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Togo : Enfin la confiance retrouvée ?

Publié le mardi 25 avril 2006 à 08h29min

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Faure Gnassingbé lors de la campagne présidentielle

Depuis le 21 avril dernier, les Togolais essaient de renouer les fils du dialogue rompus depuis de longues années. Vont-ils enfin réussir à accorder leurs violons ? C’est la question que les Togolais et la communauté internationale se posent.

Après tous les rendez-vous ratés observés depuis le défunt président Eyadéma , il est tout à fait normal que ce nouveau round soit accueilli avec circonspection. Déjà, les tractations en vue de définir le cadre de la discussion et de désigner les membres du présidium ont mis à nu des divergences entre l’UFC de Gilchrist Olympio et le gouvernement, d’une part, et avec les autres partis, de l’autre.

Ces tiraillements n’ont pas empêché le train du dialogue de s’ébranler. Reste à savoir s’il arrivera à bon port et dans les meilleures conditions possibles. En tout cas, les conducteurs et les passagers de ce train ont une responsabilité historique, celle de restaurer la confiance entre acteurs de la scène politique, condition primordiale de la relance socioéconomique.

Tous, autant qu’ils sont, opposants, dirigeants, membres de la société civile, sont certainement conscients des enjeux du dialogue qui vient de s’amorcer. Chacun, d’une façon ou d’une autre , a payé un lourd tribut de cette longue crise qui a fait des centaines de morts et des milliers de réfugiés.

Le peuple togolais attend certainement d’eux qu’ils transcendent leurs égoïsmes pour l’intérêt supérieur de la Nation. Car il a trop souffert des antagonismes qui sont plus souvent le fait d’une lutte pour le pouvoir que d’un véritable engagement en faveur de la démocratie.

Les turpitudes des hommes politiques togolais maintiennent donc le pays englué dans la misère, alors qu’il dispose de formidables atouts pour assurer son décollage économique. Le Togo est à l’image d’une Afrique qui tourne en rond dans un monde en pleine mutation. Après l’Europe de l’Est qui est sur le point de se libérer de tous ses dictateurs, c’est l’Asie qui est mobilisée pour la démocratie, à l’instar du mouvement de révolte qui a cours au Népal où tout un peuple s’est dressé , à mains nues, contre l’arbitraire d’un monarque. Il en est de même en Amérique du Sud où le mouvement citoyen commence à émerger et à refuser les immixions venant de l’extérieur.

Pourquoi, en Afrique, les populations sont-elles, dans certains pays, obligées de subir le joug de régimes féroces et autoritaires sans broncher ? Doit-on attribuer cette tétanisation à l’analphabétisme ambiant, à la complicité des oppositions politiques, à l’immaturité des organisations sociales, à la mauvaise ingérence de puissances extérieures ou tout simplement à l’absence d’un sens du sacrifice ? Sans doute le tout à la fois.

Les populations africaines sont maintenues dans l’obscurantisme pour être mieux dominées et assujetties par des dirigeants qui n’ont aucun intérêt à voir émerger une conscience citoyenne . Un peuple éclairé est conscient de ses droits et se montre très exigeant vis-à-vis de ses dirigeants. On le voit tous les jours dans les pays démocratiques. Pour éviter tout problème de ce type, certains potentats n’ont trouvé mieux que de museler toutes les voix qui peuvent contribuer à l’éveil des consciences.

Pour embrumer encore plus l’esprit de leurs concitoyens (pour ne pas dire sujets), ces dirigeants d’un autre âge opèrent un véritable lavage de cerveau collectif en ne faisant entendre que les messages qui vantent leurs bonnes œuvres. Le temps des « pères de la Nation » ne semble pas révolu en Afrique. Les nouveaux dirigeants, sous leurs airs de démocrates, font souvent pire que leurs devanciers. Et, avec la bénédiction de capitales occidentales, ils arrivent à s’agripper au pouvoir aussi longtemps qu’ils le peuvent.

Idriss Déby, le président tchadien, est l’un des prototypes de ces chefs d’Etat à problème. Arrivé au pouvoir en 1990 par les armes, il est soutenu à bout de bras par une France qui ferme les yeux sur ses dérives dictatoriales. La démocratie en trompe-l’œil qu’il a instaurée a eu pour résultat de provoquer une instabilité chronique. Face à l’impossibilité d’alternance, une opposition armée a vu le jour et harcèle le régime dans une indifférence quasi générale en Afrique.

C’est d’ailleurs dans un climat surréaliste de ni paix ni guerre que le président tchadien entend organiser une élection présidentielle le 3 mai prochain. Une mascarade électorale de plus, que Déby remportera haut la main, faute d’adversaires - l’opposition boycotte le scrutin - et que Paris ne manquera pas de féliciter. Le cynisme de l’Occident n’a décidément pas de limite.

C’est pourquoi, en dépit des obstacles de toutes sortes qui empêchent son émancipation, le peuple demeure la seule force capable d’impulser le changement en Afrique. Les concertations comme le dialogue intertogolais sont déjà bonnes à prendre, mais elles n’aboutiront pas si le peuple continue d’être sous un régime de terreur qui empêche toute revendication pour l’avènement d’un véritable Etat de droit.

Le Pays

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Vos commentaires

  • Le 25 avril 2006 à 19:31, par IZOTOU En réponse à : > Togo : Enfin la confiance retrouvée ?

    Votre article sur la reprise du dialogue intertogolais est très intéressant. Vous faites part de votre circonspection qui est à l’image de la lassitude de la communauté internationale et des Togolais eux-mêmes à cause des atermoiements interminables dont vous dites à juste raison qu’ils dépendent des égoïsmes et des luttes pour le pouvoir.

    La singularité togolaise ne se limite pas malheureusement au fait que politiquement le pays tourne en rond dans un monde qui avance. Les Togolais sont victimes de leur profond enracinement ethnique qui, au lieu d’être une valeur sûre pour faire naître une nation plurielle, en tout cas une nation enrichie par la diversité de ses peuples, a tendance à nourrir des sectarismes, des antagonismes voire des sentiments orgueilleux et discriminatoires, les uns se croyant mieux que les autres du fait de leur origine ethnique pour gouverner le pays.

    Il faut être Togolais pour le savoir sans doute mais j’ose croire, vu la qualité de votre réflexion, que vous êtes au fait de toutes ces considérations auxquelles le Togo est condamné à pays un lourd tribut.

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