Burkina/Santé : L’ONG ‘’Terre des hommes Lausanne’’ soulage les populations de Toma avec une clinique mobile

Photo des médecins et des bénéficiaires
En vue de répondre efficacement aux besoins humanitaires des populations vulnérables affectées par la crise sécuritaire, l’ONG ‘’Terre des hommes Lausanne’’ a mis en place une clinique mobile dans la région de la Boucle du Mouhoun, précisément dans la commune de Toma. Cette initiative vise à fournir gratuitement des soins de santé primaire aux communautés vulnérables (PDI et hôte), en particulier les enfants et les femmes enceintes. Au cours d’une mission le jeudi 16 janvier 2024, Lefaso.net a eu l’occasion d’assister au fonctionnement de cette clinique mobile et d’échanger avec les participants ainsi que les autorités communales de Toma sur les bien-fondés de cette clinique mobile.
Depuis environ dix ans, le Burkina Faso fait face à une situation sécuritaire difficile, ayant entraîné également une crise humanitaire sans précédent avec notamment le déplacement massif des populations des zones en proie aux attaques terroristes. La province du Nayala n’est pas épargnée par cette crise. En plus des efforts de l’Etat burkinabè, de nombreuses ONG comme ‘’Terre des hommes Lausanne’’, viennent en appui au gouvernement.
C’est dans cette optique que Terre des hommes Lausanne a déployée une clinique mobile à Toma, chef-lieu de la province du Nayala afin d’appuyer l’Etat burkinabé dans la prise en charge des personnes déplacées internes et des populations hôtes. C’est lors du déplacement forcé des populations des villages de Nimina et de Nienpourou dans le Nayala, que la clinique mobile a été mise en place à Toma par Terre des hommes Lausanne pour répondre à la sollicitation d’appui lancé par le district sanitaire.
Cette clinique mobile a été mise en place grâce au soutien financier de la Protection civile et de l’aide humanitaire de l’Union européenne (ECHO) dans le cadre du projet « Réponse d’urgence pour renforcer l’accès inclusif et qualitatif aux soins de santé et de nutrition des personnes affectées par la crise au Burkina Faso, dans les régions du Centre-nord, du Nord, de la Boucle du Mouhoun et du Sahel (RASPA) » mis en œuvre par le consortium ALIMA/KEOGO/SOS Médecin.
L’objectif du projet est de contribuer à la réduction de la mortalité des populations affectées par la crise dans les régions du Centre-nord, du Nord, de la Boucle de Mouhoun et du Sahel. Il s’agit aussi de renforcer l’accès inclusif aux soins de santé-nutrition d’urgence des populations affectées par la crise humanitaire et sécuritaire dans ces zones et assurer une réponse adaptée aux besoins médico-nutritionnels en cas de situations imprévues, de chocs humanitaires ou de catastrophes comme les déplacements de populations, les épidémies, les catastrophes naturelles, etc.
Avant la clinique mobile, le seul centre de santé de référence complètement débordé
Selon Dr Harouna Sissao, médecin chef du district sanitaire de Toma, bien avant l’arrivée de la clinique mobile à Toma, le seul CSPS urbain était débordé par l’afflux des patients. Une situation due notamment au déplacement massif des populations des communes environnantes vers la ville de Toma.
« Au niveau du district sanitaire de Toma comme tous les 70 districts sanitaires du Burkina Faso, nous travaillons à améliorer les conditions de santé de nos populations. C’est également intensifier la surveillance épidémiologique pour pouvoir détecter à temps ces épidémies et pouvoir également les prendre en charge au niveau de leur foyer. Malheureusement, nous avons également connu des déplacements de populations des zones comme Nimina, Nienpourou, Gassan vers la commune urbaine de Toma, et la commune rurale de Yé. Les difficultés qui nous sont parvenues dès le début de ces déplacements des populations, c’est essentiellement côté sanitaire, des questions de rattrapage de vaccination, de dépistage de la malnutrition et de prise en charge mais également des activités de promotion de la santé notamment l’assainissement et les sensibilisations sur les meilleurs comportements des populations pour éviter les maladies », a-t-il confié.
Des confidences confirmées par le premier responsable de la commune de Toma, le président de la délégation spéciale (PDS), Zakaria Sawadogo. « Comme tout acteur local, lorsque la situation sécuritaire s’est présentée et qu’il y a les déplacements massifs des populations dans notre commune, des actions ont été menées. D’abord, c’est chercher à avoir l’information et rencontrer certains acteurs qui puissent contribuer à l’accueil de la population. Des acteurs ont été aussi mis à contribution pour pouvoir apporter une réponse, parce que lorsque les gens se déplacent dans votre localité, il y a sûrement des besoins. Dans la prise en charge des PDI, les défis sont nombreux. En termes de santé, malgré les efforts fournis par la commune et les partenaires, beaucoup de choses restent à faire. Il y a aussi des défis en termes d’alimentation, de logement, d’assainissement, etc. Pour combler ces besoins, la commune n’a pas souvent immédiatement les moyens pour y faire face Mais grâce aux partenaires comme Terre des hommes, nous arrivons à faire face aux besoins primaires de ces populations déplacées », a-t-il soutenu.
La clinique mobile pour désengorger le CSPS urbain et soulager la population
Pour faire face à cette situation difficile, la commune de Toma a reçu le soutien de l’ONG Terre des hommes Lausanne avec la mise en place d’une clinique mobile afin de soulager les populations vulnérables. En plus de la clinique mobile, d’autres actions sont menées par Terre des hommes Lausanne pour répondre efficacement à cette crise humanitaire dans la province du Nayala, à en croire le coordonnateur médical de l’ONG.
« La clinique mobile a été mise en place dans le cadre du projet RASPA (Réponse d’urgence pour renforcer l’accès inclusif et qualitatif aux soins de santé et de nutrition des personnes affectées par la crise au Burkina Faso). C’est un projet qui est mis en œuvre en consortium avec ALIMA, KEOGO et SOS Médecins et financé par ECHO. Il a démarré le 1er mai 2024 et finit le 30 avril 2025. Au niveau de la Boucle du Mouhoun, c’était seulement le district de Tougan qui était prévu pour l’intervention. Mais au niveau du projet, il est prévu une disposition qui permet que lorsqu’il y a une situation de crise, d’aller apporter une réponse, même en dehors de la zone d’intervention. En réalité, c’est cette prédisposition qui a été validée par le bailleur et nous a permis d’apporter la réponse à Toma. Sinon initialement, il n’y avait pas Toma dans la zone d’intervention. En plus de la clinique mobile, il y a un appui en ressources humaines pour la commune de Yé. Il faut dire qu’il y a eu des mouvements des populations vers Toma mais également il y a eu des populations qui sont quand même restées à Yé. Avec les autorités administratives, les services techniques, nous avons également procédé au recrutement local de deux infirmiers et d’une sage-femme qui ont appuyé les consultations des populations qui sont restées sur place », a détaillé Souleymane Diallo, coordonnateur médical/Urgence de l’ONG Terre des hommes Lausanne.
Pour lui, depuis sa mise en œuvre plus de 2 000 personnes ont été touchées. Tout en remerciant les acteurs qui ont contribué à la mise en place de cette clinique mobile, le coordonnateur médical a indiqué que les soins sont destinés aux personnes vulnérables et sont entièrement gratuits.
« Concernant les données, il faut dire que chaque mois, nous faisons le point que nous reversons au CSPS urbain qui est notre formation sanitaire de référence. Il faut dire qu’en moyenne, nous avons 1 000 consultations par mois et nous avons démarré la clinique mobile le 24 octobre 2024. Ces soins sont adressés aux personnes vulnérables. Ce qui justifie que même lors de l’identification du site, avec les communautés et les autorités administratives, on a choisi les sites de concentration des personnes déplacées internes. C’est pour ça, on s’est retrouvé au secteur 7 et au secteur 1, les zones qui recevaient plus de personnes déplacées internes. Ces soins sont entièrement gratuits. Les consultations sont gratuites, les prescriptions gratuites. Lorsqu’il y a des cas graves, nous avons notre ambulance qui accompagne pour les références vers le CSPS urbain et au besoin, pour un accompagnement au niveau secondaire », a précisé Souleymane DIALLO.
Tout en se réjouissant de la mise en place de cette clinique mobile, Dr Harouna Sissao, le médecin chef du district sanitaire de Toma a affirmé qu’elle a permis de diminuer l’afflux des populations vers le CSPS urbain et améliorer également la prise en charge de ces populations. « Nous saluons Terre des hommes pour l’installation et la mise en œuvre de la clinique mobile au niveau de la ville de Toma. Cette clinique mobile nous a permis de pouvoir désengorger le CSPS urbain qui est le seul CSPS d’ailleurs de la ville de Toma au premier échelon qui reçoit les malades. Il était beaucoup débordé. Il faut dire qu’en interne, nous avons essayé de faire des redéploiements des agents de santé pour pouvoir endiguer cette saturation en termes de demande de soins. Malheureusement ces efforts n’ont pas pu réduire ces afflux des populations pour les besoins de santé. C’est comme ça que le partenaire Terre des hommes nous a accompagné à la mise en œuvre de cette clinique mobile qui a permis essentiellement et efficacement de pouvoir diminuer l’afflux des populations vers le CSPS urbain et améliorer également la prise en charge de ces populations. Nous sommes vraiment très contents », a-t-il indiqué.
Selon le médecin chef du district sanitaire de Toma, les soins administrés au niveau de la clinique mobile sont essentiellement les soins de promotion de la santé, la consultation des enfants de moins de 5 ans, les femmes enceintes, les adultes. Elle offre également des prestations sur tout ce qui concerne les soins de santé primaire. La clinique mobile s’est déportée à Toma avec le matériel et le personnel pour offrir ces soins aux populations du Nayala. Le district sanitaire de Toma appuie avec l’expertise technique et l’accompagnement dans la mise en œuvre de cette clinique mobile ».
Dr Harouna Sissao se félicite de la bonne collaboration entre son institution et l’ONG Terre des hommes Lausanne. Il plaide cependant pour la reconduction du projet de la clinique mobile qui arrive à terme en fin avril 2025. « On a une très belle collaboration. Quand on prend les données de fin octobre à décembre 2024, nous sommes aujourd’hui à plus de 2 500 prestations de santé offertes à ces populations avec en grande partie les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans. Donc, on n’a pas de difficultés sur le terrain, c’est essentiellement des plaidoyers pour une reconduction pour continuer à nous aider, parce que le besoin y est et demeure au niveau de la ville de Toma. Des efforts sont faits au niveau sécuritaire pour le retour de certaines populations dans leurs localités mais jusque-là, d’autres sont toujours là et le CSPS urbain toujours dans un état de saturation. Si la clinique mobile continue, cela va nous aider à pourvoir maintenir l’offre de soins à la population », a-t-il souhaité.
Même son de cloche chez le PDS qui reconnaît l’apport considérable de cette clinique mobile dans l’offre de soins de santé dans sa commune. Il a aussi plaidé pour la reconduction de ce projet. « Nous sommes très satisfaits de l’accompagnement de l’ONG Terre des hommes par la mise en place de cette clinique mobile. Il faut dire que le seul CSPS qui est au centre-ville, c’est celui que nous appelons le CSPS urbain. Depuis le déplacement massif sur notre territoire, le CSPS accueille beaucoup de patients, au-delà même de sa capacité. Avec l’installation de cette clinique mobile, nous avons constaté un désengorgement au niveau du CSPS. Nous avons constaté que le nombre de patients qui fréquente ce CSPS a également diminué. Tout cela, c’est grâce à l’arrivée de cette clinique mobile. Elle est venue soulager énormément la population et les agents de santé. Les prises en charge au niveau de la clinique mobile sont de qualité et appréciées par les bénéficiaires. C’est le lieu de plaider pour que la clinique mobile continue. Cela va beaucoup nous arranger », a déclaré Zakaria Sawadogo, PDS de la commune de Toma.
Satisfaction et gratitude des bénéficiaires directs
Du côté des bénéficiaires directs, c’est le soulagement et des sentiments de gratitude envers les initiateurs de cette clinique mobile. De nombreuses populations se tournent désormais vers la clinique mobile, plus proche et avec moins de temps d’attente. C’est le cas de Marcel Kourané et de Julie Lydie Paré, deux bénéficiaires venus pour des consultations.
« C’est ma troisième fois de venir consulter au niveau de la clinique mobile. Je suis venu contrôler ma tension. Ils m’ont conseillé d’abandonner certains aliments trop salés, certaines boissons. Je mange naturellement, je ne bois pas d’alcool. Je viens donc pour un contrôle de routine. C’est ma troisième fois mais je n’ai jamais payé pour me faire consulter. Je suis satisfait des prestations de la clinique mobile, ça aide beaucoup les populations », a confié Marcel Kourané.
« C’est ma première fois de venir ici. Je suis allée au CSPS et on m’a dit qu’on fait des consultations ici. C’est comme ça j’ai eu l’information pour venir. Je suis venue avec mon enfant pour la vaccination du 15e mois. Si tu rates la vaccination, ce n’est pas bon. Cette clinique mobile est une très bonne chose, ça aide beaucoup les populations. On a des maux qu’on ne sait pas comment soigner. Donc, cette clinique mobile vient nous soulager » a affirmé Julie Lydie Paré.
Mamadou ZONGO
Lefaso.net