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Burkina/Santé : « La plupart des calculs urinaires sont liés à une alimentation trop riche, mal équilibrée… », Dr Aïssata Ouédraogo, chirurgienne urologue

Publié le mercredi 20 novembre 2024 à 22h15min

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Burkina/Santé : « La plupart des calculs urinaires sont liés à une alimentation trop riche, mal équilibrée… », Dr Aïssata Ouédraogo, chirurgienne urologue

Les calculs urinaires touchent de nombreuses personnes dans le monde et au Burkina Faso. Dans cet entretien qu’elle nous a accordé, Dr Aïssata Ouédraogo, chirurgienne urologue au Centre hospitalier universitaire régional de Ouahigouya, souligne que les calculs urinaires peuvent être responsables de complications qui peuvent être sévères et pouvant même entraîner la mort. Elle revient sur les causes et les symptômes des calculs urinaires et prodigue quelques conseils pour les éviter.

Lefaso.net : Qu’est-ce qu’un calcul urinaire ?

Dr Ouédraogo : Un calcul urinaire, c’est la présence dans les voies urinaires (cavités rénales, pyélon, uretères, vessie, urètre) de concrétions (corps solides) cristallines, minérales, organiques ou médicamenteuses. C’est une pathologie multifactorielle pouvant survenir à tout âge.

Avez-vous une idée du nombre de personnes qui souffrent de calcul urinaire dans votre service ?

Oui beaucoup de personnes souffrent de calculs urinaires. Dans le monde, 4 à 18 % de la population mondiale en souffre. Au Burkina Faso, Pr Kaboré et ses collaborateurs avaient retrouvé une prévalence de 12,5% à Ouagadougou. Dans le service d’urologie du centre hospitalier universitaire de Ouahigouya, ces trois dernières années, nous avons opéré 58 patients et certains ont bénéficié d’un traitement médical pour expulser le calcul par les voies urinaires naturelles et d’autres sont sous surveillance.

Quels sont les causes des calculs urinaires ?

La plupart des calculs sont liés à une alimentation trop riche, mal équilibrée et à une diurèse (la quantité totale d’urine émise sur 24 heures) insuffisante. On dit de cette maladie qu’elle mange trop, mange mal, et ne boit pas assez.

Les facteurs qui peuvent influencer la formation d’un calcul dans les voies urinaires sont nombreux. On a les facteurs alimentaires, notamment l’alimentation riche en produits laitiers, protéines animales, en sel, favorisant l’hypercalciurie ; le chocolat, les fruits secs, les épinards, l’oseille, le thé, les bonbons qui sont riches en oxalate ; les purines (abats, charcuterie), les sucres rapides (fructose) ; la diminution de la consommation des fibres alimentaires (les fruits, les légumes, haricots secs, riz…).

La baisse des apports hydriques est aussi un facteur favorisant, surtout dans les pays chauds et en cas de travail en ambiance surchauffée avec des apports hydriques insuffisants.

Il y a également les facteurs familiaux. Il existe des familles qui font des calculs. Cela est due à une maladie appelée Cystinurie qui est une affection génétique à l’origine d’accumulation d’acides aminés dans les urines responsables de la formation des calculs.

Les infections urinaires sont également un autre facteur favorisant. En effet, certains germes, comme Proteus mirabilis, Klebsielle et Pseudomonas possèdent une enzyme, l’uréase, qui dégrade l’urée en une matrice protéique sur laquelle précipitent les sels minéraux pour former des calculs.

A cela s’ajoutent les anomalies du pH urinaire. Le pH urinaire normal est de 5,4. Lorsque le Ph urinaire tourne autour de 5 ou 7, cela peut favoriser la formation des calculs urinaires.

Certains médicaments également favorisent la survenue des calculs. Il s’agit de l’Indinavir, l’Atazanavir qui sont des médicaments utilisés dans le traitement du VIH, le Cotrimoxazol, l’Allopurinol, l’Amiodarone, les diurétiques thiazidiques, la vitamine D.

Les anomalies anatomiques congénitales comme la polykystose rénale, des reins en fer à cheval, des sténoses calicielles, pyéliques, urétérale, du syndrome de la jonction pyélo-urétérale, le méga-uretère sont aussi des facteurs favorisants la survenue des calculs urinaires.

A cela, il faut ajouter des facteurs acquis, notamment les obstacles sous vésicaux tels que les maladies du col vésical, les hypertrophies prostatiques, les fistules vésico vaginales, les fistules utéro-vaginales, les sténoses calicielles, pyéliques, urétérales acquises.

Quels sont les symptômes en cas de calcul urinaire ?

La symptomatologie dépend de la localisation du calcul. On peut avoir une colique néphrétique qui est le mode de révélation le plus fréquent. Il s’agit d’une douleur lombaire qui irradie en bas, le long des cuisses et vers les organes génitaux externes. Une douleur lombaire qui reste sur place, des brûlures mictionnelles (douleur quand vous urinez), une hématurie (du sang dans les urines) sont aussi des symptômes des calculs urinaires. La pollakiurie (augmentation de la fréquence des miction), des efforts de poussée, des urines goutte à goutte et une sensation qu’on ne vide pas bien sa vessie, ainsi qu’une rétention d’urine qui est l’impossibilité totale ou partielle à émettre les urines, sont également des symptômes de calculs urinaires.

Quelles sont les complications des calculs urinaires ?

Les calculs urinaires peuvent être responsables de complications qui peuvent être sévères et pouvant même entraîner la mort. Il y a différents types de complications. Nous avons les complications infectieuses, notamment la pyélonéphrite aigue obstructive, la pyonéphrose, le choc septique/ septicémie et l’infection urinaire récidivante.

Les complications des calculs urinaires peuvent aussi être mécaniques telles que la douleur, la rétention vésicale, l’anurie qui aboutit à une insuffisance rénale sévère en cas de calculs bilatéraux ou de calculs sur un rein unique anatomique ou fonctionnel, la rupture du bassinet et ou de l’uretère et la rupture de la voie excrétrice.

Comment se fait la prise en charge des calculs urinaires ?

Il faut savoir que le but de la prise en charge des calculs urinaires est de soulager le patient, favoriser l’expulsion du calcul, extirper le calcul, prévenir les complications et les récidives et éviter les récidives. Pour ce faire, plusieurs moyens sont disponibles.

Il s’agit en premier lieu des mesures hygiéno-diététiques. Elles sont applicables à tous les patients atteints de maladie lithiasique urinaire.

Avoir une diurèse (quantité d’urine émise par 24 heures) supérieure à 2 000 ml est le premier objectif.
On conseille également au patient une boisson abondante à repartir tout au long de la journée et en dehors des douleurs, ainsi qu’une alimentation équilibrée.

Pour ce qui est des moyens médicamenteux, il faut noter que la douleur est prise en charge par des anti-inflammatoires non stéroïdiens. Le kétoprofène injectable ou en comprimé est prescrit aux patients en fonction de l’intensité de la douleur.

Il arrive qu’on prescrive parfois des antibiotiques en cas d’infection des urines ou des alcalinisants urinaires pour essayer de dissoudre les petits calculs

Il y a aussi les moyens instrumentaux. Le plus souvent ce sont des moyens utilisés pour soulager le patient en attente d’un traitement radical ultérieur. Il s’agit de la mise en place d’une sonde double J., de la mise en place d’une sonde de néphrostomie ou d’une dialyse en cas d’insuffisance rénale sévère.

La prise en charge des calculs urinaires peut se faire aussi par des moyens chirurgicaux. Le traitement chirurgical possède ses indications.

Il peut s’agir de :
  La lithotritie extra corporelle (Fragmentation des calculs par voie extracorporelle grâce à des ondes de choc). C’est le traitement de première intention pour les calculs de - de 2 cm ;

  la néphrolithotomie per cutanée qui a pour principe l’extraction des calculs rénaux à travers un tunnel de néphrostomie crée par voie transcutanée permettant ainsi le passage d’instruments endoscopiques susceptibles d’extraire, de broyer, ou de pulvériser les calculs. Elle est le traitement de référence pour les calculs > 2 cm, coralliformes ou complexes du rein ;

  L’urétéroscopie qui consiste à introduire par les voies naturelles de façon rétrograde, un urétroscope permettant de visualiser et de travailler au contact du calcul. Extraction du calcul à la pince ± fragmentation au laser. Elle est indiquée en cas calculs résistants à la LEC et siégeant au niveau de l’uretère pelvien.

  La chirurgie à ciel ouvert qui garde toujours ses indications dans notre contexte mais à peu d’indication aujourd’hui dans les pays développés.

Si une cause organique est retrouvée, il faut la traiter en même temps que le calcul.

Comment prévenir la survenue des calculs urinaires ?

Pour éviter la survenue des calculs urinaires, il faut boire suffisamment d’eau pour diluer vos urines et diminuer le risque de survenue de calculs urinaires. Il est conseillé de boire 2 litres d’eau reparties dans la journée.

Il faut également avoir une alimentation équilibrée, normo-sodée, c’est-à-dire éviter de manger trop salé et éviter les aliments salés, surtout pas d’ajout de sel à table ; une alimentation normo-calcique, c’est-à-dire éviter une alimentation riche en calcium. Un apport de 800 mg à 1 gramme de calcium est conseillé par jour.
Il faut avoir une alimentation normo-protéique, c’est-à-dire éviter la consommation en excès de viande, poissons, œufs. Un apport de 100g de viande ou 100g de poisson ou 2 œufs par jour.

Il faut aussi éviter les aliments riches en oxalates (fruits secs, chocolat noir, épinards, oseilles, thé, bonbons, betteraves...)

Il vous faut une alimentation riche en citrate (jus d’orange, citron, pamplemousse, et légumes) et il faut prévenir et traiter efficacement les infections urinaires.

Pour contacter Dr Aïssata Ouédraogo : 70 73 75 84

Interview réalisée par Justine Bonkoungou
Lefaso.net

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