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Contrefaçon : La gangrène du commerce mondial

Publié le vendredi 12 mai 2006 à 07h30min

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La contrefaçon s’avère, de plus en plus, un fléau redoutable qui ébranle le commerce international, réduit les chiffres d’affaires des entreprises et détruit les économies nationales. Elle sevit comme une autre pandémie en Afrique.

« Sil le terrorisme n’existait pas, la contrefaçon serait l’acte criminel le plus important de ce XXIe siècle. Tout ce qui est d’usage est contrefait. C’est une industrie qui investit, produit, transporte et s’appuie sur une logistique ».

A travers cette alerte, Michel Danet, secrétaire général de l’Organisation mondiale des douanes (OMD) attire l’attention de la communauté internationale sur une gangrène qui mine le commerce mondial et les économies nationales. Selon le Petit Robert, la contrefaçon est « une reproduction par imitation de toute œuvre (littéraire, artistique ou industrielle) au préjudice de son auteur ou de son inventeur ». Elle transgresse les droits de la propriété industrielle et tire sa référence du non respect de la qualité.

Aucun produit n’est épargné : cigarettes, produits numériques, matériel informatique, jouets, textiles, produits alimentaires, comestiques, parfumérie, médicaments, pièces détachées d’automobiles ... Avec la mondialisation, la contrefaçon a pris de l’ampleur. Elle s’est enracinée, délocalisée et internationalisée. « La contrefaçon s’est massivement criminalisée et mondialisée », prévient Marc Antoine Jamet, président de l’Union des fabricants en France.

L’Organisation pour la Coopération et le Développement en Europe (OCDE) dénombre une soixantaine de pays de contrefacteurs. Ainsi, 70% des produits contrefaits proviennent de l’Asie et 30% du Bassin méditerranéen. L’économie de la contrefaçon genererait entre 75 et 90 milliards d’Euros. Elle ébranle la commerce international et met les grandes marques (Nike, Sony, Adidas, Lacoste, Puma, ...) dans la tourmente.

Car la contrefaçon repose sur l’usage du faux et de la confusion. Ainsi « Abidas, Mike, Laccoste, Sonny ou Yves Saint Lorent » sèment le trouble aussi bien sur les marchés que dans l’esprit des consommateurs. Lacoste, la marque au crocodile débourse à elle seule, quatre (4) millions d’Euros par an soit 3 milliards de F CFA, pour lutter contre la contrefaçon. Bien entendu, contrefaçon rime avec fraude et corruption. Pour ce faire, elle détruit les emplois et prive les caisses de l’Etat de rentrées fiscales. L’OCDE estime qu’à cause de la contrefaçon, environ 200 000 emplois sont annuellement perdus en Europe dont 30 000 en France. Le Trésor français subirait également la perte de six (6) milliards d’Euros de recettes. Face à l’ampleur du phénomène, les pays européens ont élaboré diverses stratégies pour préserver « la capacité d’innovation de leurs entreprises » et sécuriser leurs économies. Ainsi, les douaniers réclament pour chaque marchandise, traversant les frontières, une « pièce d’identité ». « L’Etat de surface de chaque matériau lui est propre. C’est une signature qui permet de distinguer chaque produit de manière unique et de l’immatriculer », souligne Pierre Delval chargé de mission « anticontrefaçon » au ministère français de l’Economie, des Finances et de l’Industrie. Demander des papiers à chaque produit assure ainsi leur traçabilité à travers le monde. Mais cette précaution prise en Europe ne se ressent pas sur tous les continents. Si l’Asie se présente comme le cerveau de cette pandémie des affaires, la contrefaçon trouve mieux son assise en Afrique. Le continent noir reste le terrain privilégié des produits contrefaits. Des produits de divers horizons et origines inondent les pays africains. La firme de Bill Gates, Microsoft subit 80% de piratage de ses logiciels en Afrique de l’Ouest et du Centre.

L’Afrique, « la dernière et la championne »

Selon l’OCDE, la contrefaçon occupe entre 8 et 10% du commerce international. Une part bien au-dessus de celle de l’Afrique. Le continent ne pèse que 2% dans les échanges commerciaux au niveau mondial. Mais cette place insignifiante ne semble pas interpeller ses 53 pays sur leur responsabilité à combattre activement la contrefaçon. En dehors des missions assignées à l’Organisation africaine de la propriété intellectuelle (OAPI) pour sécuriser la création et l’invention, aucune décision politique d’envergure sous-régionale et continentale ne vise à lutter contre la « gangrène ». Si la Tunisie et le Maroc se sont engagés « fermement » à combattre avec des mesures répressives, la contrefaçon des produits de luxe français, en Côte d’Ivoire et au Sénégal, l’heure est encore à « la sensibilisation, l’explication, la proposition d’assistance ». Et de nombreux pays restent le théâtre des effets néfastes des produits contrefaits. Il y a quelques années de cela, les 80 000 doses de vaccin commandées par un Etat ouest africain pour lutter contre la méningite se sont révélées contenir de l’eau. Au-delà du péril humain, la contrefaçon entraînera un jour un suicide social en Afrique. En première ligne, se trouve l’industrie phonographique et les milliers de musiciens dont les œuvres sont piratées en Asie pour être ensuite vendues dans leur propre pays à de vils prix.

Au Burkina Faso, les échauffourées entre opérateurs économiques autour de marques de motos n’ont suscité aucune réaction officielle de la part des pouvoirs publics. Qui a raison et qui a tort dans un contexte marqué par la fraude ? Pire, des entreprises nationales telles la MABUCIG et la SN-CITEC doivent faire face à la contrefaçon permanente de leurs produits tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du pays. L’emballage ne constitue plus aujourd’hui une preuve d’originalité.

Le consommateur n’est pas sûr « d’acheter le vrai » même s’il y met le prix. Aussi, le doute permanent sur la qualité compromet la santé des clients. La contrefaçon fragilise les Africains et leur économie. C’est une autre pandémie qui sévit sur le continent noir.

Jolivet Emmaüs (joliv_et@yahoo.fr)


Les grands types de contrefaçon

Il existe quatre grands types de contrefaçon :

* La contrefaçon de marque : copie ou imitation, détention, vente ou importation, sans autorisation, d’un signe servant à distinguer un produit ou un service, déposé à l’INPI (Institut national de la propriété industrielle). En France, la protection de la marque est de 10 ans renouvelable indéfiniment.

* La contrefaçon littéraire et artistique : reproduction, importation ou vente d’une œuvre littéraire ou artistique originale, sans autorisation de l’auteur. Cette protection est de 70 ans post-mortem.

* La contrefaçon de dessins et de modèles : copie, vente ou importation, sans autorisation, d’un projet qui se distingue par des caractéristiques d’apparence extérieure et typographie, et qui a fait l’objet d’un dépôt à l’INPI. La protection est de 25 ans, renouvelable une fois.

* La contrefaçon de brevets : copie, importation ou vente, sans autorisation d’une invention nouvelle impliquant une activité inventive, susceptible d’application industrielle et ayant fait l’objet d’un dépôt de brevet à l’INPI. La protection est de 20 ans à compter de la date de dépôt.

C’est ainsi que le médicament peut être contrefait de différentes façons. (Soit la contrefaçon concerne la marque) :

. apposition de la marque cherchant à créer un risque de confusion dans le public, par exemple : Barbie/Babie,

. usage d’une marque sans l’autorisation de son propriétaire, par exemple : T-shirt noir Reebok,

. substitution de produits : un Pepsi servi à la place du Coca-Cola commandé,

. reproduction frauduleuse de la marque sur un produit qui n’est pas fabriqué par cette marque, par exemple : les ballerines Vuitton,

. imitation totale ou partielle de la marque d’autrui par exemple : Henri Martin/Rémy Martin.

J.E.S.P
Source : L’Usine Nouvelle N°2993 du 19 janvier 2006


La géographie de la contrefaçon

On dénombre une soixantaine de pays de contrefacteurs.

Les produits proviennent pour 70% de l’Asie et pour 30% du Bassin méditerranéen.

En Asie du Sud-Est, plusieurs pays contrefont dans des domaines divers :

- La Thaïlande : textile, maroquinerie, horlogerie, médicament, ...

- La Chine : CD, logiciels, chaussures, parfums, alcools, ...

- La Corée : tous types de produits

- Taïwan : tous types de produits.

Dans le Bassin méditerranéen, on trouve essentiellement :

- L’Italie : textile, cuivre, orfèvrerie, horlogerie, pièces détachées, chaussures, édition, électronique, audio, vidéo.

- L’Espagne : jouets, parfums, maroquinerie, textile, bijouterie.

- La Turquie : machines, pièces détachées, parfums, cosmétiques, pharmacie.

- Le Maroc : cuir et textile.

J.E.S.P
Source : L’Usine Nouvelle N°2993 du 19 janvier 2006

La cote des pays contrefacteurs

Ceux où la contrefaçon recule :

- Le Japon : la production locale reste active et il y a une consommation de produits importés de Taîwan, de Corée et d’Italie

- Hong-Kong : il existe un véritable souci d’apparaître comme un pays industrialisé mais les exportations vers des pays contrefacteurs de pièces détachées d’horlogerie se poursuivent

- Taïwan : des mesures ont été prises dans l’industrie horlogerie afin de diminuer le trafic.

Les champions :

- La Corée : elle fabrique les bracelets et les boîtiers de montre et elle importe les mécanismes de Hongkong.

- La Thaïlande : il s’agit du pays le plus actif dans le secteur du textile, du cuir et de la joaillerie

- Singapour : il y a peu d’industries de contrefaçon mais un important commerce d’articles de luxe importés de Thaïlande, des Philippines et de Taïwan.

- L’Italie : elle est spécialisée dans la contrefaçon des cuirs, des soies et des textiles.

Les nouveaux venus :

- La Grèce et le Portugal : la contrefaçon de cuir s’y développe

- L’Espagne est très orientée vers l’exportation

- Le Bénélux est un pays de transit ainsi que d’assemblage, de marquage et de distribution de pièces détachées

- La Turquie est spécialiste du cuir et du textile et ses marchés d’exportation sont orientés vers l’Europe occidentale

- La Grande-Bretagne se consacre essentiellement au domaine de la parfumerie

- La Russie est un pays de consommation, du fait du développement du marché parallèle.

J.E.S.P
Source : L’Usine Nouvelle N°2993 du 19 janvier 2006

Sidwaya

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