinabè qui ont suivi ce convoi, tout est rose alors que dans la réalité, les chauffeurs sont emmerdés individuellement.

Lorsqu’il y a des rencontres entre autorités ivoiriennes et burkinabè, les Ivoiriens font des promesses qu’ils ne respectent pas toujours sur le terrain et ce sont les chauffeurs qui en font les frais. Tant que la situation de crise perdurera en Côte d’Ivoire, nous ne souhaitons pas emprunter ce corridor parce qu’on n’est pas sûr de la sécurité des chauffeurs et on nous rackette trop sur la route. Par ailleurs, dans la ville d’Abidjan, on n’a pas du tout la paix, on ne peut même pas circuler en ville. Les routiers n’y ont pas jusqu’à présent intérêt à prendre la route de la Côte d’Ivoire.

Les balles de coton sont assurées tandis que les chauffeurs ne le sont pas. Ils prennent donc la route à leurs risques et périls. Nous pensons que ce sont ceux qui ont leurs intérêts en Côte d’Ivoire qui tiennent à ce que les chauffeurs burkinabè y aillent, même au péril de leur vie. On se rappelle ce qui est arrivé à quelques-uns d’entre eux aux temps forts de la crise ivoirienne. Personne n’était intervenu à l’époque pour les faire libérer. Nous ne souhaitons pas que pareille situation se reproduise pour des chauffeurs burkinabè.

Madi Warmé, chauffeur : Bien que nous ayons payé 100 000 F CFA pour le convoi, au retour, à Yamoussoukro (zone loyaliste) on a retiré tous nos documents et ceux des véhicules. On nous a fait dormir et le lendemain matin, les forces de sécurité ont fait payer à chacun 7 000 F CFA. En zone rebelle, on nous fait payer entre 1 500 F CFA et 3 000 F CFA.

A Bouaké, on nous oblige à payer 15 000 F CFA pour les macarons et à la Léraba, du côté ivoirien, il faut encore payer 11 000 F CFA. En territoire burkinabè nous avons dû payer 5 000 de la Léraba jusqu’à Bobo-Dioulasso aussi bien aux postes de police que de gendarmerie. On était tout le temps obligé de négocier pour pouvoir passer. On peut comprendre qu’en Côte d’Ivoire on nous rackette, mais pas au Burkina quand même !

Propos recueillis par Urbain KABORE

Sidwaya

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