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La contribution de la radio SAVANE FM au renforcement de la culture burkinabè et au développement à travers la rubrique « pensée et proverbe du jour » de l’émission "Sonre"

Publié le vendredi 23 mai 2025 à 11h37min

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La contribution de la radio SAVANE FM au renforcement de la culture burkinabè et au développement  à travers la rubrique « pensée et proverbe du jour »  de l’émission

Dr Patrice KOURAOGO, Maître de recherche en Sociologie de la culture à l’Institut des Sciences de Sociétés au Centre National de Recherche Scientifique et Technologique (CNRST). Kouraogopat@gmail.com, kou_patrice3yahoo.fr, tel : 70964891

Résumé

Dans le but d’apporter sa contribution à la lutte pour la sauvegarde du patrimoine cultuel burkinabè, la radio Savane FM, émettant sur la fréquence de 103.4 MHz à Ouagadougou au Burkina Faso a inséré dans son émission intitulée "Sonre", une rubrique nommée « pensée et proverbe du jour ». Elle consiste à lire et à commenter une pensée et un proverbe pour les auditeurs. Nous y avons consacré une étude dont l’objectif est d’analyser la contribution de cette tranche de l’émission au renforcement de la culture burkinabè et au développement du pays. Nous émettons l’hypothèse que la rubrique est un tremplin de promotion de la culture et du développement au Burkina Faso car elle invite à considérer la culture burkinabè comme gage du progrès. Il ressort effectivement que les proverbes et les pensées apparaissent aux yeux des auditeurs comme des outils de socialisation et de questionnements des enjeux vitaux des populations.
Mots-Clefs : proverbes, pensées, radio Savane FM, culture, développement, moore.

Introduction

Ce document de vulgarisation est tiré d’un article scientifique intitulé : "Analyse sociologique des aspects éducatifs et socioculturels de la rubrique « pensée et proverbe du jour » dans l’émission Sonre de la radio SAVANE FM au Burkina Faso " : in Patrice Kouraogo ( 2024), International Journal of Innovation and Applied Studies ISSN 2028-9324 Vol. 43 No. 1 Jul. 2024, pp. 96-111 © 2024 Innovative Space of Scientific Research Journals http://www.ijias.issr-journals.org/ "International Journal of Innovation and Applied Studies ISSN 2028-9324 Vol. 43 No. 1 Jul. 2024, pp. 96-111 © 2024 Innovative Space of Scientific Research Journals http://www.ijias.issr-journals.org/.

Face à la déliquescence des valeurs et richesses culturelles au Burkina Faso, des acteurs engagés pour préserver des acquis culturels et identitaires se posent en défenseurs et s’assument pleinement. C’est le cas de la radio Savane FM (103.4 MHz), une radio qui s‘illustre dans la promotion de la culture burkinabè par le truchement de son émission matinale « Sonre », à l’intérieur de laquelle une rubrique est consacrée à la « Pensée et au proverbe du jour ». Elle est de la création du PDG de la radio, Zida Aboubacar (Sidnaaba), qui en fait une tribune de sauvegarde et de défense des principes moraux, des traditions locales et donc de la culture simplement mais aussi un chantre de développement.

La question centrale est : Comment cette rubrique participe-t-elle à la promotion des valeurs culturelles burkinabè et au développement par ricochet ? L’hypothèse stipule que cette rubrique est un tremplin de promotion de la culture et du développement au Burkina Faso car elle fait de la culture burkinabè un gage du développement. L’étude analysera, la contribution de la rubrique « Pensée et proverbe du jour » à la sauvegarde culturelle et au développement du Burkina Faso.

1-Méthodologie de collecte des données

L’étude a adopté une approche qualitative, combinant entretiens, analyse d’échantillon et recherche documentaire. Pour ce qui est des entretiens, 26 personnes ont été interrogées (le promoteur de l’émission, 2 journalistes et 23 auditeurs). Nous avons fait la répartition entre 22 hommes et 4 femmes (dont 11 issus de la diaspora et le reste réparti sur le territoire national). La période d’enquête fut du 23 mars au 19 juin 2022, avec pour objectif, d’évaluer l’appréciation des auditeurs et comprendre leurs motivations d’écoute.

Pour ce qui est de l’analyse d’échantillon, 41 pensées et proverbes (initialement en moore) ont été transcrits et traduits en français. La source est un enregistrement de 2h47 issu d’une émission spéciale du 6 août 2017, résumant deux semaines de diffusion. Le but est d’illustrer l’impact des proverbes sur les comportements des auditeurs et, par extension, des populations.

La recherche documentaire a conduit à l’exploitation d’ouvrages sur la culture, l’éducation, les médias et les valeurs sociales. Nous avons fait appel à un cadre d’analyse de sociologie de la culture, examinant les liens entre culture, médias, éducation et développement.

2- Analyses et interprétions des résultats

2-1- Radio Savane FM : un choix éditorial tourné vers la culture burkinabè

Selon, une étude commanditée par le Fonds d’appui à la presse privée (FAPP) en 2022 et exécutée par l’Institut National de Statistiques( INSD) du Burkina Faso, on retient les résultats suivants sur l’audience des médias qui donnent le top 5 des médias les plus suivis au Burkina Faso. En catégorie radio, Savane FM Ouaga vient en tête, suivie de la RTB/Radio, la Radio Oméga en 3eme place, la radio Savane FM Bobo en 4eme position et en 5eme position la radio Ouaga FM.

Source : https://burkina24.com/2022/04/14/burkina-faso-les-medias-les-plus-suivis-selon-le-fapp/: consulté le 03 Août 2022

L’un des faits qui explique ce positionnement de cette radio est son option de travailler dans le créneau culturel et d’assurer la promotion des valeurs, des richesses endogènes. D’ailleurs, le chef de programme, Monsieur Somda Gervais (KOURAOGO, 2004) justifiait ce choix en ces termes :

« La ligne de Savane FM est spécifique. Nous avons fait une option de donner la parole à la majorité “analphabète”, c’est- à -dire ceux qui n’ont pas eu la chance de partir à l’école. Nous défendons la culture locale, l’âme de la société traditionnelle africaine….Notre radio s’est positionnée comme promotrice de la culture locale et protectrice de l’identité culturelle de la société traditionnelle africaine. »

En effet, cette radio commerciale a été créée en 2001 et diffuse 90 % de son programme en langues locales surtout le moore. Parmi ses émissions phares, il y a une dénommée "Sonre" qui passe du lundi au vendredi de 5h30 à 8h00 et qui consiste à faire une revue et une lecture des journaux en langue nationale Moore, une de la soixantaine des langues parlées au Burkina Faso. Elle est une revue de presse. On y a inséré des proverbes et pensées commentés, introduits par le PDG Zida Aboubacar (Sidnaaba). Ces outils ont un impact évident sur la culture et le développement par les changements qu’elle produit dans le comportement quotidien des auditeurs. Pour le PDG, ses sources d’inspiration viennent de la tradition orale (grand-mère de Sidnaaba, le Larlé Naaba( figure emblématique de la promotion des contes Moose)) et des créations originales, souvent liées à l’actualité brûlante, interpellant les auditeurs.

2-2-Contribution de la rubrique « pensée et proverbe du jour » à la promotion de la culture et du développement au Burkina Faso

D’emblée, nous faisons appel aux constats de deux auteurs. Traitant la contribution des genres oraux que sont les contes et proverbes, les légendes et devises dans le développement du Burkina Faso dans notre thèse de doctorat (Kouraogo, 2012), nous sommes arrivé à la conclusion qu’« ils sont des outils exploitables dans plusieurs domaines. Ils peuvent bien traverser les âges en s’adaptant à la modernité, aux besoins de la société et continuer à procurer du plaisir et à transmettre les éléments de la culture tout en continuant à assumer leur rôle d’agents de socialisation. De la culture à la politique en passant par l’environnement et la santé, ils suscitent des questionnements sur les problématiques existentielles auxquelles les individus font face pour leur survie ». Cela sous-entend que les pensées et les proverbes dont il est question ici, restent des outils de promotion de la culture mais aussi du développement dans la mesure où ils répondent aux besoins de transmission des éléments de socialisation mais également aux questionnements sur les problèmes vitaux des populations. Leur exploitation judicieuse par la radio Savane FM que nous avons analysée répond à la logique du développement décrite par Ki- Zerbo(1992), qui arguait que : « Il est un phénomène total qu’il faut embrasser dans toute sa totalité. Les aspects les plus intimes du développement sont presque indéfinissables et impalpables, comme le bonheur, la santé, la joie, comme le rapport à la cuisine, à l’habillement, à l’artisanat, à l’art ou encore à la finesse et au raffinement des expressions dans certaines langues ».

Pour revenir à nos enquêtes, elles révèlent que l’émission ne se limite pas uniquement à l’éducation, à la vie familiale et professionnelle mais aussi et surtout elle contribue à la promotion de la culture. Pour les répondants, elle sert de cadre d’apprentissage et de valorisation de nos pratiques culturelles. Elle contribue à la conservation et à la pérennisation des éléments d’expression de nos valeurs comme c’est le cas des proverbes qui sont représentatifs de chaque culture et de chaque communauté. Pour certains d’entre eux, l’émission est même un pilier de la culture et occupe ainsi une place de choix et cela grâce à la langue utilisée qui est le moore. Avec l’évolution de la société, nous perdons de plus en plus les déterminants de l’identité culturelle burkinabè. Or, cette émission nous permet de les conserver en donnant l’occasion et le moyen d’échanger et de communiquer chaque jour autour des valeurs culturelles. Pour se convaincre, consultons les avis de quelques répondants sur le poids de cette émission dans la promotion de la culture burkinabè.

Pour l’Enquêté3 : « Si je vais estimer en termes de poids l’influence de cette émission sur la promotion de la culture au Burkina Faso, ce serait à 90%, pour ne pas dire 100%. Comme c’est le moore qui y est parlé, cela permet à la majorité de la population de perpétrer un certain nombre de valeurs entre cette génération et celle future ». L’Enquêté8 embouche la même trompette : « oui ! À 100% cette émission contribue à la promotion de la culture. Déjà la majorité des Burkinabè ne comprennent pas français. Comme l’émission se fait en langue locale cela leur permet de comprendre et de participer également à la prise des décisions. L’émission favorise le développement de la culture ». Nous constatons que le fait même d’utiliser la langue locale directement à l’antenne et de dire les pensées et les proverbes dans cette langue est considéré comme un acte salvateur d’un pan de la culture. « La langue est une manifestation de l’identité culturelle, et tous les apprenants, par la langue qu’ils parlent, portent en eux les éléments visibles et invisibles d’une culture donnée. » ( G. Zarate et A. GohardRadenkovic, 2003 : p57) .

C’est dans le même sens qu’il faut entendre le point de de l’Enquêté 11 : « oui, c’est fondamental la langue car sans langue on ne peut communiquer et sans communication pas de culture. Cette émission est le canal parfait de promotion de nos valeurs culturelles. Chacun doit connaitre sa langue maternelle sinon tu n’es rien » et celui de l’Enquêté 21 : « Rien que le fait d’utiliser la langue locale pour véhiculer le message c’est primordial parce que sans langue qui est un moyen de communication, il n’y a pas de culture. C’est le préalable et cette émission met en valeur nos langues locales ».

Nous pouvons dire là aussi qu’il y a une congruence entre les points de vue des enquêtés et la vision de l’initiateur de l’émission car à la question de savoir quel lien y a-t-il entre les proverbes et les pensées et la culture burkinabè, celui-ci explique que si une personne veut avancer, elle doit prendre soin de ces racines : « Une personne est comme un arbre. Chaque individu a son don. A chacun de le mettre en valeur. Le malheur des africains vient des religions et l’éducation moderne qu’on les enseigne car elles empêchent le noir de s’épanouir. Cette éducation nous a complètement déracinés ».

Au-delà même de la promotion de la culture, cette émission contribue au développement parce que grâce à elle, beaucoup de personnes qui ne comprennent pas la langue française arrivent à communiquer et à participer à la prise de décision concernant l’avenir de leur pays. C’est ainsi un moyen de développement car elle place les populations au cœur de la compréhension, de la décision et de l’action comme en témoigne l’Enquêté 22 : « Regardez au Burkina Faso, plus de la majorité ne comprennent pas le français. Pourtant, les informations officielles sont dans cette langue. Ce qui complique les choses. Mais, cette émission met la population au cœur de l’action, ce qui permet à tout le monde de participer à sa façon au développement du pays ».

On dit d’un citoyen qu’il participe au développement de son pays, s’il a une conscience claire des enjeux et défis au plan individuel, communautaire, national , régional et international et est doté des outils intellectuels, culturels, professionnels, etc… lui permettant de contribuer à la survenue du changement, c’est-à-dire relever ces défis et enjeux.

De façon concrète, l’individu doit être formé et rendu apte sa participation dans tous les domaines concernant la marche de la Nation. Par exemple, sur le plan politique ou de participation citoyenne pour l’enracinement de la démocratie, les Burkinabè de tous les milieux doivent être amenés à y participer. Voilà pourquoi, nous stipulions : « L’exercice de la démocratie tient compte de plusieurs paramètres historiques, sociologiques, et culturels. La culture démocratique doit être cultivée au sein de la population burkinabè à majorité analphabète. Elle passera forcément par des instruments de l’oralité comme le théâtre, le cinéma, les contes et légendes, proverbes et devises ». (P. KOURAOGO, 2013).

C’est ainsi que dans le domaine de la gouvernance, nous pouvons retenir quelques proverbes et pensées de notre répertoire étudié qui permettent de renforcer les capacités des auditeurs. Le bon vivre-ensemble est le socle de tout début de développement. Lorsque Sid-naaba dit : « Arzeksa Tăanb n be : zems taaba ne sũur laafi zak pυgẽn , zems taaba ne sũur laafi sak pυgẽn, nõnglem foo ne f ba-yiirăn » (Traduction : il y a trois grandes richesses dans le monde : "l’entente et la paix du cœur dans sa famille"," l’entente et la paix du cœur dans son quartier", "l’amour inconditionnel de sa patrie"), il convient que le plus grand bien, c’est l’harmonie avec soi-même, l’entente dans son entourage et l’amour pour son pays. Cela invite les auditeurs à cultiver les bonnes attitudes du bon vivre-ensemble à la maison, dans la société et dans le pays.

En outre, beaucoup de proverbes et de pensées sont adressés aux auditeurs pour les prodiguer des conseils dans d’autres dimensions de la vie. C’est ainsi qu’il est conseillé que « Rabεεm la rawa » (Traduction : le peureux est le brave ou le victorieux) » puisque la peur évite l’entêtement bovin ou suicidaire. Il y a de situations où toute opposition ou tout refus équivaudrait à un suicide. D’ailleurs, un autre proverbe dit que souvent « c’est la maison du père du peureux qui sera bien construite » (Rabεεm ba zaka n meeda). Cela sous-entend qu’il se serait mis à l’abri pour être utile après).

Sur les critiques infondées qui prennent la forme de médisances, l’auteur de l’émission attire l’attention sur leurs effets dévastateurs :« fo sẽn yũũf to ziim n são f sěn widaa poorẽn ».(Traduction : boire le sang d’autrui est moins grave que de le critiquer en son absence). Critiquer quelqu’un à son absence est une médisance car cela ne lui donne pas l’occasion de se défendre ni de s’expliquer et c’est uniquement l’accabler de tous les péchés d’Israël de façon hypocrite.

La complexité des relations sociales recommande aux individus l’adoption des comportements et d’attitudes conformes aux situations qui se présentent à eux. C’est ainsi que pour fuir la pauvreté et la misère, la seule alternative c’est de travailler sans relâche comme indiqué dans ce proverbe : « Tond săn n dat n zoe n põns fara la naongo sěn pogd tõnd hal d rogme, riila d tũm wusgo, la d gũus bilfu (Traduction : si nous voulons nous échapper de la misère et de la pauvreté qui nous poursuivent depuis notre naissance, nous devons travailler beaucoup et dormir peu). Seul le travail procure la richesse et le bonheur.

Tenant compte que ces relations sociales peuvent être pourries par la traitrise et que l’ennemi souvent ne vient pas de loin, la précaution est enseignée par cette pensée : « Wagdr săn zems ne zak pυυgẽn tυmt υmda, b toě n yiisa naaf sû-piim võnr pυgẽné » (Traduction : Si un voleur a pour complice quelqu’un à l’intérieur du domicile, les deux peuvent faire passer un bœuf par le trou d’une aiguille). Concrètement, les trahisons les plus inimaginables sont la plupart du temps réalisées avec des complices souvent inattendus. Il faut toujours craindre plus l’ennemi de l’intérieur car il est plus nuisible que celui de dehors. La pire traitrise vient de l’intérieur et de ceux que vous faites confiance.

Dans la même veine, « Tags song pa be ne ned ning sẽn dιka torse n kõ zoang sẽn kẽnd lik pυgẽn ye ». ( Traduction : Celui qui offre une torche à un aveugle pour qu’il s’en serve dans la nuit noire est de mauvaise foi) traduit l’expression de la mauvaise foi. Elle consiste ici à offrir à quelqu’un des choses qu’il ne peut pas s’en servir. Cela signifierait que le donateur ne veut pas aider réellement mais donne l’impression de vouloir le faire. Du coup, l’homme est complexe et difficile à cerner aussi bien dans ses intentions que dans ses actes car pour l’initiateur de l’émission, « Tõong m băng tẽns piiga yaa naana, la Tõong m bang nìn-saala a ye yaa toogo »(Traduction : il est plus facile de connaitre 10 pays que de connaitre de fond en comble un individu).

Dans le cadre de l’amitié, un climat de confiance doit régner. Un tel climat est propice pour partager un certain nombre de choses telles les secrets, les peines et les joies. Mais dans la pratique, il est toujours mieux d’observer une grande prudence dans le partage de secrets. C’est ce que ce proverbe invertit : « Fo sěn pa rat ti f bε wa bang bűmb nînga, ra rik rě n togs f som soab ye » (Traduction : Ce que tu ne veux pas que ton ennemi apprenne, ne raconte pas ça à ton ami). Pour mieux conserver un secret, évite de ne le dire à personne, même à ton ami intime. Celui-ci peut devenir ton pire ennemi, il peut également le raconter au point que ça tombe dans les oreilles de ton ennemi.

A propos du partage des joies et des peines, les êtres humains sont plus sensibles aux peines comme le témoigne cette pensée : « Ned nînga sẽn naaga yămb n la wa , yămb toẽ n yima a soaba yelle. La ned nìng yămb sěn naag n yăb ne wă, yămb pa toẽ yimb yẽn soaba yell tao tao ye » (Traduction : La personne avec qui vous avez ri ensemble, vous pouvez l’oublier vite mais celle avec qui vous avez pleuré ensemble, il est très difficile de ne plus vous en souvenir d’elle). Autrement, on oublie rarement les peines et les douleurs que l’on a vécues. Par contre, les joies et les moments agréables sont susceptibles d’être oubliés car ils marquent peu.

Les expériences et le passé du vécu de l’homme doivent lui permettre de mieux exploiter les opportunités du présent pour ne pas avoir des remords dans le futur. Voilà pourquoi l’émission conseille qu’il existe quatre choses difficiles à rattraper : « Yεla naas n be ti tõnd ka toě n diga n yõk ye » : kugr sěn lobge, gomd sěn yi noorě, lohorom bi zũ –noogo, wakat sěn yõsge »(Traduction : Il y a quatre choses dans la vie qui sont difficiles à rattraper lorsqu’elles sont passées. Il s’agit : d’"une pierre lancée dans l’air", de "la parole, une fois prononcée", du "bonheur ou la chance passé(e)", du "temps perdu"). Il est prudent de savoir saisir la balle au bond.

Savoir éviter certains pièges comme des personnes aigris qui ont une capacité de nuisance réelle est aussi important que pouvoir saisir les belles opportunités. A ce titre, on convient avec ces mises en gardes : « Fo săn n dat tifo raara yi sõma, n baas neere yi-beog făn bif bõns wěnd n da sεg sũ-to rămba tănb ye, yaa : waaf sěn pogle , ned sěn teega taaběn vi,pag sěn naa paam pog-toa paalm » (Traduction : Si tu vas passer une bonne journée, prie le matin ne pas rencontrer trois frustrés que sont le matin :-un serpent blessé, quelqu’un qui vit au dépend des autres, une femme qui vient d’avoir une coépouse). Quelle que soit la capacité d’un individu d’encaisser des coups, il lui sera difficile d’être en bons termes avec ces trois prototypes d’aigris car ils n’ont plus confiance ni en eux ni aux autres.

Dans la vie sociale, très souvent l’être humain possède des richesses qu’il ignore la vraie valeur jusqu’au jour où il les perd et s’en rend compte, mais, c’est trop tard. C’est ce que dit cette pensée « Ădem-biig tara arzεksa a tănbo n pa mib b yõõndo săn pa raar nînga a sě n wat n koonga yeembre, la bangda yôda :laafi, soog m menga, zămaan găe laafi ». (Traduction : l’être humain possède trois richesses qu’il ignore leur importance jusqu’au jour qu’il les perd. Il s’agit de la santé, de la liberté et de la paix sociale). En effet, la santé, la liberté et la paix sociale sont des grands trésors pour l’homme mais il semble les négliger jusqu’au jour où il en perd une des trois. Il nous faut donc bien entretenir notre santé et travailler à préserver notre liberté et la paix sociale. Pour couronner tout, on doit cultiver la sagesse car elle rend utile et immortel d’où la pensée : « Yam soabă sěn vimd n vink yυmda ye săo yalm sěn viim yυm katεka ». (Traduction : une année de vie d’un sage vaut mieux que mille ans de vie d’un idiot). Après avoir passé en revue les différents apports des pensées et les proverbes diffusés dans ce média, il convient de proposer des pistes tendant à améliorer l’appropriation de cette rubrique.

Conclusion

La promotion de la culture et du développement au Burkina Faso ne sont pas ignorés dans cette partie de l’émission sonre. En effet, les pensées et les proverbes restent des outils de promotion de la culture mais aussi du développement dans la mesure où ils répondent aux besoins de transmission des éléments de socialisation mais également aux questionnements sur les problèmes vitaux des populations. Pour les répondants, cette tribune sert de cadre d’apprentissage et de valorisation de nos pratiques culturelles. Elle contribue à la conservation et à la pérennisation des éléments d’expression de nos langues comme les proverbes qui sont représentatifs de chaque culture et de chaque communauté. Enfin, elle contribue au développement parce que grâce à elle, beaucoup de citoyens participent aux prises de décision concernant l’avenir de leur pays puisqu’elle place les populations au cœur de la compréhension, de la décision et de l’action publique.

Références

 Patrice KOURAOGPO ( 2024), Analyse sociologique des aspects éducatifs et socioculturels de la rubrique « pensée et proverbe du jour » dans l’émission Sonre de la radio SAVANE FM au Burkina Faso, International Journal of Innovation and Applied Studies ISSN 2028-9324 Vol. 43 No. 1 Jul. 2024, pp. 96-111 © 2024 Innovative Space of Scientific Research Journals http://www.ijias.issr-journals.org/ "International Journal of Innovation and Applied Studies ISSN 2028-9324 Vol. 43 No. 1 Jul. 2024, pp. 96-111 © 2024 Innovative Space of Scientific Research Journals http://www.ijias.issr-journals.org/.

 Ministère de la communication et des relations avec le parlement, DGESS, 2018, Etude des radios du Burkina Faso : typologies, audience et perspectives, 288 pages.
 G. Zarate, Gohard-Radenkovic, A., Lussier, D., Penz, H. 2003. Médiation culturelle et didactique des langues. Strasbourg : Edition du Conseil de l’Europe : https://arlap.hypotheses.org/10669: consulté le 18 Août 2022.
 J. KI-ZERBO, La natte des autres, pour un développement endogène en Afrique, CODESRIA, DAKAR, Sénégal, 1992, p. 152- 157.
 P. KOURAOGO, 2004, les contes moose dans les medias : enrichissement ou appauvrissement ? Cas des soirées de contes radiophoniques et télévisuelles dans la ville, mémoire de Maîtrise de sociologie, Université de Ouagadougou P43.
 P. KOURAOGO, 2012, « Patrimoines culturels oraux et développement au Burkina Faso : Analyse socioculturelle des contes et légendes, des proverbes et devises moose« , Université Mohammed V-Souissi / Rabat, 2012, 370 pages, p245.

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